Ecriture-Lecture




LA VENGEANCE



LA VENGEANCE
























CHAPITRE 1






Le froid était vif.
Il continuait à marcher, mécaniquement, depuis longtemps, mais à chaque instant, Yves pensait que le pas qu?il faisait était le dernier. Tout sont corps était douloureux. De la nuque à la pointe des pieds, il était enrobé de douleurs, dont les plus intenses siégeaient dans le dos.
Il arriva à une intersection de deux routes, et une pancarte lui indiqua qu?il était à 4 km de son but. Jamais, jamais, il ne pourrait y parvenir, et un immense désir de se laisser tomber au bord de la route l?envahit, qu?il combattit en serrant les dents. Il fallait continuer, continuer, ne plus penser aux douleurs, et marcher, marcher encore, marcher encore, jusqu?au bout..
Yves leva la tête. Les branches des arbres, noires et luisantes de pluie, balancées par un vent violent, griffaient le ciel gris, et cette contemplation lui permit de faire quelques centaines de mètres de plus, puis, tout d?un coup, sa volonté dut être distraite un moment, car il s?effondra. Il était dans un état semi-comateux, et les douleurs firent place à une sensation de froid et d?humidité intenses.
Une heure plus tard, un automobiliste qui roulait doucement du fait de la route verglacée, vit un corps couché sur l?herbe couverte de gelée blanche. Il s?arrêta, constata que l?homme respirait encore, et après l?avoir installé, avec beaucoup de difficultés à l?arrière de sa voiture, il appela sur son portable, son médecin personnel qui n?habitait qu?à 4 kilomètres de là, pour lui annoncer son arrivée avec une personne sans doute blessée.
Quelques minutes plus tard, le médecin examinait l?inconnu.
Il ne souffrait d?aucune blessure, était simplement très fatigué, et en hypothermie en phase commençante. Le diagnostic était optimiste, malgré l?état semi-comateux de l?homme.
Les papiers trouvés sur lui, indiquaient qu?il s?appelait Yves Mésange qu?il habitait à Clermont Ferrant, qu?il avait 30 ans, mais aucune indication sur sa profession.
Le sauveteur, Jacques Moreau un célibataire de 28 ans, qui venait de sortir du séminaire, et pratiquait, tout naturellement, la charité chrétienne, proposa de prendre Yves chez lui, si son hospitalisation n?était pas nécessaire. Le médecin donna son accord.
Quand à Yves, il avait repris à peu près connaissance, mais restait extrêmement faible, il ne réagit pas lorsque Jacques lui proposa de l?héberger jusqu?à ce qu?il soit remis sur pieds. Après que le médecin eut demandé qu?on lui téléphone, si l?homme ne se rétablissait pas rapidement, Jacques reprit le volant, et ils repartirent jusqu?à Valréas, dans le Vaucluse, où il habitait.
Yves dormit 16 heures non stop. A son réveil, il était toujours très fatigué, mais il avait l?esprit clair, et après avoir demandé à son hôte où il se trouvait, il lui
dit qu?il avait l?obligation de se rendre à Grillon, un village situé à 5 kilomètres de Valréas.
- Vous êtes encore très fatigué, mais si votre problème est urgent, je puis, bien sûr, vous accompagner à Grillon. Je vous attendrai dans la voiture pendant que vous ferez ce que vous avez à faire, et nous reviendrons ici, car vous devez encore vous reposer.
- Non. J?irai où je dois aller, à pied.
- Vous êtes libre, évidemment, mais sachez que si vous avez besoin d?un havre pour goûter un peu de repos, ma maison vous est ouverte.
- Je reviendrai ce soir.
- Il va être midi. Si vous le voulez, nous allons déjeuner et vous partirez après.
- Non. Je pars tout de suite.
Jacques était très surpris par le laconisme, de celui qu?il avait sauvé d?une mort probable. Pas un mot de remerciement, pas le moindre sourire. Ce bonhomme lui paraissait vraiment bizarre, mais il avait sans doute des problèmes, et Jacques considérait que son devoir était de l?aider, dans la mesure de ses moyens.
- . Si vous avez besoin de quelque chose, n?hésitez pas à me le demander. Je m?appelle Jacques Moreau.
- Je reviendrai ce soir répéta Yves.
Et il partit,
Jacques eut la confirmation que cet Yves était un drôle de pistolet ! Il n?avait prononcé que les mots absolument indispensables. Il ne s?était pas présenté quand Jacques l?avait fait,, et s?il n?avait pas vu ses papiers, il n?aurait pas su, que le patronyme d?Yves, était Mésange. Sans doute le bonhomme avait-il été traumatisé par une longue marche, et par son hypothermie. Le soir, puisqu?il devait revenir, peut être se montrerait-t-il plus loquace ?
Yves était parti vers Grillon. 5 Kilomètres, ce n?était pas la mer à boire, pour lui qui durant 10 jours, avait marché chaque jour depuis son départ de Clermont Ferrand.
Mais si en quittant la maison de Jacques, il se sentait à peu près bien, après quelques centaines de mètres, toutes les douleurs se réveillèrent, et il souffrit dans tout son corps, et surtout du dos et des mollets.
Doué d?une volonté peu commune, il continua sans daigner faire le signe d?auto-stop, malgré le nombre de voitures qui le dépassaient.
En arrivant sur la place de la Bourgade à Grillon, il demanda où se trouvait la maison de Monsieur Balky. Quand on la lui indiqua, il poussa un léger soupir : Il avait encore 20 minutes de marche. Il repartit cependant, et arriva enfin devant une grande maison typiquement provençale, à plusieurs toitures, avec un grand jardin sur le devant, bien entretenu, et sur le côté, un court de tennis, occupé par un jeune homme et une jeune fille, qui jouaient dans la joie, si l?on s?en référait aux nombreux éclats de rire qui ponctuaient chaque point gagné? et perdu par l?autre.
Yves avisa un très vieux mur en pierres sèches, situé à une cinquantaine de mètres de l?entrée de la villa. Il alla s?y installer, et resta là, immobile, le regard tourné vers la maison, le visage vide de toute expression.
Les jeunes sportifs terminèrent leur partie et entrèrent dans la maison, sans cesser de rire et de plaisanter.
Yves, ne bougea pas, et resta plus de trois heures assis sur son mur. Un homme, d?une cinquantaine d?années, sortit de la maison, alla ouvrir la porte d?un garage, monta dans une voiture et sortit après avoir actionné l?ouverture automatique du portail de la villa.
Lorsqu?il aperçut l?homme, qui conduisait, Yves, eut une petite réaction. Il serra les points, et ses yeux semblèrent lancer des éclairs, puis, comprenant que l?homme allait sortir, Yves se laissa glisser derrière le mur, pour ne pas être vu par l?automobiliste.
Dès que le véhicule fut hors de vue, Yves se releva, et lentement, il reprit la route pour revenir à Valréas..
Il arriva enfin chez Jacques, qui lui demanda s?il était satisfait des résultats de sa démarche. Toujours aussi laconique, Yves répondit simplement : - Oui.
Malgré toute sa gentillesse, Jacques ne put s?empêcher de dire.
- Je sais que vous devez être très fatigué, et que vous avez sans doute des problèmes. Néanmoins, si je ne vous demande pas de m?être reconnaissant de vous avoir peut être sauvé la vie, du moins pourrais-je espérer un minimum de politesse de votre part. Je ne vous demande aucune confidence, et c?est de bon c?ur que je vous offre l?hospitalité, mais puis-je en retour vous demander de ne pas être trop désagréable ?
- Ce n?est pas pour moi que vous m?avez pris en charge. C?est pour vous, pour avoir bonne conscience.
- Vous devez être bien malheureux pour parler de la sorte.
Yves se contenta de hausser les épaules.
Comme Yves s?était installé dans un fauteuil, et ne semblait pas vouloir poursuivre cette passionnante conversation, Jacques prit le parti de mettre la table et de préparer un repas.
Il revint de la cuisine avec un plat de crudités, et se mit à table, Yves, toujours sans un mot, se leva, s?installa devant son hôte, et se servit.
Les deux hommes mangèrent en silence.
A la fin du repas au cours duquel, Yves s?était servi copieusement, Jacques demanda :
- Puis-je à tout le moins savoir quels sont vos projets ? Je ne parle évidemment pas de vos affaires, je respecte vos secrets, mais de votre séjour ici.
- Je partirai demain matin et reviendrai demain soir.
Jacques se retint pour ne pas faire une réflexion désagréable, et les deux hommes allèrent se coucher sans avoir prononcé un autre mot.
Après le petit déjeuner pris en silence le lendemain matin, et au moment de partir, c?est Yves qui prononça quelques mots.
- Je reviendrai vers 19 heures.
Jacques ne put s?empêcher de lui répondre :
- Je l?espère, car le restaurant ne sert plus après 19 heures.
- La vraie charité ne se mesure pas, rétorqua Yves, avant de franchir la porte.
Il était exactement 19 heures lorsque, d?un pas un peu plus vif que la veille, Yves entra dans la maison de Jacques, sans avoir frappé au préalable, comme s?il se trouvait chez lui.
Il alla directement vers le fauteuil qu?il avait occupé la veille, prit un journal qui trainait sur la table basse, s?assit et se mit à lire.
Jacques qui l?avait regardé faire, eut semble-t-il le désir de lui faire une réflexion, et finalement s?abstint de prononcer un mot.
La scène de la veille se reproduisit. La table mise, Jacques apporta le premier plat, Yves posa son journal, vint se mettre à table et mangea de bon appétit. Arrivés au dessert, pas un mot n?avait été prononcé, Jacques n?y tint plus, et dit :
- Il y a monsieur, des limites à l?impolitesse. Je vous ai recueilli au bord de la route, vous ai fait soigner par mon médecin, vous ai amené chez moi, où vous pouvez dormir et manger, et vous ne desserrez pas les dents. Vous créez une ambiance très désagréable, je ne vous le cache pas, et je n?aurais pas pu subir votre présence, si ancien séminariste, je ne pratiquais pas la charité chrétienne.
Yves regarda son hôte très longuement, plia sa serviette, d?une façon artistique, pour marquer son intention de revenir, se leva et se dirigea vers sa chambre.
Devant tant de goujaterie, Jacques resta un bon moment interdit, et maugréa en débarrassant la table.
Le lendemain matin, quand Yves arriva dans la salle à manger, Jacques venait juste de terminer son petit déjeuner, et n?avait rien préparé pour son hôte.
Sans dire un mot, Yves, prit un bol dans le placard, le remplit d?eau, le mit au micro onde, puis ajouta deux cuillers de nescafé, et commença à se faire des tartines de beure.
Au début, Jacques l?avait regardé faire, mais craignant sans doute de ne pouvoir se retenir de dire des propos désagréables, il sortit de la pièce.
Yves, son petit déjeuner terminé, mit ses couverts dans la machine à laver, puis sortit.
Jacques revint dans la salle à manger, et constatant le départ de son curieux visiteur, il arracha une page d?un carnet et écrivit :
« Puisque vous ne semblez pas supporter les paroles, je vous demande par écrit de partir définitivement demain matin, après le petit déjeuner, que j?aurai la faiblesse de vous préparer, pour la dernière fois. Jacques »






















CHAPITRE 2





Il était 17 heures 30 lorsque Jacques arriva à la porte de son appartement.
Il trouva Yves, couché en chien de fusil, sur le palier. Il respirait bruyamment, et une large tâche de sang s?étendait sur sa chemise à la droite de la poitrine.
En entendant les pas de Jacques, il cligna des yeux, et ne parvint pas à les ouvrir normalement.
- Que vous arrive-t-il encore ? Demanda Jacques, qui, n?obtenant pas de réponse, ouvrir sa porte, et prenant Yves par les bras, le traina à l?intérieur de son appartement.
Il déboutonna la chemise du blessé, qui semblait avoir reçu une balle et souffrir d?une blessure en séton. Il alla chercher une cuvette d?eau, une éponge, du coton et de l?alcool à 90.
Le blessé se laissa faire sans réaction, jusqu?à de que Jacques nettoie la plaie avec l?alcool à 90. Yves poussa un grand cri, et sembla aussitôt sortir de sa torpeur.
- Aïe !! Vous me faites mal.
- Il faut bien que je désinfecte la plaie. Qui vous a fait ça ?
Yves resta un long moment à gémir, puis, la douleur s?étant un peu calmée, il finit par dire.
- Tout à l?heure, je parlerai
- Cela fera un changement. En attendant, aidez-moi ! Vous allez vous relever et vous appuyer sur moi, nous irons jusqu?au salon.
Une fois installé dans un fauteuil, Yves accepta le whisky qu?Yves lui offrait, et tous les deux, assis dans des fauteuils, le blessé, jusqu?à présent peu loquace, se mit à parler, parler?
- Tout d?abord, il est inutile de prévenir la gendarmerie. Il s?agit d?un problème privé que je veux régler personnellement. Je vous dois des excuses. Je vous les présente. Je vais vous parler de ma situation, et j?espère que vous me comprendrez. Je ne peux faire confiance à personne, et j?ai décidé de faire une exception pour vous. Vous m?avez dit que vous étiez resté plusieurs années au séminaire. Considérez que vous allez m?entendre en confession.
J?habitais à Clermont Ferrand. Je travaillais comme Secrétaire Général dans une entreprise dont mon père était le Président Directeur Général, et possédait 50% des actions. Son bras droit, Directeur Général adjoint, monsieur Balky, possédant les autres 50%, est le frère de ma mère.
J?avais une compagne depuis 3 ans. Tout allait pour le mieux, tant sur le plan professionnel, que sur le plan privé.
Il y a un peu moins d?un mois, mon père a été tué dans un accident de la route. Je doute, maintenant, qu?il s?agisse d?un accident, mais j?y reviendrai.
Le soir de l?enterrement de mon père, Balky me convoqua dans son bureau. Je pensais qu?il voulait me présenter ses condoléances et me parler du problème du remplacement de mon père. A ce sujet, je pensais normal que Balky prenne désormais les fonctions de mon père, et que je devienne son adjoint.
A peine entré dans son bureau, sans même me proposer de m?asseoir, Balky me dit.
- Je serai bref. Ton père est mort. Désormais, je possède la totalité des actions de la société. Voici tout d?abord, un contrat qui te prouvera que nous avions pris l?engagement écrit, qu?en cas du pré- décès de l?un de nous, le survivant deviendrait propriétaire de toutes les parts. Il me remit ce contrat, que je n?eus pas le temps de lire, car il enchaina : Voici un autre papier. C?est le double, de la lettre recommandée, que tu recevras demain : Ta lettre de licenciement. Tu ne fais plus partie de la société. Je te préviens charitablement que si tu saisissais les prud?hommes, ce serait du temps perdu, car j?ai constitué un dossier de griefs à ton sujet, qui ne te laisserait pas la moindre petite chance. Voilà. J?ai été bref. Maintenant tu peux rentrer chez toi. Ta journée a été rude, mais elle n?est pas encore terminée.
J?étais effondré, incapable d?une réaction, et je suis sorti du bureau de Balky comme un somnambule.
Je me souviens avoir tourné longtemps dans le quartier résidentiel où j?habitais, afin de retarder au maximum le moment où je devrais avouer à ma compagne, Lise Boulanger, la tuile qui venait de me tomber sur la tête.
Il était 9 heures du soir lorsque je me suis décidé à aller tout raconter à Lise.
Elle m?attendait, assise dans un fauteuil, souriante. Lorsque je lui dis que j?avais de mauvaises nouvelles à lui annoncer, sans cesser de sourire, elle me dit qu?elle
était déjà au courant, et que malheureusement, elle en avait d?autres à m?apprendre. Comme j?étais incapable de prononcer un mot, c?est elle qui reprit :
- Je sais que Balky est désormais propriétaire de toutes les actions de la société. Je sais également que tu as été licencié. En fait, j?ai été au courant de tout cela, le jour de la mort de ton père.
Il faut voir les choses en face. Tu es un homme fini. Je suis encore jeune et jolie, je ne veux pas mener une vie de misère. J?ai donc pris mes dispositions pour ne pas être à la rue, car évidemment tu vas devoir résilier le bail de ton appartement, puisque tu ne pourras plus régler le loyer.
J?eus la force de réagir un instant.
- Que racontes-tu, Lise ? Je vais trouver une autre situation, quand à mon loyer, j?ai fort heureusement pas mal d?argent de côté pour voir venir.
- J?en suis désolée, mais, non, tu n?as pas le temps de voir venir. Il n?y avait aucune raison pour que tu m?entraines dans ta chute. J?avais la signature sur ton compte et sur ton livret. Je les ai vidés, en te laissant cependant 100 euros sur chacun.
J?ai failli m?étrangler de colère, et ce n?est pas une image : je ne pouvais plus respirer, je haletais, et pensais que ma dernière heure était venue. Lise, m?apporta un verre d?eau, et toujours souriante, elle quitta l?appartement en me disant qu?elle espérait sincèrement que j?allais m?en sortir. Elle vint même poser un baiser sur mon front.
Bien sûr, j?étais une loque. Je n?ai pas songé un seul instant à vérifier les dires de Lise. Je savais qu?elle avait dit la vérité, et que je me retrouvais sans argent, sans appartement, sans situation.
Je suis allé prendre une douche, j?ai avalé trois comprimés pour dormir, qui ont eu pour effet de me plonger dans le sommeil durant 11 heures. Je me suis réveillé avec un léger mal de crâne, mais lucide.
Les idées se bousculaient dans mon esprit. Il y avait trop, beaucoup trop de zones d?ombre dans cette terrible histoire, et je voulais me battre sur plusieurs fronts.
Je me posais en premier lieu la question de la légalité du papier signé par mon père et Balky, laissant toutes les actions au survivant. Il ne pouvait déshériter son fils, qui, en tout état de cause, bénéficie d?une part réservataire. D?ailleurs, la question se posait de savoir si ce document était authentique et avait bien été signé par mon père.
Lise m?avait dit qu?elle était au courant des décisions prises à mon encontre, le jour de l?accident de mon père. C?était pour le moins curieux. Tout s?était donc passé comme si Balky s?était préparé au décès de mon père. De là à penser que son accident n?en était pas un, mais avait été provoqué, il n?y avait pas loin.
Ce dossier de griefs dont m?avait parlé Balky était également bizarre. Je n?avais jamais fait l?objet de la moindre remontrance durant les huit ans passés dans la société, de plus, je n?avais pratiquement jamais eu à travailler avec Balky lui-même.
Certes, je n?avais plus rien, j?étais ruiné, sans même un toit pour m?abriter, mais il me restait tout de même un espoir. J?avais perdu ma mère il y a dix ans, elle n?avait aucune fortune, mais, mon père, habitait dans une villa, et devait bien avoir une petite fortune en placements, et comme j?étais fils unique.. ?
Je connaissais bien le notaire de la famille, Maitre Martin, et je résolus d?y aller immédiatement. Il me reçut avec un visage grave, que j?attribuais à la tristesse après la mort de mon père, qui était pour lui un ami, plus qu?un client.
- Mon pauvre Yves, me dit-il, cela fait beaucoup à la fois me dit-il
- Ah ? Vous êtes au courant pour Lise ?
- Pour Lise, non. Que se passe-t-il ?
- Elle ne pouvait supporter la pauvreté, elle a vidé mes comptes, sur lesquels elle avait la signature, et elle est partie.
- Ce n?est pas possible !! Avec l?incendie en plus, ce n?est pas possible !!
- Quel incendie ?
- Ah, vous ne saviez pas encore cela ? Cette nuit un incendie a entièrement détruit la villa où logeait votre père.
Les nerfs tendus à l?extrême, j?éclatais d?un rire nerveux.
- Mais c?est parfait ! Vous allez me dire que la compagnie d?assurances qui garantissait la maison a fait faillite ?
- Non, tout de même, je ne le pense pas. Mais l?assurance n?aura à payer que les meubles, car votre père n?était que locataire. Il avait tenu à mettre tous ses biens dans sa société.
- Vous devez savoir s?il avait des placements ?
- Je vous ai dit qu?il avait tout mis dans la société.
- A ce propos, savez-vous que mon père aurait passé un contrat avec Balky aux termes duquel, en cas de décès de l?un, l?autre recevait toutes les parts de l?autre ?
- C?est moi, qui lui ai conseillé de signer ce contrat.
- Mais?.Pourquoi ?
- Ecoutez, je conçois que vous soyez un peu déstabilisé, mais j?ai beaucoup de travail. Après un moment de réflexion, il ajouta :
Je suis en affaires avec Balky, là !! Et je suis tenu par le secret professionnel. Vous êtes satisfait ? Je n?ai rien à vous dire de plus. Pour Lise, je regrette sincèrement. Maintenant laissez- moi travailler !
Tout le monde, se liguait donc contre moi !
C?est à ce moment là que j?ai réalisé pleinement ma situation. Mon père avait sans doute été assassiné. Avec l?aide du notaire, Balky était devenu propriétaire unique de la société, j?étais licencié, je n?avais pas à espérer un héritage du côté de mon père, et Lise m?avait quitté avec tout mon argent liquide.
Je ne pouvais descendre plus bas, et j?envisageais sérieusement d?en finir. Comme un automate, je suis revenu dans mon appartement, et une seule idée était nette dans mon esprit bouleversé.
Je n?étais pas la victime d?aléas naturels. Toute mon infortune avait été prévue, organisée, voulue, et je n?allais pas baisser les bras sans lutter, sans essayer de prouver que j?étais la victime d?un coup monté. Certes, je n?avais pas beaucoup d?atouts en main, mais, bien que seul, il fallait que je me batte, et que je le fasse sans faire confiance à quiconque, car, en tout être, je devais voir un ennemi.
Je commençais par téléphoner à mon propriétaire qui me dit avoir reçu, avec surprise, une lettre recommandée lui indiquant que je résiliais mon contrat de location. Cette lettre avait été postée le soir même de l?accident de mon père, ce qui me confirma qu?en fait il y avait un plan établi de longue date, et que la mort de mon père n?était pas accidentelle.
Le principal bénéficiaire de toute l?opération étant Balky, c?est à lui que je décidais de m?attaquer en premier lieu.
Je savais qu?il avait une propriété à Grillon, dans le Vaucluse, et qu?il devait aller y passer ses vacances, dans quelques jours.
En vidant mes deux comptes et en y ajoutant les quelques billets que j?avais sur moi, j?étais à la tête d?une fortune de 320 euros. De quoi manger durant quelques jours, mais pas question de dépenser de l?argent en moyen de transport. J?ai donc décidé de partir à pied à Grillon, pour repérer la maison de mon oncle et étudier la possibilité de me retrouver avec lui, seul à seul, pour une explication chaude. Je me suis mis en route, le lendemain matin, et vous
m?avez trouvé, épuisé, au bord de la route, dix jours plus tard.
J?ai maintenant repéré la villa de Balky, et examiné les habitudes de la maison. Ils étaient 5. Balky, Sophie, sa fille, simplement de passage, un jeune homme que je ne connais pas, et qui peut être ne vient que pour jouer au tennis, il y a une vieille dame, qui semble tenir le rôle de gouvernante, et il y a??Lise, oui, Lise mon ancienne petite amie, qui a du trouver plus avantageux de me remplacer par mon oncle beaucoup plus riche.
J?étais tout à l?heure, sur une murette en pierre sèche près de la villa, pour examiner les allées et venues. A une fenêtre du premier, je vis apparaitre Balky. Muni d?une paire de jumelles, il regarda dans ma direction, puis il quitta la fenêtre. Je me demandais s?il avait eut le temps de me reconnaitre, lorsqu?il revint vers la fenêtre, armé d?un fusil. Je me laissais glisser derrière la murette, mais pas assez vite. Il eut le temps de tirer, et de me blesser.
Il y avait derrière moi, un bois truffier, je courus m?y mettre à l?abri, et comme j?ai vu Balky sortir de la villa avec son fusil, je me mis à courir, à courir?et je suis revenu ici.
Voilà toute mon histoire. J?étais bien décidé à ne la raconter à personne, avant d?avoir réussi à gagner la partie. J?ai craqué devant vous, mais je vous demande instamment de n?en parler à personne. Considérez, comme je vous l?ai demandé, que vous m?avez entendu en confession.
- Je n?ai pas qualité pour vous entendre en confession répondit Jacques, mais je vous promets de n?en parler à personne, sauf accord de votre part.
- Merci. Merci pour tout. Puis-je rester chez vous encore 24 heures.
- Vous pouvez rester ici le temps nécessaire. De plus, je me mets à votre disposition pour vous aider. Dites-moi ce que je peux faire pour vous. Si tout ce que vous me dites avoir subi est réel, je serai à vos côtés pour faire triompher votre cause. Que puis-je faire ?
- Je ne sais pas, je suis trop fatigué pour l?instant.
- Nous allons diner, vous essayerez de passer une bonne nuit, et demain nous réfléchirons ensemble. Dites- vous que vous n?êtes plus seul.
- Merci encore.






CHAPITRE 3








Le lendemain matin, pendant le petit déjeuner, c?est Jacques qui entama la conversation.
- J?ai beaucoup réfléchi à votre problème, et je pense que la solution que vous envisagez, d?aller voir votre oncle pour mener une discussion serrée, n?est pas la bonne.
Vous vous retrouveriez en position délicate, d?infériorité. Vous ne possédez aucun élément, aucune preuve pour formuler une accusation solide.
- Alors, que proposez vous ? demanda Yves, qui depuis l?explication de la veille, avait perdu son attitude désagréable.
- Il me semble qu?il est logique de commencer par le commencement. Tout est parti du décès de votre père. Vous semblez penser que l?accident, n?était pas fortuit, mais provoqué. Il y aurait lieu de reprendre l?enquête sur les lieux mêmes, et, si cela n?a pas été fait, de demander l?expertise du véhicule. Où s?est produit l?accident ?
- Entre Lyon et Valence, sur l?autoroute.
- Vous connaissez le lieu exact ?
- Bien entendu. A Tain l?Hermitage
- O.K. Je passe un coup de fil au bureau pour prévenir de mon absence, et nous allons voir la brigade de gendarmerie qui a procédé à l?enquête.
Une heure et demie plus tard, Jacques et Yves se trouvaient assis devant le commandant de la brigade qui avait procédé à l?enquête.
- Je ne comprends pas très bien comment cet accident a pu se produire, sauf à envisager un malaise du conducteur. Nous voulions faire procéder à une autopsie, mais un parent de votre père nous a fourni un certificat médical attestant que votre père avait déjà eu deux alertes cardiaques. Ce parent, était sûr qu?il s?agissait d?un malaise du conducteur, et les choses en sont restées là.
- Pouvez-vous me dire, si le parent qui est intervenu auprès de vous, ne serait pas monsieur Balky ?
- Si, c?est cela. Monsieur Balky, qui était le beau frère de la personne décédée.
- Le véhicule a-t-il été expertisé ?
- Pourquoi ? puisqu?il s?agissait d?un malaise.
- Est-il encore temps de faire expertiser le véhicule ?
- C?est sans doute possible, il doit être dans un garage. Mais d?après toutes les questions que vous me posez, il semble que vous ayez un doute sur les circonstances de la mort de votre père.
- Un peu plus que des doutes?.
- Dans ces conditions, je vais reprendre cette affaire en main. Je n?avais pas apprécié que l?on m?empêche de faire procéder à une expertise d?abord, puis éventuellement j?aurais insisté pour qu?une autopsie soit effectuée, mais il semble que monsieur Balky possède des amis hauts placés, et particulièrement, je crois, au parquet de Valence .
- C?est exact, et j?ai l?intime conviction que l?accident de mon père a été provoqué.
- L?intime conviction, c?est bien, mais sans preuve??..
- C?est pourquoi je vous serais reconnaissant de faire examiner la voiture de mon père, puis, si nos soupçons se confirment, j?aimerais que vous interveniez pour demander une exhumation et une autopsie.
Lorsque les deux jeunes gens sortirent de la gendarmerie, ils étaient persuadés que le commandant de la brigade avait, lui aussi, trouvé curieux cet accident, et qu?il allait reprendre consciencieusement le dossier
Trois jours plus tard, la gendarmerie prévenait Yves que l?expert automobile avait détecté deux sabotages. Pour plus de sécurité, les assassins avaient scié la colonne de direction et les freins. Bien sûr, une enquête était ouverte, et Yves pouvait déposer une plainte contre X. Ce qu?il fit, dès le lendemain.
Il aurait été plus sage d?attendre la conclusion de l?enquête en cours, mais Yves ne pouvait rester inactif, et après de longues discussions avec Jacques, ils décidèrent d?aller ensemble chez Balky pour lui demander de leur communiquer la photocopie de l?acte par lequel, le survivant des deux associés recevrait les parts de l?autre.
C?est à la sortie du bureau de Jacques, qu?ils se rendirent à Grillon.
Ils sonnèrent au portail, et c?est Lise qui vint leur ouvrir. Stupéfaite de voir Yves, elle ne sut que dire :
- Toi ? Toi ? Mais?
- Oui, c?est moi, et ce n?est pas mon fantôme. Je suis encore vivant, désolé pour toi.
- Ne dis pas de bêtise. Je ne te veux pas de mal.
- Non, bien sûr. Tu m?as pris tout mon argent, tu es venue habiter chez mon vieil oncle, plus riche que moi, et peut être, es-tu sa complice ? Et autre chose encore ?
- Complice de quoi ? C?est vrai que je n?ai pas voulu couler avec toi, mais c?est tout. Il n?y a rien d?autre.
- Nous verrons. D?ailleurs, je m?en fiche ! Pour l?instant, nous allons entrer, et tu vas dire à Balky que nous voulons lui parler.
- C'est-à-dire?.Je ne sais pas s?il est ici.
- Mais bien sûr, qu?il est ici !!! Guide-nous vers le salon, et va le chercher !
Yves et Jacques s?installèrent dans un salon vaste et luxueux, sur des fauteuils confortables.
Ils n?eurent pas à attendre. Ils virent arriver un Balky furieux et vociférant :
- Qui vous a autorisé à entrer chez moi, et à vous installer comme si vous étiez chez vous.
- Doucement, mon oncle. Tout d?abord, c?est mon ancienne compagne qui nous a fait entrer, et comme elle semble chez elle, ici, elle en avait le droit. Par ailleurs, j?ai tout lieu de croire qu?une grande part de ce qui se trouve ici, m?appartient en fait.
- Tu es devenu fou ma parole. Tu vas me faire le plaisir de déguerpir, toi et ton copain.
- Oh, alors ! Si c?est pour te faire plaisir, il en est encore moins question !! Maintenant tu vas m?écouter.
J?ai de fortes raisons de penser que l?accident de mon père n?en était pas un. C?était un attentat. Mais nous reviendrons plus tard sur ce point. Pour l?instant, je veux que tu me donnes la photocopie de l?acte que tu prétends avoir signé avec mon père, et aux termes duquel, il serait prévu que le survivant recevrait toutes les actions de l?autre.
- Je n?ai pas à te fournir quoique ce soit.
- Oh, mais si !! Je suis le seul héritier de mon père. Les actions qu?il détenait me reviennent automatiquement. Si tu prétends le contraire, tu dois le prouver. Donne-moi ce document.
- Tu n?as qu?à regarder dans les papiers de ton père. Le contrat avait été fait en double exemplaire.
- C'est-à-dire, que, très curieusement la villa a été incendiée, et le feu à pris dans son bureau, comme si précisément, ce sont ses papiers que l?on voulait détruire. Alors, finissons-en ! Moi, je prouve facilement que je suis son fils, et dois hériter de lui. Je veux les 50% des actions de la société, ou alors prouve-moi qu?il existe un autre élément.
Jacques, qui était resté muet jusqu?à ce moment, renchérit.
- Si vous êtes sûr de votre bon droit, pourquoi ne voulez- vous pas en apporter la preuve ? A moins que les choses ne soient pas aussi simples que vous ne le dites.
Balky resta de nouveau un moment silencieux. Il réfléchissait profondément et les nombreuses rides qui ressortaient sur son visage étaient du plus comique effet. Il était plissé comme un bull dog.
Il finit par dire.
- Soit. Je vais vous faire une photocopie du document et vous me débarrasserez aussitôt le plancher.
- C?est avec plaisir, qu?en possession du contrat, nous partirons, car votre compagnie n?a rien d?attrayant, et je plains mon ami Yves, d?avoir un tel oncle.
Balky sortit en haussant les épaules, et revint, quelques minutes plus tard avec la photocopie d?un document qu?Yves lut rapidement.
-Nous partons mon oncle. Mais malheureusement, nous sommes appelés à nous revoir.
- Ce sera inutile. Si tu as quelque chose à me dire, tu n?auras qu?à passer par Maître Jacquet, cela nous évitera de pénibles rencontres.
Yves et Jacques sortirent de la villa, et se dirigèrent vers la voiture de Jacques avec laquelle ils étaient venus. Jacques ouvrait la portière du conducteur, lorsqu?il aperçut Lise recroquevillée à l?arrière du véhicule, et, qui, l?index sur la bouche pour l?inciter au silence, lui murmura :
- Roulez, je veux vous parler !
La voiture démarra et au bout de deux ou trois cent mètres, Lise se redressa et leur demanda de prendre un chemin de terre conduisant à un bois truffier où ils pourraient discuter à l?abri des regards indiscrets.
Elle semblait avoir peur, ce qu?elle confirma implicitement. Elle commença par dire qu?elle ne pouvait s?attarder et qu?elle devait rentrer très vite chez Balky.
- Je sais, Yves, que j?ai des torts envers toi, mais je n?ai pas le temps de t?expliquer. C?est Balky qui m?a amenée à agir comme je l?ai fait, puis il m?a dit de venir habiter dans sa maison du Vaucluse. Je pensais qu?il n?était peut être pas d?une honnêteté à toute épreuve, mais je ne me doutais pas qu?il était aussi horrible. Non seulement, il est désagréable avec moi, mais il lui arrive?..de me battre.
Je ne peux pas t?apporter de preuve formelle, mais j?ai tout lieu de penser que l?accident de ton père, en fait a été provoqué. C?est un assassin, Yves ! Je vis chez un assassin, et je ne peux rien faire, car il m?a dit que si je partais de chez lui, il saurait me retrouver et me ferait payer au prix fort, ma désobéissance. Fais attention à toi, Yves, et vous aussi, monsieur. Maintenant qu?il vous connait il va vous faire surveiller.
J?ai voulu vous prévenir, mais je ne peux pas faire plus. Maintenant, repartez vite, et je rentrerai un peu plus tard, après être allée faire une course, pour avoir un alibi.
Pardon, Yves.
Lise descendit de la voiture, et regarda la voiture s?éloigner
Au cours du dîner, Jacques dit à Yves :
- Lise ne nous a apporté aucune preuve tangible, mais du moins, nous savons que nous sommes sur la bonne voie. Elle pense comme nous, que ton père n?a pas eu un simple accident. Je suis d?avis qu?il faudrait aller farfouiller du côté de la villa où il habitait. Cet incendie est survenu juste après « l?accident » de ton père. C?est curieux
J?ai la certitude que tout est lié, et qu?il fallait détruire des preuves que l?on aurait pu retrouver chez lui. Personnellement, je ne vais pas avoir le temps de faire une enquête, mais tu ferais bien d?aller voir les pompiers et les gendarmes qui sont intervenus sur cet incendie.
Yves, il faut le dire, n?avait pas récupéré de sa rencontre avec Lise. Certes, elle avait tenu à les prévenir que Balky était un homme douteux, mais à aucun moment elle n?avait laissé entendre qu?elle rendrait l?argent qu?elle avait volé, et il s?en ouvrit à Jacques.
Jacques lui dit qu?il avait été lui-même surpris qu?elle s?excuse, sans donner l?impression de vouloir réparer le préjudice qu?elle avait occasionné, en proposant de rendre l?argent volé, mais, ajouta Jacques, j?ai songé à une possibilité.
Elle a dit que tout avait été prévu par Balky. Ce n?est donc pas elle qui a décidé de vider tes comptes, et il est fort probable, que ton argent ne se trouve plus sur son compte, mais sur un compte de Balky. En tout état de cause, nous éclaircirons ce point plus tard. Il est relativement secondaire, à côté de l?assassinat de ton père et de la spoliation des actions de la société dont tu as été victime.
Il fut entendu qu?Yves allait se livrer à une enquête sur l?incendie de la villa de son père, et que Jacques lui prêterai un peu d?argent pour qu?il puisse poursuivre son enquête








CHAPITRE 4









Jacques avait prêté sa voiture à Yves, qui partit le lendemain de bonne heure. Ce retour sur Clermont- Ferrand, fut moins désagréable que l?aller. Il nécessitait moins d?efforts physiques, et surtout, grâce à la présence de Jacques dans son camp, une petite lueur d?espoir commençait à briller, alors que durant sa longue marche, il n?avait pas le plus petit espoir, auquel, il aurait pu s?accrocher.
Dès son arrivée à Clermont, Yves se présenta à la caserne des pompiers, et eut la chance de tomber presque immédiatement sur l?officier qui avait dirigé les opérations lors de l?incendie de la villa de son père.
- Nous avons cherché à savoir comment l?incendie a pu prendre, alors qu?il a débuté dans le salon, où il n?y avait aucun appareil susceptible de mettre le feu. Le chauffage, d?ailleurs arrêté, puisque la maison était vide, était un chauffage central, et comme, dans ces conditions, il ne restait qu?une seule explication : Un court circuit, nous avons conclu dans ce sens.
Comme Yves lui demandait s?il n?avait pu relever aucun indice pouvant faire penser à un incendie volontaire, l?officier hésita un moment.
- Il y a bien quelque chose qui m?avait semblé curieux, mais c?était insuffisant pour provoquer un tel incendie. J?ai trouvé à l?emplacement où se trouvait le bureau, un petit tas de cire de bougie fondue. Mais votre père pouvait avoir quelques bougies en prévision d?une panne électrique. Et il y en avait trop peu pour que cela puisse déclencher un tel brasier.
Yves proposa d?aller sur place pour voir ces traces de bougie fondue, et le pompier l?accompagna sur les lieux.
N?importe qui pouvait pénétrer dans la villa. Toutes les portes étaient entièrement brulées, les plafonds étaient effondrés, et les murs noirs de suie. En arrivant dans le bureau, le pompier alla droit vers le lieu où il avait vu de la bougie fondue, et poussa une exclamation.
- Regardez ! Quelqu?un est venu enlever les traces de bougie. On voit très bien que le coin a été raclé et il ne reste que quelques fines traces de bougie. Je commence à avoir des doutes sérieux. Nous avons sans doute classé trop tôt ce sinistre comme étant dû à un simple court circuit.
C?était peut être plus compliqué.
- J?en ai l?intime conviction répondit Yves. Souvenez-vous que mon père venait de décéder dans un accident de voiture, qui lui non plus, n?était sans doute pas un simple accident. Je vais me rendre à la gendarmerie pour savoir, si, de leur côté, ils ont remarqué quelque chose d?anormal.
Yves fut reçu par l?adjudant chef qui commandait la brigade de gendarmerie. Très coopératif, il ne cachât pas, que cet incendie lui avait paru bizarre, au début, mais il n?avait pu trouver un seul élément pouvant faire penser à un acte de malveillance. Les pompiers lui avaient bien parlé de ce petit tas de bougie fondue, mais il était difficile de penser qu?une bougie, aurait pu mettre le feu, et ce d?autant plus que cette bougie fondue était sur une partie du plancher qui n?avait pas brulé du tout. Par ailleurs, il avait rencontré sur les lieux, alors qu?il était arrivé très rapidement, avant même l?arrivée des pompiers, un homme qui habitait dans le coin, et m?assura que ce ne pouvait être qu?un incendie naturel.
- Et qui était cet homme ?
- Oh, c?est une personnalité au dessus de tout soupçon, monsieur Balky.
- Tiens, tiens ? Monsieur Balky était sur les lieux avant vous ?
- Oui, pourquoi ? Vous le connaissez ?
- Bien sûr ! C?était l?associé de mon père. Je suis surpris que vous n?ayez pas eu connaissance de ce fait.
- Il m?a dit qu?il avait des accointances avec de hauts fonctionnaires du ministère de l?intérieur, et que le locataire de la villa, était son beau frère décédé depuis peu.
Il me dit ensuite, que le locataire étant décédé, personne ne pouvait lui vouloir du mal. Ce qui était très logique.
- Il me semble, au contraire, que la concomitance entre le décès du locataire, et l?incendie de la maison, pourrait faire penser à un acte de malveillance, pour faire disparaitre des documents.
Le chef de la brigade de gendarmerie, ne pouvait abonder dans le sens d?Yves, sans reconnaitre sa responsabilité dans le classement hâtif de ce dossier. Mais comme c?était un homme honnête, il admit que les deux thèses pouvaient se défendre. Il s?engagea à reprendre l?enquête, et les deux hommes décidèrent de rester en contact, Yves n?ayant pas caché que de son côté il effectuait une enquête sur la disparition de son père.

Le soir, durant le repas, Yves fit à Jacques le compte rendu de la journée. Le problème le plus important restait les conditions de la mort du père d?Yves.
Le lendemain en tout début de matinée, la gendarmerie qui s?occupait de l?accident automobile, téléphona à Yves, pour lui préciser que l?autopsie avait été pratiquée. Il n?y avait aucun doute, le
décès du conducteur n?était pas dû à un problème cardiaque, mais aux blessures reçues au cours de l?accident.
La veille, ils avaient convoqué Balky, en lui demandant de venir avec les pièces prouvant les alertes cardiaques antérieures de Monsieur Mésange.
Balky leur avait répondu au téléphone, que n?étant pas médecin, il ne pouvait avoir aucune preuve, mais qu?il tenait ces renseignements de son associé lui-même, monsieur Mésange?..qui malheureusement n?était plus là pour confirmer ses dires.
Les gendarmes ne lui parlèrent pas de l?autopsie et des conclusions du médecin légiste.
Le commandant de Brigade dit à Yves que cette convocation était fixée au surlendemain et qu?il tiendrait Yves au courant des résultats de l?entrevue.
Jacques, qui semblait avoir fait sienne la cause d?Yves, fut très heureux de ces nouvelles, et estima que les choses se gâtaient sérieusement pour le sieur Balky. Il était désormais établi que monsieur Mesange n?avait pas été victime d?un accident, mais d?un attentat, et Balky, qui avait menti en ce qui concerne les attaques cardiaques de son beau-frère, était désormais en tête de liste comme suspect.
Jacques, parti à son bureau, Yves était en train de noter par écrit, tous les éléments de cette affaire, dans l?espoir qu?en écrivant, de nouvelles bizarreries pourraient apparaitre, lorsque le téléphone sonna.
La communication venait de l?hôpital d?Orange, où une infirmière lui dit que Madame Lise Boulanger avait été hospitalisée, et qu?elle le suppliait de venir la voir.
Yves ne put avoir beaucoup de détails sur la raison de l?hospitalisation de Lise. Il put simplement apprendre que ce n?était pas une maladie. Il indiqua qu?il se rendrait à l?hôpital le jour même dans l?après midi.
Il fut autorisé à voir la malade, mais la visite ne devait pas durer plus d?un quart d?heure. Quand il entra dans la chambre de Lise, à l?hôpital, Yves ne put retenir un geste de surprise. La pauvre Lise était dans un triste état. Son bras gauche était plâtré, mais surtout son visage, boursouflé offrait l?aspect d?une palette de peintre bien garnie. Du rose pâle au rouge carmin, du noir, du bleu, du jaune, du vert?.C?était impressionnant.
Lise avait bien aperçu le mouvement de recul d?Yves, et des larmes vinrent compléter l?apparence irréaliste de son visage.
Il s?assit au bord du lit, et ils restèrent silencieux pendant un long moment.
Puis, Yves demanda :
- Raconte !
En faisant voir de sa main valide ses lèvres tuméfiées, Lise murmura :
- Peux pas parler.
Après un nouveau silence, Yves proposa de poser des questions, auxquelles, elle pourrait répondre d?un simple signe.. Elle hocha la tête, et il commença
- Est-ce Balky qui t?a fait ça ?
Elle fit : oui.
- Est-ce que j?étais le sujet de vos disputes ?
La encore, elle répondit par l?affirmative, puis fit signe qu?elle voudrait écrire.
Yves sortit un carnet de sa poche, le feuilleta jusqu?à une page vierge, puis le posa sur un plateau qui était resté sur la table de service. Il lui mit un stylo dans sa main valide, et l?installa au mieux pour qu?elle puisse écrire.
Comme elle était droitière et que c?était la main gauche qui était valide, elle devait écrire lentement pour être lisible.
Lise venait juste de terminer d?écrire, lorsque l?infirmière vint lui dire qu?il ne pouvait rester d?avantage, au risque de fatiguer exagérément la blessée.
Yves reprit son carnet, déposa un très léger baiser sur le front d?Lise, et lui dit qu?il reviendrait le lendemain.
Ce n?est que lorsqu?il se retrouva assis dans sa voiture, qu?Yves sortit le carnet pour lire ce qu?avait écrit Lise.

B. m?a reproché de t?avoir vu. Il sait que j?ai des doutes au sujet de l?accident de ton père, et il est persuadé que je t?en ai parlé.
Il m?a dit qu?il allait me donner une première et dernière leçon, et qu?après, ce serait la mort. Il m?a battue comme un sauvage, puis est parti.
C?est le jeune homme qui vient de temps en temps jouer au tennis avec une amie qui m?a découverte. Je n?ai rien pu lui dire, mais sans hésiter, il m?a portée dans sa voiture et m?a conduite dans cet hôpital. J?espère que B. ne s?est pas vengé sur lui. Je suis punie pour ce que je t?ai fait. Pardon.

P.S. C?est B. qui a ton argent.

Yves resta un moment dans sa voiture à réfléchir. Son premier mouvement aurait été de retourner à Grillon, pour se rendre immédiatement chez Balky et lui casser la figure. Après réflexion, il se dit que tous les torts étant à la charge de Balky, il devait, lui, rester irréprochable pour pouvoir mieux l?écraser le moment venu.
Jamais peut être n?avait-il eu à faire un aussi violent effort sur lui-même, pour ne pas céder à sa première impulsion. Il avait une folle envie d?aller lui faire mal, très mal physiquement pour venger Lise.
Le mistral, ce jour là, soufflait avec une violence inouïe, et ce fils puissant d?Eole vint au secours d?Yves. Il avait tellement de mal à conserver en mains sa direction, que durant son retour sur Valréas, il n?eut plus le loisir de penser à autre chose qu?à sa propre sécurité.
Le soir, Yves raconta sa visite à Lise à Jacques, qui, malgré sa bonté foncière eut, lui aussi, très envie d?aller corriger ce sauvage Balky, mais, finit par tomber d?accord avec Yves. Mieux valait attendre les résultats de la convocation de Balky chez le gendarmes.





































CHAPITRE 5







Il était raisonnable d?attendre, mais ce fut très difficile pour Yves qui en dehors d?une visite à l?hôpital d?Orange, était contraint, dans l?oisiveté, de ressasser les éléments de son problème, sans tirer, de ses pensées, la moindre avancée.
Lise se rétablissait lentement mais ne pouvait pas encore parler facilement. Elle répondait en écrivant, mais se fatiguait vite et ils ne purent parler vraiment de leurs problèmes.
Il revint à Valréas et tourna en rond dans l?appartement de Jacques, jusqu?à ce que le téléphone sonne enfin.
C?était le chef de la brigade de gendarmerie qui enquêtait sur l?accident de monsieur Mésange.
Balky était bien venu à la convocation, mais l?affaire n?avait pu avancer d?un pouce. Lorsqu?il sut qu?à la suite de deux expertises, il avait été établi, d?une part, que le véhicule avait été saboté, et d?autre part, que monsieur Mésange n?avait pas eu de crise cardiaque, mais avait succombé à la suite des blessures subies au cours de l?accident, Balky, très calme avait dit sereinement que les faits étaient désormais très clairs, et qu?il appartenait maintenant aux enquêteurs de trouver le, ou les coupables.
De fait, il n?y avait à l?encontre de Balky que des présomptions, mais aucune preuve, et il était reparti libre et décontracté.
Lorsqu?il eut raccroché, Yves eut un moment de désespoir. Jamais, on ne pourrait prouver quoique ce soit à l?encontre de Balky. Mais ces instants de découragement ne durèrent pas. Yves n?était pas homme à se laisser abattre sans lutter jusqu?au bout. Il ne voyait pas les choses d?une façon très
claire, et décida de mettre par écrit tous les éléments qu?il connaissait, espérant que des rapprochements pourraient lui faire entrevoir un moyen pour confondre Balky.
Il prit un papier, et après réflexion, nota.
« J?ai l?intime conviction que Balky est responsable de 5 forfaits
1/ C?est lui ou quelqu?un mandaté par lui qui a saboté la voiture de mon père. Ma conviction vient du fait qu?il savait à l?avance que l?accident aurait lieu. Il avait prit des dispositions le jour de l?accident, et sans doute avant. Il en avait d?ailleurs parlé à Lise qui avait su, le jour de l?accident, que j?allais être licencié..
2/ C?est lui, ou quelqu?un mandaté par lui, qui a incendié la villa dans laquelle résidait mon père. Il se trouvait le premier sur les lieux, avant même les pompiers.
3/ C?est lui, avec l?aide du notaire qui a établi le document aux termes duquel, le survivant des deux associés devenait automatiquement propriétaire de toutes les actions de la société. Ma certitude vient de ce qu?il est le seul bénéficiaire de cette disposition.
4/ S?il existe vraiment un dossier de griefs à mon encontre, il ne peut qu?avoir été créé de faux éléments, inventés par Balky. Il faudra que je prenne un avocat pour l?assigner devant les Prud?hommes et qu?il soit obligé de fournir ce dossier de griefs.
5/ C?est lui, évidemment qui a battu Lise, et lui a occasionné de graves blessures. Là, nous tenons un élément certain. Il faudra que Lise dépose une plainte contre Balky, et que je m?occupe d?aller voir le jeune homme qui l?a conduite à l?hôpital pour l?inciter à témoigner en faveur de Lise. »

Après avoir écrit cette note, il la relut plusieurs fois, et ajouta.
« Pour déstabiliser Balky, et le pousser à faire des aveux, il faut partir sur les points les plus faciles à démontrer.
En premier lieu, je vais dès demain, demander à Lise si elle est d?accord pour déposer plainte. Si comme je l?espère, elle est d?accord, j?irai au commissariat, pour qu?un Inspecteur vienne à l?hôpital recueillir sa plainte.
Puis, j?irai voir ce jeune homme, pour lui demander de témoigner en faveur de Lise.
Si je mène à bien cette opération mon second travail sera d?attaquer la seule autre personne qui à ma connaissance est intervenue aux côtés de Balky : c?est le notaire qui est mêlé au contrat par lequel j?ai été dépouillé des parts de mon père ».
Après avoir fini d?écrire cette note, Yves se sentit plus léger. Il avait désormais un plan, et dès le lendemain il commencerait à le mettre à exécution.
Lorsque Jacques rentra de son travail, Yves lui parla de sa visite à Lise et lui fit lire la note qu?il avait rédigée.
- Ta note est parfaite, et je pense comme toi, qu?il faut commencer par saper le moral de Balky, en l?attaquant sur le terrain où il est le plus faible. Il n?y aura pas de grosses difficultés à le faire mettre en examen pour coups et blessures. Il faut absolument que Lise ait le courage de déposer plainte. Bien sûr, lorsqu?elle sortira de l?hôpital, ne pouvant retourner chez Balky, elle sera à la rue, mais je m?engage à régler son problème de logement. Si tu parviens à obtenir l?accord du jeune homme pour témoigner contre Balky, la partie sera gagnée.
- Je crois que du côté de Lise, ça ira, en revanche, j?ignore les liens qui existent entre le jeune homme, dont je ne connais même pas le nom, et Balky. Peut être sont ils parents ? En tous cas, ils doivent bien se connaitre puisque je l?ai vu venir jouer au tennis chez lui.
- Chaque chose en son temps. Va voir Lise, et incite là à déposer plainte.
- O.K. J?y vais dans l?après midi.

Yves à son arrivée dans la chambre de Lise, constata avec plaisir que les marques sur son visage s?estompaient, et elle l?accueillit pour la première fois avec un beau sourire.
- Si tu peux sourire, lui dit Yves, tu dois pouvoir parler ?
- Je commence, je commence?
- Alors, il faut que nous parlions de choses sérieuses. Tout d?abord, lis cette petite note que j?ai rédigée hier. Toutes les affaires sont résumées, puis nous parlerons de ton problème particulier.
Après avoir lu la note d?Yves, Lise lui dit qu?elle était parfaitement d?accord pour déposer une plainte, et comme il le proposait dans sa note, elle aimerait qu?il demande à un policier de venir à l?hôpital pour recueillir sa plainte. Quand au jeune homme, c?est un simple voisin de Balky, et elle ne pouvait préjuger de son acceptation de témoigner contre Balky. Cependant, ce garçon parait être un homme très droit, qui n?a pas hésité à la transporter lui-même à l?hôpital, et qui ne devrait pas refuser de dire, au moins, ce qu?il avait vu et fait.
Yves se sentit subitement soulagé et heureux. Certes, il avait bien espéré que Lise accepterait de déposer plainte contre Balky, mais il ne pouvait en être sûr, car après tout, d?une part, elle venait de vivre chez lui depuis de nombreux jours et d?autre part, elle allait courir des risques en attaquant de front, celui qui lui avait promis la mort, si elle tentait quelque chose contre lui. Il se promit donc de faire une démarche auprès de Balky pour le mettre en garde. Toute nouvelle agression contre Lise, lui serait immédiatement attribuée.
Le jeune homme qui avait amené Lise à l?hôpital s?appelait Jean Planet. Il habitait dans la villa au crépi ocre, juste à côté de celle de Balky, et Yves se promit d?aller le voir, le soir même.
Le fait que Lise accepte de déposer plainte, était le premier acte offensif d?Yves à l?encontre de Balky, et il était presque certain de parvenir à triompher de cet homme qui lui avait fait tant de mal..
Il alla au commissariat et revint à l?hôpital accompagné de deux inspecteurs qui enregistrèrent la plainte deLise. Yves demanda à être entendu, et il fut convoqué pour le lendemain matin à 9 heures au commissariat.
Au moment de quitter la chambre d?hôpital, Lise dit à Yves.
- Je sais avoir été très moche avec toi, et je t?ai occasionné un énorme préjudice. Je te jure, et crois moi, je tiendrai parole, de t?aider au maximum pour obtenir ta vengeance contre Balky. Je te demande encore pardon.
- Ton attitude m?a fait mal, c?est certain, mais, à ton tour, crois moi, ce n?était qu?une goutte d?eau en regard des griefs que je possède à l?encontre de Balky. Il a tué mon père. Uniquement pour satisfaire son ambition, il a minutieusement préparé l?assassinat d?un homme, et c?est là son forfait principal. Mais de plus, il m?a spolié de mon héritage, m?a mis à la porte de la société dont j?étais propriétaire à 50%, m?a dépouillé, car sans lui, tu n?aurais certainement pas eu l?idée de vider mes comptes. Enfin, il s?est lâchement attaqué à toi. Pour tout cela il paiera, maintenant, j?y crois vraiment.
En rentrant sur Valréas, Yves se sentait plus léger. Il conduisait en sifflotant. Le mistral, quoique fort encore, ne gênait pas la conduite, e


( Suite)
En rentrant sur Valréas, Yves se sentait plus léger. Il conduisait en sifflotant. Le mistral, quoique fort encore, ne gênait pas la conduite, et il goûtait la nature environnante, comme il n?avait jamais eu l?occasion de le faire. Devant lui, la Lance cette magnifique montagne bleu foncé se détachait sur le ciel bleu clair, et il arrêta son véhicule quelques kilomètres avant Visan, pour se sentir mieux intégré à la nature. Le mistral sifflait des mélodies dans les fils électriques. Très haut, les hirondelles et les martinets, tournaient dans le ciel, contribuant à créer la sérénité ambiante, Yves se sentait en paix, tout en sachant que le calme n?était que provisoire, la partie dans laquelle il était engagé ne faisant que commencer.
En remontant dans sa voiture, Il décida qu?à Richerenches, au lieu d?obliquer sur Valréas, il irait tout de suite à Grillon pour rencontrer Jean Planet.
Il dépassa largement la maison au crépi ocre, pour aller garer sa voiture en un endroit qui n?était pas visible de chez Balky. Si ce dernier l?avait vu, cela n?aurait pas été dramatique, mais il préférait être prudent, et agir, le plus possible à son insu.
Jean Planet était un jeune homme brun, d?aspect sympathique, au regard clair et direct.
D?emblée, ils se sentirent de la même race.
Il dit à Yves que jusqu?à ces derniers jours, il ne connaissait pas Balky sous son vrai jour. Ce dernier venait rarement à Grillon. Ils s?étaient rencontrés il y a deux ou trois ans, et Balky lui avait dit qu?il avait un court de tennis, et lui avait très gentiment proposé de venir y jouer, avec ses amis, quand il le désirerait. De plus, sous la véranda d?entrée, il y avait un bar, où il pourrait venir se rafraichir après les matchs.
Jean, l?avait donc trouvé sympathique et généreux, jusqu?au jour, où, après un match avec une jeune fille, cette dernière étant partie, il voulut aller se rafraichir sous la véranda. . C?est là qu?il entendit des gémissements, et après quelques secondes d?hésitation, il était entré dans la maison, pour trouver, affalée sur un fauteuil, Lise, ensanglantée, et à moitié inconsciente. Il la transporta à l?hôpital d?Orange, mais n?avait pas revu Balky depuis.
Yves lui appris, que Lise venait de déposer plainte, et lui demanda s?il accepterait de venir témoigner en sa faveur .
- Je vais être honnête avec vous, répondit Jean. Il ne me sera pas possible de témoigner en faveur de Lise à l?encontre de Balky, non pas parce que ce dernier m?a autorisé à venir sur son court de tennis, mais parce qu?en vérité, j?ignore totalement ce qui s?est passé. En revanche, je veux bien témoigner pour dire ce que je sais et que je viens de vous raconter.
- Ce sera bien suffisant, et je vous en remercie par avance.
Les deux jeunes gens se séparèrent après une cordiale poignée de mains, et Yves revint sur Valréas, où il raconta à Jacques les derniers développements de l?affaire.






















CHAPITRE 6






Jacques ne semblait pas gêné par la présence d?Yves chez lui, mais ce dernier estimait qu?il serait normal de ne plus vivre aux crochets de son ami.
Par ailleurs, Yves ne pouvait pour l?instant chercher une activité rémunératrice. Il tenait absolument à rester libre, pour, à tous moments, et sans entrave, pouvoir agir pour régler l?affaire Balky.
Pour concilier ces deux nécessités apparemment contradictoires, il y avait une solution, et une seule. Lorsque Lise l?avait quitté, c?est 54.000 euros qu?elle avait tirés des comptes d?Yves. Cet argent, n?était resté que peu de temps sur le compte de Lise qui avait du le remettre à Balky, c?est en tous cas ce qu?elle avait écrit en P.S. à la fin du mot qu?elle lui avait remis à l?hôpital, alors qu?elle ne pouvait pas parler du fait de ses blessures.
Il fallait qu?il récupère cet argent.
Il le fallait parce que cela lui permettrait de louer un petit appartement, dans lequel d?ailleurs, il pourrait accueillir Lise, à sa sortie de l?hôpital.
En premier lieu, Yves le lendemain, demanda à Lise ce qui s?était passé avec son argent, et elle lui répondit sans aucune réticence.
- Balky est venu me voir à plusieurs reprises. Il avait un dossier dans lequel plusieurs pièces prouvaient que tu avais commis diverses malversations avec des clients, et au détriment de la société de ton père et ton oncle.
Cela ne correspondait pas à ce que je savais de toi, mais, les documents étaient assez convaincants, et il est parvenu à me persuader de te donner une leçon en m?emparant de cet argent que tu aurais mal acquis.
C?est ce que j?ai fait, et je t?en demande encore pardon. Le lendemain, il me dit que personnellement, je n?avais pas besoin d?argent, puisque je pouvais aller vivre dans sa propriété du Vaucluse, et qu?il prenait en charge tous les frais. Il me dit qu?il fallait remettre la comptabilité d?aplomb, dans la société, pour que le père ne sache jamais les malversations commises par son fils, et je lui ai remis les 54.000 euros que j?avais tirés de tes comptes.
- Je crois utile de t?affirmer que le prétendu dossier de grief établi par Balky, n?est constitué que de faux. D?une part, je n?ai jamais fait l?objet de la moindre observation dans l?exercice de mes fonctions, ensuite, je n?ai pratiquement jamais eu affaire à Balky, et enfin, je n?avais pas à me mêler, de près ou de loin à la comptabilité. Je ne pouvais donc pas me livrer à des malversations.. Toute cette combinaison a été mise sur pied, par Balky, pour pouvoir me déposséder des actions de mon père et pour me licencier.
- Tu penses bien que si je t?en parle maintenant, c?est que j?ai la certitude que toutes les allégations de Balky étaient fausses.
- O.K. Merci. Maintenant, je veux récupérer mon argent, et pour cela, j?ai besoin de toi.
Balky ne m?a pas pris cet argent directement, c?est à toi qu?il l?a pris. Il va falloir que tu le lui réclames.
- Moi, je veux bien, mais crois-tu qu?il va me rendre l?argent, bien gentiment, simplement par ce que je vais le lui demander ?
- Non, bien sûr. Tu vas lui dire que tu as déposé plainte contre lui, pour coups et blessures. Tu lui diras, que s?il te rend l?argent, d?une part, tu retireras ta plainte et d?autre part, tu ne feras pas mention de son extorsion de fonds, que tu peux prouver en produisant le relevé de ton compte.
Il n?est pas idiot. Il sait très bien que même si tu retires ta plainte, l?enquête ayant été déclenchée, il passera quand même en correctionnelle, mais la plainte ayant été retirée, les tribunaux seront moins féroces dans leurs condamnations. Maintenant, je suis bien d?accord avec toi, il pourra ne pas fléchir et t?envoyer sur les roses, mais je serai avec toi quand tu lui parleras, et j?arriverai, je pense à le rendre plus?..soucieux de ses intérêts.
Lise finit par accepter de tenter le coup. En fait, elle se sentait tellement honteuse d?avoir vidé les comptes d?Yves, qu?elle ne pouvait pas lui refuser sa demande.
Elle devait sortir de l?hôpital le samedi suivant. Yves la rassura tout de suite. Elle ne serait pas à la rue. Jacques acceptait de l?héberger, le temps qu?une autre solution soit trouvée, et l?autre solution, c?était que l?argent d?Yves soit récupéré pour louer un appartement, dans lequel, ils pourraient habiter, elle et lui, en attendant des dispositions plus définitives.
Balky, dont les vacances étaient terminées, était retourné à Clermont Ferrant mais selon des voisins, il devait revenir à Grillon le week-end suivant. Yves décida d?aller le voir à l?impromptu avec Lise, le Dimanche matin de bonne heure.
En attendant, Yves sortit la photocopie de l?acte par lequel, son père et Balky, avaient décidé que le survivant garderait la totalité des actions.
Il lut, relut plusieurs fois ce document, mais ne put voir la trace d?une quelconque falsification. Il posa l?acte sur la table de sa chambre, et s?allongea sur son lit pour réfléchir.
Soudain, il se leva, se précipita sur le document, et examina attentivement, la signature de son père. Certes, le graphisme était parfait, pourtant, Yves poussa un cri de joie, qui fit que, quelques secondes plus tard, Jacques, inquiet, vint frapper à sa porte.
- Yves !! Que se passe-t-il ? Ca va ?
- Entre, entre Jacques ! Ca va très bien !
- Tu as trouvé quelque chose de nouveau ?
- Oui. J?en suis pratiquement certain.
Yves expliqua à Jacques que son père, depuis toujours, n?écrivait qu?avec un stylo à encre noire. Or, la photocopie le montre, le document a été signé en bleu, et un examen du document original permettra sans doute d?établir quelle a été effectuée avec un stylo à bille et non un stylo à encre. Il fallait donc absolument voir le document original.
Puis, Yves expliqua son intention d?aller voir Balky avec Lise Dimanche matin, pour tenter de récupérer son argent. Jacques proposa de les accompagner, ce qui ne fut pas jugé nécessaire par Yves.
Le lendemain, en dehors de sa visite à l?hôpital d?Orange, Yves fit une acquisition, puis consacra la totalité du reste de son temps à chercher et à visiter sur Valréas les petits appartements à louer.
Le moral sérieusement à la hausse, il était pratiquement certain de récupérer son argent. Il demanda à un agent immobilier de lui accorder une option de 8 jours sur un petit appartement qui avait l?avantage de comporter deux chambres. Yves tenait absolument à ce que Lise puisse avoir une chambre indépendante, malgré la vie commune qu?ils avaient menée durant plusieurs années. Il pensait, et il supposait que Lise était dans la même disposition d?esprit, qu?un chapitre de leurs relations était clos, et que, sans insulter l?avenir, ils devaient repartir à zéro. Lise l?avait volé, abandonné, et elle, comme lui, ne pouvaient simplement tirer un trait sur cet épisode.
Yves et Jacques allèrent ensemble à l?hôpital d?Orange pour ramener Lise à Valréas. Dès la première fois, le contact entre Jacques et Lise avait été excellent, et durant le trajet, à plusieurs reprises elle se surprit à rire, ce qui ne lui était pas arrivé depuis longtemps.
Le soir, les trois jeunes gens dînèrent ensemble dans une ambiance agréable. Ce n?est qu?à la fin du repas que Lise, redevenant soudain sérieuse, avoua qu?elle avait très peur de l?entrevue qu?ils allaient avoir avec Balky. Elle reconnut même son espoir que ce dernier, contrairement à ce qu?il avait prévu, n?avait pu venir à Grillon.
- Malheureusement, Lise, lui dit Yves, j?ai téléphoné à Jean Planet, avant d?aller te chercher à Orange, et Balky est bien là. Mais cesse de te faire du mauvais sang. A nous, il ne peut rien arriver de mal, tandis que lui, oui, il aurait des raisons de craindre la journée de demain.
- Tu m?as demandé, Yves, de ne pas aller avec vous chez Balky, dit Jacques. Soit.
Mais je tiens absolument à aller à Grillon, et je resterai dans la voiture. S?il y avait un problème quelconque, vous pourrez m?appeler.
- Vous voyez bien qu?il y a des risques, releva Lise, puisque Jacques aussi est inquiet.
- Je ne suis pas inquiet, je suis prudent. Mais Yves a raison, Balky a beaucoup plus de raison de s?inquiéter que nous. A quelle heure partons-nous, Yves ?
- A 8 heures. Je sais que Balky n?est pas un lève-tôt. Nous risquons d?ailleurs de le trouver au lit, ce qui le mettra en position d?infériorité.
( A suivre)


CHAPITRE 7






Le lendemain, Yves connaissant les lieux, prit le volant, de façon à garer la voiture hors de vue de la maison de Balky, mais assez proche cependant pour que Jacques puisse intervenir si cela s?avérait nécessaire. « Ce qui n?arrivera pas » affirma Yves avec une belle assurance.
Yves dut sonner à plusieurs reprises, avant d?entendre venir quelqu?un, maugréant contre les fâcheux qui venaient le déranger si tôt.
Balky resta quelques secondes interdit en voyant Yves et Lise sur le pas de sa porte.
- C?est vous qui venez m?empoisonner à cette heure ? Fichez le camp, je ne veux pas vous voir !!
Balky voulut refermer sa porte, mais Yves la bloqua de son pied.
- C'est-à-dire, que nous, nous voulons absolument te voir, alors suis-nous !
Avec autorité Yves pénétra dans la maison, suivi par Lise, et ils se dirigèrent vers les fauteuils du salon qui communiquait avec l?entrée par une porte en arc de cercle.
- Pour la dernière fois, je vous demande de ficher le camp, dit Balky, qui machinalement les avait suivis.
- Pour la dernière fois, nous voulons te parler, tonton, et tu n?échapperas pas à une explication.
- Ne m?appelle pas tonton, c?est ridicule ! Et si vous ne partez pas immédiatement, répondit Balky, en se dirigeant vers le téléphone, je vais appeler la gendarmerie.
- Excellente idée ! mon bien cher tonton ! Je crois d?ailleurs qu?ils veulent te voir au sujet d?une plainte pour coups et blessures déposée contre toi.
- Tu es fou ? Qui donc a déposé une plainte contre moi ?
- C?est moi, intervint Lise. Vous n?allez pas nier que vous m?avez sauvagement battue ?
- Moi ? Prouve-le ! C?est ta parole contre la mienne. Et crois moi, je suis plus crédible qu?une petite bonne femme que j?ai recueillie par charité, alors qu?elle était à la rue. Tu ne pourras rien prouver, ma pauvre petite, et si tu cherches à m?occasionner des ennuis, tu vas t?en repentir. Je t?ai déjà mis en garde, et si tu n?en tiens pas compte, je ne reculerai devant rien pour te faire taire.
- Hou là là ! tonton ! Ma parole, tu la menace ?
- D?abord je t?ordonne de ne pas m?appeler tonton, pour te ficher de moi, ensuite, je vous ai assez vus, déguerpissez !
- Tu es un tonton têtu !!!!. J?ai dit qu?une explication était nécessaire, et elle n?a pas commencé.
Je tiens immédiatement à te dire que tu as tort de te sentir en sécurité. Il y a des témoins des voies de fait auxquelles tu t?es livrée sur Lise.
- Ce n?est pas vrai ! Personne ne m?a vu la battre ! Nous n?étions que tous les deux, il n?y avait personne d?autre, et comme je l?ai dit, c?est sa parole contre la mienne.
- Plus maintenant cria Yves qui se précipita vers la porte, l?ouvrit et appela Jacques.
Ce dernier avait du descendre de la voiture et se tenir tout près du portail, car il arriva presqu?immédiatement.
Yves plongea la main dans sa poche, y prit un objet qu?il lança à Jacques en lui précisant qu?il s?agissait d?un petit magnétophone, qu?il avait acheté la veille à Valréas. Puis, il revint dans le salon, dans lequel, statufié, Balky n?avait pas bougé.
- Bien. Voilà un problème réglé. Tu as avoué avoir battu Lise. Ton aveu, plus un témoignage, ta responsabilité est bien établie, pour cette histoire de coups et blessures.
Passons au second point. Tu as volé à Lise, 54.000 euros. Cela aussi, peut être facilement prouvé par les relevés de compte d?Lise.
- Crétin ! C?est elle qui t?a volé ton argent !
- Là n?est pas le problème. D?ailleurs, Lise n?a pas volé mon argent étant donné qu?elle avait légalement la signature sur mon compte. En revanche, toi, tu l?as obligée à te reverser les fonds, en prétextant que tu devais les remettre dans la comptabilité de la société, puisque, d?après toi, je m?étais livré à des malversations.
- Ce qui est exact. J?ai un dossier en béton, prouvant que tu as pioché dans la caisse.
- Ton dossier en béton, ce n?est que de l?air. Je prouverai facilement que ne m?étant jamais occupé de comptabilité je ne pouvais pas avoir commis une fraude quelconque.
Mais je ne suis pas venu pour énumérer toutes les charges que je possède contre toi. Ce serait trop long. Je suis venu avec Lise, pour, simplement, que tu lui rendes l?argent que tu lui as volé. Car tu ne l?as pas reversé dans la comptabilité de la société, n?est-ce pas ?
- Simplement hein ? Tu rêves ? Que je lui rende son argent ? Ou plus exactement, ton argent ? Je ne vois vraiment pas pourquoi je le ferais. Encore une fois, fichez le camp !
- Mais, mon petit tonton, tu es un homme intelligent. Réfléchis un peu. Il est établi que tu as battu Lise. Il est certain que tu vas passer en correctionnelle. Mais tu le sais, si Lise retire sa plainte, et ne se constitue pas partie civile, le tribunal sera moins sévère avec toi. Et c?est ce qu?elle fera, si tu lui rends son argent.
Balky réfléchit un moment, et le silence qui régna dans la pièce était impressionnant. Puis il finit par dire, que pour 54.000 euros, il pouvait prendre quelques risques, et que son renvoi devant le tribunal correctionnel n?était pas certain du tout. Il avait plus d?un tour dans son sac.
- Bien lui répondit Yves. Nous y reviendrons, mais passons à un autre problème. Mon père étant décédé, je suis son héritier, et je possède 50% des actions de la société.
- Ne dis pas n?importe quoi ! Tu sais bien que ton père et moi avons signé un contrat par lequel le survivant reprenait toutes les parts.
- C?est à toi de prouver l?existence de ce contrat.
- Décidemment, tu es encore plus bête que je ne le pensais. C?est cousu de fil blanc, ton truc ! Tu sais bien que ce contrat existe, puisque je t?en ai donné une photocopie.
- Je sais bien qu?il y a un contrat. Mais il est faux. Tu pourras dire le contraire, mais tu le sais parfaitement qu?il est faux, et je le prouverai facilement.
- Ah bon ? Et comment ?
- C?est très simple, et tu as commis une erreur monumentale. Mon père se servait exclusivement d?un stylo à encre noire. Est-il nécessaire que j?en dise plus ?
Balky marqua nettement le coup, et une fois encore, un silence impressionnant régna dans la pièce. Puis d?une voix faible, il demanda à Yves ce qu?il voulait exactement.
Yves qui depuis le début de l?entrevue était intérieurement tendu, tout en parvenant à le cacher derrière une allure désinvolte, sentit un calme bien agréable succéder à sa tension.
Il expliqua, que si Balky faisait sur le champ un chèque de 54.000euros au nom d?Lise (Il ne voulait pas qu?un chèque à son nom puisse donner à Balky la possibilité de prétendre qu?il lui avait été extorqué), et s?il lui remettait le pseudo contrat, Lise s?engagerait à retirer sa plainte, et à ne pas se porter partie civile à l?audience, quand à lui, Yves ne déposerait pas plainte pour faux en écriture.
Balky demanda la possibilité de réfléchir et proposa de se revoir dans l?après midi pour reprendre leur discussion.
- Il n?en est pas question, lui répondit Yves. Si nous sortons d?ici sans que Lise ait son chèque, je considérerai les pourparlers terminés, Lise maintiendra sa plainte, et j?en déposerai une à mon tour.
Balky avait demandé un délai, mais en fait sa décision de céder était déjà prise, car il se dirigea vers un secrétaire, ouvrit un tiroir avec une clé qu?il portait sur lui, sortit le contrat et l?examina longuement. Puis, secouant la tête il dit.
- C?est vrai. Mon erreur est impardonnable. Mais, je ne vais pas te donner ce contrat, dont tu pourrais te servir contre moi. Je le déchire donc. En ce qui concerne Lise, je vais lui signer un chèque, et lui faire confiance pour qu?elle retire sa plainte, et ne se porte pas partie civile contre moi, dans le cas où?.je serais inquiété.
- Je tiendrai cet engagement, monsieur Balky, parce qu?Yves me le demande, mais je ne vous le cache pas, je regrette de ne pas pouvoir vous faire payer tout ce que vous m?avez fait.
Il faut croire que Balky, qui, il y a quelques minutes était sûr de lui, était maintenant envahi par la peur, puisqu?il proposa aussitôt.
- Soit ! J?ai quelques torts. Je vais donc faire un chèque de 64.000 euros, au lieu de 54.000, pour te dédommager
Yves, qui décidemment se révélait très méfiant, lui dit.
- Non ! Tu vas faire deux chèques, tout les deux au nom de Lise. L?un de 54.000 euros, qui réglera notre affaire, et un autre de 10.000 euros qui réglera ton affaire avec Lise. Ce sera plus clair.
Balky établit les deux chèques, et les remit à Yves, qui après les avoir vérifiés attentivement, les donna à Lise.
- Bien. Voilà une partie de nos problèmes réglée. Mais j?ai encore à faire. Je considère donc que je suis en congé pour encore quinze jours, et je reviendrai à la société le 16 Septembre, pour décider de la nouvelle organisation. Nous nous reverrons, bien sûr, et je te ferai part de mes décisions.
- Tes décisions ? N?oublie pas que je possède 50% des actions, et cela, tu ne peux le contester. Alors, si tu crois que tu vas faire la pluie et le beau temps dans la société, tu fais une grave erreur.
- Mais mon cher petit tonton?.
- Arrête de m?appeler tonton !!
- Mon cher petit tonton (Tu es bien le frère de ma mère, non ?) les choses peuvent évoluer très vite. Regarde ! Depuis que nous sommes arrivés avec Lise, tu lui as rendu son argent, plus un dédommagement de 10.000 euros, et tu as détruit le contrat par lequel tu essayais de me voler mes parts. Alors, tu penses à tout ce qui pourrait arriver en quinze jours ! C?est long 15 jours ! Maintenant, nous allons te laisser.
Lise et Yves sortirent, et retrouvèrent Jacques dans la voiture, qui se rongeait les ongles d?impatience. A peine montée dans le véhicule, Lise éclata en sanglots. La tension nerveuse avait était trop violente, et elle craquait?..






CHAPITRE 8






Dès leur arrivée à Valréas chez Jacques, Lise, tint à faire immédiatement un chèque de 54.000 euros, à l?ordre d?Yves.
Après quoi, les trois jeunes gens écoutèrent le magnétophone et furent d?accord pour estimer que Balky était coincé et ne pourrait éviter une inculpation, pour coups et blessures sur Lise.
Le dîner se déroula dans une ambiance joyeuse. Yves avait un petit capital devant lui, il avait, la quasi certitude de prendre la direction de la société de son père. Lise était soulagée de savoir que son indélicatesse était réparée, et qu?Yves ne lui en tenait pas trop rigueur. Enfin, Jacques était heureux de voir ses amis, libérés d?une grande partie de leurs soucis, et peut être avait-il une autre raison de se sentir particulièrement bien dans sa peau??
A la fin du repas, Yves devint sérieux pour remercier vivement Jacques pour tout ce qu?il avait fait pour lui, et pour annoncer son intention de repartir rapidement sur Clermont Ferrand. En effet, les deux autres affaires, l?accident de son père et l?incendie de sa maison ne pouvaient se régler à Valréas.
Il avait décidé de s?acheter le lendemain une voiture d?occasion, puis, de partir à Clermont Ferrand, pour chercher une location.
Il demanda à Lise ce qu?elle voulait faire. Elle pouvait soit, remonter à Clermont avec lui, soit avec son petit pécule prendre le petit appartement sur Valréas, pour lequel il avait demandé une option d?une semaine.
Avant qu?elle ne puisse répondre, Jacques proposa une troisième solution.
- Lise n?a pas une très grosse somme d?argent devant elle. Mieux vaudrait qu?elle la garde. Si elle le désire, elle peut garder la chambre qu?elle occupe actuellement, et plus tard, si elle trouve du travail dans la région, elle aurait un peu d?argent pour s?organiser autrement.
L?hésitation de Lise ne fut pas très longue. Après avoir remercié les deux hommes qui étaient parvenus à la sortir d?une situation plus que désagréable, elle accepta la proposition de Jacques, tout en s?engageant à ne pas « l?encombrer » trop longtemps.
Le lendemain, Yves trouva une voiture d?occasion qui semblait en bon état, et le surlendemain, il partait pour Clermont Ferrand.
Il s?arrêta à la brigade de gendarmerie de Tain l?Hermitage, qui poursuivait l?enquête sur l?accident au cours duquel, son père avait été tué.
Le commandant de la Brigade lui dit qu?il n?avait rien de concret au sujet de l?accident de son père.
- Cependant, lui dit-il, je suis persuadé que le sabotage de la voiture de votre père, ne peut avoir été effectué que par un professionnel de l?automobile. Le trafic des freins et de la direction selon l?expert qui a vu le véhicule, était du travail bien fait.
Or, il y a dans un village voisin, une petit garagiste, Dumoulin, sur lequel j?ai l??il depuis longtemps, sans avoir pu encore le coincer. J?ai la certitude qu?il fait un trafic de cartes grises, et je le crois tout à fait capable, pour une petite somme d?argent, de saboter une voiture.
- Si vous le voulez, puisqu?il ne me connait pas, nous pourrions essayer de le coincer.
- Oui, mais comment ?
- Je ne sais pas. Je vais prendre une chambre en ville, et demain, je reviendrai vous voir. C?est bien le diable, si je ne parviens pas à trouver quelque chose pour le coincer.
Le lendemain, après une courte entrevue avec le chef de la Brigade de gendarmerie, Yves partit vers le village où était installé le garagiste suspecté de trafic de cartes grises.
Le garage était modeste, tant par sa surface que par son matériel. Il n?y avait pas de fosse, pas d?élévateur, un simple cric, et un traineau sur roulette pour se glisser sous les véhicules. Dans un coin, un tas de pneus usagers, et dans un autre, un tout petit bureau vitré.
Le garagiste n?était pas débordé. Il était dans son bureau, les jambes allongées, les pieds sur un vieux bureau, il lisait un journal.
Yves dut frapper sur la vitre pour attirer son attention, et c?est lentement, à regret, qu?il quitta sa position pour se lever et sortir de son bureau.
- Vous désirez ?
- Je voudrais?..C?est un peu spécial?voilà. J?ai acheté une voiture, hier à Valréas. C?était une très bonne affaire?. Mais le vendeur n?avait pas de carte grise, alors vous comprenez?.
- Non. Il ne faut pas acheter une automobile sans avoir de carte grise.
- Je sais bien, je sais bien, mais vous comprenez?.C?était vraiment une bonne affaire.
- Si vous vous faites arrêter par les gendarmes, ce ne sera plus une bonne affaire.
- Je sais, je sais?c?est pourquoi, je suis venu vous voir.
- Qui vous a dit de venir me voir ?
- Personne. Je remonte sur Clermont, et en passant devant votre garage, j?ai pensé que peut être??Comme garagiste, vous pourriez peut être me dépanner.
- Vous dépanner, vous dépanner?Je dépanne les autos, mais pas le défaut de papier.
- Ah, bon, je m?étais dit?Tant pis, excusez moi de vous avoir dérangé?Je vais essayer de me débrouiller autrement.
Yves repartait quand Dumoulin le rappela.
- Attendez, attendez. Vous allez repartir sur Clermont, et sans carte grise, vous risquez gros si vous êtes arrêté par les gendarmes.
- Je sais bien, et c?est pourquoi, à tout hasard, j?étais venu vous demander..
- Attendez. Je viens de penser à un truc. J?ai un client qui a une très vieille voiture qui ne roule pratiquement plus. Je pourrais peut être m?arranger avec lui, pour qu?il vous vende sa carte grise.
- Vous êtes chic ! Savez vous combien ça va me coûter, à peu près ?
- Je n?en sais rien. Je pense que je pourrai traiter à 1000 euros.
- A mille euros, je n?aurais finalement pas fait une si bonne affaire. Mais je n?ai pas le choix. Cependant, les plaques et les caractéristiques ne vont pas correspondre.
- Je vais essayer d?arranger ça. Je vais voir votre véhicule.
Dumoulin, vint voir la voiture d?Yves, releva l?immatriculation, les caractéristiques du véhicule, et demanda qu?il revienne le lendemain, à 10 heures avec 1000 euros en espèces.
Le soir, de sa chambre d?hôtel, Yves appela le chef de la brigade de gendarmerie.
(A suivre)



CHAPITRE 9







Le lendemain, à 10 heures, Yves arriva au garage. Il trouva Dumoulin dans ce qui devait être sa position favorite, à demi couché en arrière sur son fauteuil, et les pieds sur le bureau, il lisait le journal du jour.
Lorsqu?il vit arriver Yves, il quitta avec un visible regret sa confortable installation, pour sortir et venir au devant de son client.
- Vous avez les 1000 euros en espèces ?
- De mon côté, pas de problème. Avez vous pu obtenir une carte grise, et peut- elle passer pour l?authentique carte grise de mon véhicule ?
- Le vieux n?a pas voulu me vendre sa carte grise, mais je suis un homme de parole : Je vous avais promis une carte grise, la voici.
Yves reçut des mains de Dumoulin, une carte grise toute neuve, à son nom, avec toutes les indications correspondant aux caractéristiques de son véhicule.
- C?est formidable ! Comment avez-vous pu m?obtenir ce document qui est parfait et tout neuf ?
- Je vous l?ai dit : Quand je promets, je tiens. Vous avez les 1000 euros ?
Yves lui donna l?argent, et après avoir échangé quelques mots, Dumoulin retourna dans son bureau vitré pour poursuivre la lecture de son journal, pendant qu?Yves sortait du garage, et s?installait dans sa voiture.
Avant qu?il ne démarre, il vit deux gendarmes, dont le chef de la brigade se diriger vers lui.
Ils se serrèrent furtivement la main, puis à très haute voix, le gendarme dit :
- Veuillez sortir de votre véhicule, et me confier vos papiers, permis de conduire, carte grise, assurance.
Yves répondit qu?il était en règle et qu?il était pressé, ce qui amena le gendarme à hausser encore le ton pour intimer Yves d?obéir aux réquisitions qui avaient été faites.
Tout ce bruit attira Dumoulin à l?extérieur, mais lorsqu?il vit les gendarmes, il rentra dans son garage, comme si cette affaire ne le regardait pas.
Quelques secondes plus tard, les gendarmes entrèrent dans le garage, et dirent à Dumoulin que ce client avait dit être venu chez lui pour faire effectuer une réparation. De quelle réparation s?agissait-il ?
Dumoulin, après une légère hésitation dit que c?était un problème de carburateur.
- Faites moi voir la facture
- C'est-à-dire, que je n?ai pas fait de facture, ce n?était pas grand-chose.
- Il vous a peut être payé en espèces ?
- C?est ça, en espèces.
Lui faisant voir les mille euros qui étaient restés sur le bureau le gendarme lui dit.
- Bigre, pour une petite réparation, vous lui avez fait payer cher.
- C'est-à-dire, que j?ai du changer le carburateur, la réparation était très simple, c?est la pièce qui coûte cher.
- Je comprends. Parfait, parfait ! Venez ! on va voir le véhicule.
Malgré une évidente réticence, Dumoulin suivit les gendarmes et Yves vers le véhicule. Le chef demanda à Yves de soulever le capot, ce qu?il fit.
Se penchant sur le moteur, le chef fit remarquer que le carburateur, couvert d?une petite pellicule de graisse, n?avait visiblement pas été touché.
- Vous m?avez menti, monsieur Dumoulin, ce n?est pas beau. Puis se tournant vers Yves, il lui dit :
- Quand à vous, monsieur Mésange, votre carte grise me parait bien neuve, quand je vois qu?elle vous a été délivrée il y a un an et demi. C?est bien bizarre, tout cela. Je crois bien que vous avez fricoté tout les deux. Je me trompe ?
Jouant le rôle dont ils étaient convenus la veille, Yves prit un air très gêné pour expliquer.
- C'est-à-dire que j?avais perdu ma carte grise, j?étais très embêté de ne pas être en règle, et j?ai demandé, à monsieur Dumoulin s?il pouvait me dépanner, ce qu?il a fait avec beaucoup de gentillesse.
- De gentillesse ? C?est vous qui lui avez donné les 1000 euros ?
- C?est bien normal. Il a été si gentil.
- Vous me semblez être le gogo parfait, monsieur Mésange. Nous rediscuterons de tout cela.
Puis s?adressant à Dumoulin qui commençait à vociférer en prétendant qu?Yves était peut être un gogo, mais qu?à coup sûr, il était le roi des menteurs
- Assez ! Cria le chef. Ce dont je suis sûr, moi, c?est que vous, vous êtes un menteur. Vous avez prétendu avoir changé le carburateur, ce qui est faux. Or vous avez touché mille euros. Pourquoi ? C?est évidemment pour fournir une carte grise à monsieur Mésange.
Savez vous, Monsieur Dumoulin que votre ardoise commence a être bien garnie ? Hé oui ! Il y a cette histoire de trafic de cartes grises, mais j?ai la preuve incontestable que, par ailleurs, vous avez saboté une voiture, ce qui est encore plus grave. A moins que l?on vous ait forcé d?effectuer ce sabotage, ce que je suis enclin à croire.
Toujours en application du scénario prévu, Yves intervint.
- C?est le véhicule de mon père que vous avez saboté. Si vous reconnaissez par écrit que vous avez été menacé, pour scier des pièces de la voiture, en précisant le nom de la personne qui a proféré ces menaces, je pense que messieurs les gendarmes seront d?accord pour ne pas faire état de votre trafic de cartes grises, et comme votre casier judiciaire sera vierge, lorsque l?affaire de l?accident de voiture viendra devant le tribunal, vous vous en tirerez ave une peine légère. Après tout, c?est sous la menace, d?une arme, peut être que vous avez du effectuer ce sabotage.
- Mais je n?ai rien fait ! Qu?est ce que vous avez contre moi ?
- Plein de preuves, mon cher. Voilà ce que nous avons contre vous. Je vous offrais la possibilité de vous en sortir sans trop de dommage, parce que dans le coin, il n?y a pas beaucoup de garagistes, et il serait préférable que vous poursuiviez votre travail. Mais si vous préférez être condamné pour meurtre avec préméditation, c?est votre problème.
- Mais, je ne voulais pas ! C?est lui qui m?a forcé à le faire !
- Moi, je suis tout disposé à vous croire lui répondit le chef, mais il me faut un papier. Racontez- moi, ce qui s?est passé, Promettez moi de ne plus vous livrer au trafic des cartes grises, et je laisserai tomber ce chef d?accusation, ce qui rendra crédible votre version sur le sabotage, puisque vous n?aurez jamais commis d?infraction, et que votre casier judiciaire restera vierge.
Dumoulin n?hésita pas longtemps. Il se rendit dans son bureau pour écrire sa version concernant ses rapports avec Balky. Ce dernier l?aurait obligé à saboter le véhicule de monsieur Mésange père, sous la menace d?un pistolet, puis lui avait quand même, remis 500 euros en espèces, pour s?assurer de son silence.
Le chef de la brigade lut le papier, le passa à Yves, et ils estimèrent qu?il avait été correctement rédigé.
Soucieux de s?attirer les bonnes grâces de ces messieurs, et avant qu?ils ne les lui soient demandés, il restitua les 1000 euros à Yves.
Avant de partir, le chef dit à Dumoulin.
- Je garde la fausse carte grise. Je ne m?en servirai pas si vous cessez vos activités frauduleuses. Mais si vous repiquez au truc, j?aurais une preuve contre vous.
Les gendarmes et Yves partirent dans leurs véhicules, et purent voir que Dumoulin, devant son garage était comme statufié, les bras ballants. Il devait regretter amèrement d?avoir cédé aussi facilement devant les attaques conjointes des gendarmes et d?Yves.
Ces derniers s?arrêtèrent un peu plus loin, pour se féliciter du résultat obtenu et se dire au revoir, en s?engageant à se tenir mutuellement au courant.
Yves demanda et obtint que les gendarmes ne fassent rien pour l?instant vis-à-vis de Balky, car il voulait essayer de compléter le dossier à son encontre.
En roulant en direction de Clermont Ferrand, Yves aurait du être heureux de la tournure des évènements, et pourtant, il ne parvenait pas à se réjouir. Pourquoi ? Il n?arrivait pas à en dégager la raison.
En arrivant à Clermont, son premier soucis fut de trouver à se loger. Le pavillon de son père, avait été incendié, et rendu inhabitable, quand à l?appartement qu?il avait occupé avec Lise, il avait été reloué par les propriétaires. Il visita plusieurs Agences immobilières, et arrêta son choix sur un simple studio meublé, qu?il jugea suffisant pour une courte période. Son litige avec Balky restait la priorité absolue.
Il aurait pu aller le voir à la Société, mais estima qu?il fallait poursuivre son enquête en laissant Balky dans une illusoire sécurité.
Yves, avait eu une journée chargée, et il décida de faire quelques achats de nourriture et d?objets de première nécessité, de commencer à s?installer dans son studio, de dormir tôt et de reprendre son combat le lendemain.
Le lendemain, il avait pris la décision d?aller rendre visite au notaire de famille, Maitre Martin, dont le rôle avait été incontestablement trouble dans son éviction de la société.
- J?espère que votre période de déveine a pris fin, lui dit Maitre Martin, quand Yves pénétra dans son bureau.
- Ma situation n?est pas encore
entièrement rétablie, mais c?est en bonne voix, merci.
- Vous m?en voyez très heureux.
- Espérons que cela dure répondit Yves d?une façon sibylline, sans préciser pour qui.
- Après un long silence au cours duquel Maitre Martin se rendit bien compte que le ton d?Yves n?était pas très amical, c?est ce dernier qui reprit.
- J?ai obtenu le double du contrat que Balky aurait passé avec mon père.
- Pourquoi dites vous « aurait » ? Ce contrat existe bien.
- Je ne comprends pas qu?un homme averti comme vous, ait pu commettre une telle erreur.
- Je n?aime pas du tout le ton que vous adoptez depuis votre entrée dans mon bureau. Ma parole, vous semblez me menacer de je ne sais quoi ! Ne dépassez pas les limites, jeune homme !
- Ne vous énervez pas ! Vous savez parfaitement, que sans testament, je suis l?héritier de mon père.
- Vous savez, vous aussi qu?un contrat existe, par lequel Monsieur Balky et votre père avaient décidé qu?au décès de l?un d?eux, l?autre, héritait les parts de son associé. Vous le savez si bien, que, vous venez de me le dire, vous possédez la copie de ce contrat.
- Maitre, je vais être très direct. Vous aussi, vous savez parfaitement que ce contrat est un faux, et je suis persuadé que mon père a du faire un testament chez vous, car il faisait l?erreur d?avoir confiance en vous. Alors, vous me donnez ce testament, et je passe sur votre faux en écritures, ou bien, je dépose une plainte contre vous.
- Vous êtes fou ! Votre père est mort ab intestat, et le contrat avec monsieur Balky est entièrement valable.
- Vos expressions juridiques ne m?impressionnent pas. Ecoutez moi bien : Mon père n?utilisait jamais un stylo à bille, mais toujours un stylo à encre noire. Vous le saviez n?est-ce pas ? Vous avez commis une très lourde erreur qui va vous coûter très, très cher, si vous persistez à nier.
Changement à vue. Maitre Martin qui avait adopté, surtout au cours des dernières répliques, un ton hautain, s?effondra brusquement. Il essaya de nier les faits, mais d?une voix tellement faible, et déformée par la peur, que ses dénégations étaient autant de preuves de sa culpabilité.
- Vous me feriez pitié si votre acte n?avait pas été aussi grave. Mais je maintiens mon offre durant encore?.Quelques secondes. Donnez-moi le testament de mon père et je renoncerai à déposer une plainte contre vous.
- Mais je vous jure, commença le tabellion d?une voix mourante?
Yves se leva, se dirigea vers la porte, en disant :
- Vous avez fait votre choix.
Sentant que tout était perdu, Martin cria :
- Attendez, attendez, monsieur Mésange. Ne partez pas ! Je vais voir si monsieur votre père a déposé un testament en mon étude.
- Vous avez grand intérêt à ce qu?il en soit ainsi, car sans testament de mon père, je déposerai plainte.
- Mais il peut très bien avoir fait un testament chez un confrère?Ou ne pas en avoir fait du tout !
- En ce cas, vous seriez perdu, cher Maitre. Vous avez 30 secondes, pas une de plus, pour me fournir ce testament.
Définitivement battu, Maitre Martin se leva lourdement, se dirigea vers un coffre qu?il ouvrit avec une clé qu?il portait sur lui, prit un dossier et le tendit à Yves.
- C?est curieux. Le testament de mon père avait une place privilégiée, dans votre coffre personnel. Pourquoi ?
- Nous ne sommes plus que deux, vous et moi, à avoir connaissance de ce testament, depuis le décès de votre père, et comme ma confiance en monsieur Balky était un peu limitée, j?avais en ce testament, la garantie de sa loyauté.
- Ce mot de loyauté, dans votre bouche est, avouez-le, assez inattendu. En fait, je suppose que vous avez gardé le testament de mon père qui pourrait ruiner les espérances de Balky, s?il venait à vous trahir.
Yves ouvrit le dossier, constata que c?était bien l?écriture de son père, et sortit de l?étude, en disant :
- Vous êtes une canaille, mais je tiendrai parole, à moins, bien sûr que vous ne soyez de connivence avec Balky pour avoir provoqué « l?accident » de mon père.
- Provoqué ? Que voulez-vous dire ?
- Pour l?instant, je n?ai plus rien à vous dire.
Et Yves sortit cette fois du bureau pour se rendre à son studio, étudier le testament de son père.



CHAPITRE 10







La grande enveloppe remise par Maitre Martin, contenait une lettre adressée à Yves, et le testament proprement dit.
Il lut d?abord la lettre.
« Yves, mon fils chéri.
Je ne suis pas très expansif et je profite de cette lettre que tu ne liras que lorsque je ne serai plus de ce monde, pour te dire la profonde affection que je t?ai portée.
J?ai demandé à Maitre Martin, en qui j?ai une confiance pleine et entière, de te remettre cette enveloppe, et je vais t?expliquer pourquoi.
Je connais Balky depuis longtemps, et il y a 18 ans nous avons créé notre société, dans laquelle nous possédons chacun 50% du capital social. Notre apport de départ était identique, mais durant les premières années, désireux d?activer le développement de notre affaire, j?ai reversé le tiers de mon salaire dans la société. Balky, qui était au courant, bien sûr, me disait constamment qu?il était momentanément très juste, financièrement et se servait de ce prétexte pour ne rien mettre dans la société.
Je me suis donc arrêté de faire ces versements. Cependant, ma confiance en lui restait entière.
Aujourd?hui, je n?ai aucune preuve concrète que mes craintes sont fondées, mais j?ai de fortes raisons de penser que Balky n?est pas aussi correct et honnête que je ne le pensais.
Je te conseille de faire très attention, surtout durant les jours qui suivront ma disparition, car c?est à ce moment là que Balky pourrait, si mes craintes sont fondées, essayer de devenir majoritaire dans la société, et peut être même t?en exclure... Balky est trop futé pour te proposer de te racheter tout ou partie de mes actions. En revanche, il pourrait très bien, sous couvert d?une augmentation du capital, faire en sorte de devenir largement majoritaire.
Maitre Martin est parfaitement au courant de mes craintes, et c?est pourquoi je lui ai demandé de te remettre cette enveloppe, dès mon décès.
Reste sur tes gardes, je t?aime.
Papa

Yves pensa, que si son père avait eu l?intuition de la vraie nature de Balky, il s?était malheureusement trompé sur celle de Maitre Martin, qui avait du toucher une belle somme d?argent pour établir le faux contrat, et qui bien entendu, ne voulait surtout pas qu?Yves lise le testament.

Le testament était très court. Après les formules classiques, il laissait à Yves, d?une part, les 5000 actions qui représentaient la moitié du capital social de sa société, et d?autre part, un paquet d?actions diverses, pour un montant actuel d?environ 110.000 euros.
Yves resta un long moment dans son fauteuil à réfléchir.
Il avait toutes les cartes en mains pour confondre Balky, et si c?était nécessaire, Maitre Martin. De plus, il était désormais à l?abri du besoin.
Il devrait être à la fois soulagé et heureux. Pourtant, ce n?était pas le cas. Pourquoi ? Peut être parce qu?il était seul à connaitre ces bonnes nouvelles, aussi décida-il de passer un coup de fil à Jacques pour lui faire partager la fin, pratiquement de ses problèmes.
En apprenant tout ce que son ami Yves avait réalisé en un court laps de temps, Jacques, laissa éclater sa joie.
- Mais c?est merveilleux ! Tu étais complètement désargenté, tu es maintenant aisé, tu avais été licencié de la société de ton père, et tu as, maintenant la possibilité d?en devenir le seul patron. Nous en sommes vraiment très, très heureux.
- Nous ? Est-ce un pluriel de Majesté ? ou?..
- Non, pas un pluriel de majesté, tu me connais. Non. Je parlais aussi au nom de Lise, qui continue à culpabiliser pour le mal qu?elle t?a fait.
- Au fait, comment va-t-elle ?
- Bien. Très bien. Elle a trouvé un job dans une agence immobilière. Elle commencera lundi. Par ailleurs, il est possible qu?elle reste chez moi. Rien n?est encore décidé, mais c?est assez probable.
- Tu es en train de me dire que vous envisagez de vivre ensemble ?
- Je te l?ai dit : Rien n?est encore décidé. Je ne te le cache pas, j?ai immédiatement été attiré par elle, mais je pense qu?il faudra un peu de temps pour qu?elle voie claire en elle. Elle vient de traverser une période très agitée, et je ne veux en aucun cas profiter de sa faiblesse passagère, et de ce qu?elle a besoin d?être aidée par quelqu?un. Mais revenons à tes problèmes. Quel est ton plan d?action ?
- Il est très simple. Je me donne 24 heures de repos et de réflexion.

Après avoir raccroché, Yves savait pourquoi malgré les avancées significatives de ses enquêtes, il ne se sentait pas tellement heureux. Apprendre les sentiments de Jacques, à l?égard de Lise lui avait fait mal. Est-ce qu?il l?aimait toujours, ou est-ce simplement de la jalousie à la pensée que Jacques pourrait le remplacer dans la vie de Lise ? Il dut s?avouer qu?il n?y avait pas une très grande différence entre les deux cas, mais que pour l?instant, il fallait absolument faire abstraction de ses sentiments, pour se consacrer uniquement à sa lutte contre Balky.
Il avait dit qu?il allait réfléchir pendant 24 heures pour décider de ce qu?il allait faire. En fait, il n?avait pas besoin de ce délai, et savait parfaitement ce qu?il allait faire. Il n?était pas nécessaire de poursuivre son enquête sur l?incendie de la villa de son père. Il avait suffisamment d?éléments en main, pour porter l?estocade, et il décida d?aller à la société le surlendemain, pour avoir une explication définitive avec Balky.
Il était 20 heures lorsque l?on sonna à la porte d?Yves.
Avant d?ouvrir il regarda par l??illeton, et n?en crut pas ses yeux. C?était Balky.
Peut être, à l?instar des grands stratèges, estimait-il que la meilleure défense était l?attaque. En tous cas, il n?avait pas tardé à trouver la nouvelle adresse de son neveu.
Après une brève hésitation, ne voulant pas que Balky reparte avec la sensation qu?Yves avait eu peur de le voir, il ouvrit la porte et dit immédiatement
- Tiens ? Je pensais à toi justement, et je me régalais à l?avance de notre prochaine entrevue. Je suppose que tu étais pressé de savoir à quelle sauce j?allais t?accommoder.
- Désolé, tu es à côté de la plaque. Du fait de notre lien de parenté, je voulais te mettre en garde contre les bêtises que tu pourrais commettre. Je suis un homme puissant mon garçon, et je crains que tu ne t?en rendes pas bien compte.
- Ta puissance réelle ou supposée, ne pèsera pas lourd en face des faits, mon pauvre tonton.
- Arrête immédiatement de m?appeler tonton ! Et ne fais pas le malin. Tu parlais, je crois, de la toute puissance des faits ? Je me trompe ? Non ? Alors, je vais t?informer d?un fait important. Tu sais, ton ancienne petite amie ?
- Tu viens me dire que tu l?as encore battue ? Si c?est cela, tu le regretteras !
- Mais, non, ce n?est pas cela. Je n?ai jamais battu une femme. Je sais que tu crois le contraire, mais c?est une erreur. D?ailleurs, tu n?as plus aucune preuve.
J?avoue que ton enregistrement me gênait un peu. Alors j?ai un peu kidnappé ton ami Jacques, et j?ai promis à Lise de le libérer si elle me donnait la cassette. Elle est fidèle en amitié cette petite, et elle m?a remis ton petit magnétophone. Maintenant, tout est beaucoup mieux. Ils peuvent roucouler tous les deux (Au fait, tu n?es pas un peu jaloux ?) Et moi, je l?admets, je suis plus tranquille.
Yves ne sembla pas être affecté par cette nouvelle. Il était même si calme, que Balky se sentit très vite beaucoup moins tranquille.
- Je dois dire, mon neveu, que tu as du sang froid. Pourtant, la seule preuve que tu avais contre moi, concernant le fait que j?avais un peu bousculé ton amie Lise, tu ne l?as plus. Réalises-tu ce que cela signifie ?
- Ne restons pas dans l?entrée mon petit tonton. Tu n?es plus tout jeune, ni de corps ni d?esprit. Viens t?asseoir.
- Tu peux persifler. Tu as du cran. Mais d?une part, tu dois admettre que le problème se pose différemment, et d?autre part, je pense que nous n?avons plus rien à nous dire, tu sais que le magnétophone est en ma possession, et je vais te laisser.
- Si tu le désires, tu peux partir. Je ne te retiens pas. Je ne te dis qu?une chose : Des poursuites pour coups et blessures, ce n?est pas très grave par rapport à un meurtre avec préméditation. Enfin, c?est mon avis. Tu penses peut être différemment. Alors, au revoir.
- Si tu recommences le coup du magnétoscope, je te le dis tout de suite : C?est raté. Je n?ai pas tué ton père. Voilà. C?est enregistré ?
- Non, figure-toi. Je n?ai pas de magnétoscope. Mais tu es fichu. Tu ne veux vraiment pas rentrer, et discuter calmement, un verre de whisky à la main.
- Tu serais capable de m?empoisonner, c?est l?arme des faibles. Adieu. Et n?oublie pas que je suis plus fort que toi.
- Après tout, tu as raison. Si tu peux passer encore quelques heures tranquilles, comme je ne suis pas méchant, je ne vais pas te les gâcher.
Balky hésita un moment, mais son besoin de savoir était le plus fort.
- Bon. Puisque tu sembles pressé de me dire certaines choses, allons-y, je t?écoute.
Ils se dirigèrent vers des fauteuils, et s?installèrent sans dire un mot. C?est Balky qui craqua :
- Alors, ce Whisky. C?était une offre de Gascon ?
Yves se leva, prit dans le buffet une bouteille de whisky et deux verres, tendit l?un des deux à Balky, le servit, se servit lui-même, revint s?asseoir dans son fauteuil, toujours sans prononcer un mot.
Là encore, c?est Balky qui céda :
- Alors ? Je croyais que tu voulais me parler.
Laissant encore passer un moment, Yves, finit par dire.
- Je le reconnais, je l?avoue, je ne croyais pas que ce serait si dur.
Déjà triomphant, Balky répondit :
- Je te le disais. Contre moi, tu n?as aucune chance. C?est bien de t?en rendre compte. Maintenant, je vais te demander de me ficher la paix, et moi, je me contenterai de t?ignorer. D?accord ?
- Je crois que nous ne nous sommes pas compris. Quand j?ai dit que je ne savais pas que ce serait si dur, je voulais parler de la difficulté, pour moi, de boire un verre, avec l?assassin de mon père.
Manifestement, Balky encaissa le coup, mais il se reprit rapidement.
- Arrête de faire l?idiot ! Je n?ai pas tué ton père ! Les gendarmes m?ont dit que son véhicule avait été saboté, c?est possible, je n?en sais rien, mais ce qui est certain, c?est que je n?y suis pour rien. Ton père, était le frère de ma femme, c?était un ami d?enfance, notre entente était totale, pourquoi aurais-je voulu le supprimer ?
- Mais?.Tout simplement pour avoir toute la société à toi tout seul. Tu n?es pas très intelligent, tonton ! Tu as fait un faux contrat pour me gruger de toutes mes actions, tu m?as envoyé une lettre de licenciement, pour te débarrasser de moi, alors cesse de dire des bêtises, et de soutenir l?insoutenable.
- Si tu continues à prétendre que c?est moi qui ai trafiqué le véhicule de ton père, je te préviens : Je n?hésiterais pas à déposer une plainte en diffamation contre toi.
- Chiche ! Dépose une plainte, et moi, je ferais appel au témoignage de Dumoulin !
En entendant ce nom, une nouvelle fois Balky marqua le coup. Ces alternances de désarroi et d?espérance, finissaient par le déstabiliser. La peur commençait à prendre le dessus, c?était visible, malgré les efforts qu?il faisait pour n?en rien laisser paraitre.
- Je ne vois pas ce que ce Dumoulin pourrait venir raconter devant le tribunal !
- Mais il n?aurait même pas à se déplacer. Il a déjà dit, par écrit, ce que je voulais savoir.
- Tu lui as fait faire un faux témoignage ?
- Ne juge pas les autres, à ton aune. Enfin, si cela t?arrange de le penser, et si cela te permet de mieux dormir les nuits prochaines, après tout, cela ne me dérange pas. Mais il vaudrait mieux que tu regardes les choses en face : Tu es cuit, mon oncle.
J?ai toutes les cartes en mains, et je peux me payer le luxe de te poursuivre pour un, deux trois ou même quatre chefs d?accusation, selon mon bon vouloir. A ce sujet, je n?ai pas encore pris de décision. Demain, nous nous rencontrerons à la société, et je te ferai part de mes décisions.
- A mon tour de te dire : Pense ce que tu voudras, si cela te fais plaisir. Mais n?oublie pas que tu as été licencié, tu n?es plus rien dans la société, de plus, je suis toujours propriétaire de 50% des parts, et sur ce point, tu ne pourras rien faire.
En se levant pour signifier à Balky que l?entrevue était terminée, Yves lui dit qu?il serait à la Société le lendemain à 10 heures, et que, s?il n?était pas trop aveuglé par la colère, s?il conservait un peu le sens de ses intérêts, il ferait bien d?être à ce rendez vous..
Le dos courbé, Balky sortit sans prononcer un mot.
















CHAPITRE 11






Quatre jours plus tard, un jeune couple, accompagné d?une trentaine de personnes de la Société Mésange Balky, suivaient un convoi funèbre.
Le lendemain de l?entrevue entre Yves et Balky, les deux hommes s?étaient retrouvés comme prévu, à 10 heures, dans le bureau de Balky. C?est Yves qui, le premier, prit la parole.
- Comme je te l?ai dit, je pourrais déposer plusieurs plaintes contre toi. Tu as assassiné mon père, en faisant trafiquer son véhicule, Tu as établi un faux contrat pour me spolier de mes parts de société, Tu as été l?instigateur du vol de toutes mes économies, Tu as incendié, ou fait incendier la villa de mon père. De quoi, à coup sûr te faire condamner à la perpétuité.
Tu as peut être, une chance de n?être condamné à la prison que pour un temps limité. Cette chance, je vais te la donner.
Je ne déposerais une plainte contre toi, que pour l?assassinat de mon père. Si tu as un bon avocat, tu pourras t?en tirer avec 15 ou 20 ans de prison, et avec les remises de peine, tu pourrais sortir après une dizaine d?années.
Mais bien entendu, je ne te ferai bénéficier de ma mansuétude qu?à une condition : Tu vas me vendre pour 1 euro symbolique, chacune de tes 5.000 actions. Réfléchis à ma proposition.
Balky qui était très pâle en recevant Yves, devint tout rouge.
- Salaud !! Tu voudrais profiter de la situation pour me voler mes actions ! Il n?en est pas question ! Tu me déçois !
- Je te déçois ? Tu te fiches de moi ! Dis-donc, mon tonton qui de nous deux est la canaille ? Cette situation, qui l?a créée ? Toi, ou moi ?
- Ne te crois pas en si bonne position ! Tu ne peux absolument rien prouver contre moi. Rien.
Tu m?accuses d?avoir saboté la voiture de ton père. C?est faux. Quand à ton pseudo témoin, il n?est pas fiable, et en tout état de cause, c?est lui, et pas moi, qui aurait bricolé le véhicule.
Tu me parles d?un contrat. Qui l?a établi ? C?est Maitre Martin, et l?idée n?était pas de moi.
Tu m?accuses de t?avoir volé ton argent. C?est faux. Il sera facile de prouver que la personne qui a retiré cet argent de tes comptes, ce n?est pas moi, mais ta copine Lise
Quand à l?incendie de la villa ton père, je n?y suis pour rien. Et d?ailleurs, si tu avais la moindre preuve à ce sujet, tu m?en aurais déjà parlé.
Alors, fais ce que tu veux : dépose deux ; trois quatre, cinq plaintes contre moi, si tu le veux. Ca m?arrangerait. Les juges constateront que tu t?acharnes contre moi, et je te poursuivais pour procédure abusive, en demandant des dommages- intérêts
Et ils comprendront pourquoi. Tu veux devenir l?unique détenteur des actions de notre société. On pourrait même penser que c?est toi qui a fait saboter le véhicule de ton père.
- Si je comprends bien, tu as pris la décision de jouer à la roulette russe. A cette différence près, que dans ton système, il y a des balles dans tout le barillet. Ce serait donc un véritable suicide. Mais après tout, tu es libre de choisir ton sort.
- Je n?ai absolument pas l?intention de me suicider, et si tu persistes à vouloir me poursuivre, j?en sortirai la tête haute, mon honneur ne sera pas écorné, en revanche, toi, tu ne t?en sortiras pas du tout.
- Tu es un pauvre type, mon pauvre tonton, lui répondit Yves narquois. La méthode Coué, est ton seul recours.
- Oh que non, cria Balky en sortant un pistolet.
Tu reconnais ce pistolet ? C?est le tien. Et c?est facile à prouver, puisque tu as une autorisation de port d?armes et ce pistolet est enregistré à ton nom. A mon tour de te poser mes conditions.
Tu vas immédiatement me faire une longue confession dont je te donne les grandes lignes/
Tu vas reconnaitre que souffrant de n?être qu?un subalterne dans la société de ton père, tu as décidé de posséder les actions de ton père. Pour cela tu n?avais qu?une solution : En hériter.
Tu as donc toi-même saboté son véhicule, et comme ce sabotage risquait d?être découvert durant l?enquête, tu avais décidé de m?en faire porter la responsabilité. Pour cela, tu as rédigé un contrat par lequel ton père et moi, avons décidé que le survivant hériterait la totalité des actions.
Et surtout, ne te fais pas d?illusion. J?ai déchiré un exemplaire de ce contrat, mais maitre Martin, qui est entièrement de mon côté, possède l?original que tu n?as pas songé à lui demander.
Maitre Martin est près à déclarer que ce contrat lui a été apporté par toi, pour être conservé, soi disant à la demande de ton père. Il sera facile de prouver que c?était un faux?.Comme tu l?as si gentiment démontré. Tu es foutu, gamin !
Ivre de rage, Yves s?est précipité sur Balky qui a tiré, puis, d?une façon classique, à essuyé ses empreintes digitales, avant de mettre le pistolet dans la main du jeune homme.





POSTFACE

Balky était relativement tranquille. Il savait qu?au bénéfice du doute, il se sortirait assez bien de la mort d?Yves, qui pouvait passer pour un suicide à la suite de ses déboires sentimentaux et financiers.
Ce qui l?inquiétait un peu, c?est que rien n?avait été tenté à son encontre, en ce qui concerne le décès de Monsieur Mésange père. Cependant là encore, il estimait avoir des chances de s?en sortir. Comme il aimait à le dire : Il avait le bras long.

Il y avait un peu moins de deux mois qu?Yves était mort, lorsqu?une grenade lancée par la fenêtre ouverte de la chambre de Balky, le tuait net.
Malgré tous les efforts des enquêteurs, ils durent classer l?affaire, faute d?élément.
Le mois suivant, à la suite de plaintes déposées par deux de ses clients, Maitre Martin était condamné à 10 ans de prison pour faux en écriture, et bien entendu perdait son étude. C?est Jacques qui après une longue enquête était parvenu à trouver ces deux clients, grugés par le notaire, et qui n?avaient pas osés, seuls, déposer plainte pour malversations.
Le soir du jugement, Lise et Jacques dînaient ensemble.
- Nous avons poursuivi la vengeance de notre ami Yves. C?était notre mission sacrée et prioritaire. Balky a payé au juste prix, ses crimes abominables. Maintenant, nous avons le droit de penser à nous.
Lise convint que désormais, l?esprit tranquille, elle était prête à écouter ce qu?il avait à lui dire.
Mais elle le savait déjà.


FIN
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