Ecriture-Lecture




APRES LE DERNIER JOUR







PIERRE CHOCQUET












APRES LE DERNIER JOUR




Aux questions que l?Homme se pose depuis le début de l?humanité : Pourquoi sommes-nous sur terre ? Que devenons-nous après la mort ?
Ces questions, ont désormais des réponses.
Si vous voulez les connaitre aussi, lisez :
APRES LE DERNIER JOUR.
PREMIERE PARTIE



CHAPITRE 1


Lorsque l'on raconte, oralement ou par écrit, un événement que l'on a vécu, il est d'autant plus déformé, que le temps qui s'est écoulé depuis sa survenance est important.
Ce que je viens de vivre, est d'une telle intensité, tellement irréaliste, que j?éprouve le besoin d?en faire une relation immédiate .Les faits, d?une importance incommensurable, me font un devoir de ne pas les déformer, du fait d?une mémoire défaillante, ni de les enjoliver plus ou moins consciemment.
J?ai atterri sur l?aéroport de La Garenne, à Agen, il y a deux heures.
J?avais décollé de ce même aéroport, il y a deux jours.
Je sais. Ceux qui seront amenés à me lire, me diront qu?en deux jours, je n?ai pu avoir vécu ces longues aventures. Ils ont raison. C?est impossible. Pourtant, tout est frais dans ma mémoire, tout est vrai, et j?ai rapporté quelques preuves, dont je parlerai à la fin de mon récit.
Avant hier donc, je décollais de l?aérodrome d?Agen, à bord de mon avion personnel, un Beach kraft à turbopropulseur, dont je suis très fier.
Je partais sur Milan, où, l?un de mes camarades de la même promotion de HEC que moi, travaille dans une multinationale. Il m?avait invité pour deux ou trois jours, et comme mes congés débutaient, j?étais particulièrement heureux de commencer des vacances par un longue balade en avion..
La météo était excellente, et après avoir atteint mon altitude de croisière, j?ai mis mon pilote automatique, pour pouvoir lire un bouquin policier.
De temps en temps, je jetais un coup d??il sur mon tableau de bord, pour constater que tout était O.K, et je reprenais ma lecture.
Je volais à une altitude de 4.000mètres, et ma vitesse était d?environ 420 km/heure.
J?aime particulièrement cette sensation de liberté, d?indépendance, que l?on ressent quand, seul dans son avion, on vole très au dessus des autres humains, de leurs petites mesquineries, de leurs petites combines. Là haut, tout est pur, tout est beau, on se sent supérieur, et hors d?atteinte des gens désagréables.
Mon vol s?effectuait dans l?euphorie, et sans problème, dans un ciel serein.
Il n?y avait pas un nuage, le temps était magnifique, et il était environ midi, lorsque subitement, je me suis retrouvé dans le noir complet. Du moins était-ce la première impression ressentie, en passant d?un soleil éclatant à l?obscurité.
J?avais bien entendu lâché mon bouquin pour reprendre les commandes manuelles. Tous mes appareils de vol, donnaient des indications normales, et ce que j?avais pris pour la nuit, maintenant que mes yeux s?étaient habitués à l?obscurité, me semblait être un nuage bleu.
Le phénomène était curieux, car, peu avant, j?avais pu constater qu?il n?y avait pas le plus petit nuage à l?horizon. Et puis, il m?était déjà arrivé de traverser des nuages, mais je n?avais jamais vu cette couleur bleu foncé.
Je savais que je m?approchais des Alpes, mais, dans la direction que je suivais, mon altitude était suffisante, pour que je ne courre pas le risque de crash sur une montagne.
Je volais depuis un quart d?heure environ, sans visibilité, et je décidais de prendre un peu d?altitude, pour essayer de sortir de cet environnement un peu stressant.
C?est à ce moment, que je me rendis compte que tous mes appareils étaient bloqués. Tout m?avait semblé normal jusque là, parce que les appareils ne signalaient aucune anomalie, mais, alors que je prenais de l?altitude, et cela était indéniable, je le sentais au plancher qui montait, mon altimètre ne bougeait pas d?un millimètre. Je fus bien obligé de l?altimètre, l?horizon artificiel, le badin?Seul le manche à balai semblait répondre correctement.
J?ai voulu entrer en contact avec une tour de contrôle. Ma radio, non plus, ne marchait pas
Je risquais, en montant trop haut, de manquer d?oxygène, il fallait que je redescende un peu, mais sans altimètre, et à proximité des Alpes, je savais que les risques étaient grands. Se retrouver sans visibilité, avec tous les appareils bloqués, était une situation désagréable. Et c?est un euphémisme. Mes mains étaient moites, et mes pulsations augmentèrent rapidement.
Que faire ? Sinon continuer de voler en essayant de garder la même altitude, et espérer que ce drôle de brouillard finirait par se dissiper.
Mon réservoir d?essence était à moitié, mais comme cela faisait un bon moment qu?il était resté au même étiage, il était évident que la jauge, comme mes autres appareils, était bloquée elle aussi. J?ignorais donc à quel moment la panne d?essence allait survenir.
Machinalement je regardai ma montre. L?aiguille des secondes était immobile, preuve que ma montre elle aussi était arrêtée.

Jamais, jamais, je ne m?étais senti aussi inquiet et impuissant. Je ne pouvais rien faire dans ma carlingue. Prier à la rigueur. Mais je dois avouer, que si j?y pense maintenant, alors que j?écris tranquillement, chez moi, assis devant ma table, là haut, je n?y avais pas pensé.
Il m?a semblé un moment, que le brouillard était un peu moins dense. Réalité, ou simple volonté de forcer le destin, et de croire, malgré tout, à la possibilité d?une issue heureuse ?
Soudain, il n?y eut plus de place au doute. Je volais dans la clarté. Une clarté curieuse, mais une clarté qui était la bienvenue, et me permettait de voir que je volais très bas, à 3 ou 400 mètres du sol.
Curieux également ce sol. Mais, je ne cherchais plus à comprendre. J?avais maintenant un sol sous moi, sur lequel j?allais pouvoir atterrir sans dommage, et cela suffisait à me redonner le moral.
Je regardais autour de moi, et j?avais la sensation d?être à l?intérieur d?une boule gigantesque. L?horizon n?existait pas, mais plus je regardais loin, plus les parois s?élevaient, pour arriver à former une voute au dessus de moi. C?était tout à fait cela : j?étais à l?intérieur d?une gigantesque boule.
J?ai dit que le sol était également curieux. Pas de champ, pas de forêt, pas de route, ni de maison. Le sol était lisse et brillant, un peu comme s?il était constitué d?un immense tapis en plastique.
Par endroit, des petites barres noires étaient groupées, mais je ne pouvais ni voir, ni en deviner la nature.
Le moment de stupéfaction passé, je revins à des réalités plus urgentes. Je ne devais plus avoir beaucoup d?essence, et il était urgent que je me pose. Que je me pose, car je ne pouvais pas parler d?atterrissage sur ce sol bizarre, qui de toute évidence, ne ressemblait pas à la terre.
Il y avait de larges espaces, ne comportant pas de petites barres noires, et dans mon ignorance sur la nature, et le pourquoi de ces barres, je décidais qu?elles pouvaient être source de dangers et je résolus de me poser sur une partie qui en était démunie.
Je pilotais mon appareil sans aucune difficulté, exactement comme sur terre. Si j?utilise cette expression « comme sur terre », c?est que j?avais la certitude de ne plus être sur terre.
Cependant, l?air me portait normalement, et j?effectuais un « atterrissage » normal.
Mon moteur arrêté, je suis resté quelques instants, immobile dans ma carlingue, pour récupérer de mes émotions passées?.avant d?aller sans doute, au devant d?autres surprises.
J?ouvris mon cockpit. Je respirais tout à fait normalement. La température était douce, sans doute aux alentours des 22 à 25 degrés. La lumière était curieuse. Elle ne provenait pas d?un point précis comme chez nous, avec notre soleil. La lumière, plus tamisée, était uniforme. Il n?y avait pas de zone d?ombre. C?était un peu comme si chaque morceau de matière émettait sa propre luminosité.
En me penchant pour regarder le sol, je constatai, qu?il semblait bien être constitué d?une sorte de matière plastique, parfaitement lisse, sans aucune aspérité. Je vis, légèrement sur ma gauche à environ 1 kilomètre, l?une de ces barres noires qui m?avaient tracassé quand j?étais là haut. Je remis mon moteur en marche pour rouler lentement vers elle.
Arrivé à proximité, je descendis de mon appareil, et m?approchai d?un trou rectangulaire, qui
était noir parce que tout simplement les matériaux environnants n?émettaient pas de luminosité.
Ce qui m?avait frappé, dés que j?étais descendu de mon appareil, c?était que la pesanteur était très différente, notablement inférieure, à celle de la terre. Je marchais légèrement, sans aucun effort, si ce n?était un certain déséquilibre dû précisément au changement de pesanteur.
Je pensai aussitôt à Armstrong qui marchait sur la lune. Il s?agissait d?une prouesse admirée par le monde entier, mais mon cas était plus préoccupant que le sien, car, contrairement à lui, je ne savais pas, où je me retrouvais, par rapport à ma bonne Terre.
D?après mes connaissances, certes rudimentaires, sur la lune, il y avait je crois des cailloux, des creux et des bosses. Ici, tout était lisse. Pas de terre, pas de roche?..
J?étais parvenu tout au bord de ce trou, en me demandant ce que je devais faire, lorsqu?une voix me fit sursauter :
- Bienvenue ! Vous pouvez descendre.
Je ne vis personne, et comme je ne bougeais pas, car je ne pouvais voir la profondeur du trou et ne voulais pas sauter, malgré ma nouvelle légèreté, la voix reprit :
- Oh, excusez-moi, je vais vous mettre un escalier.
Aussitôt un escalier se présenta devant moi, et après un instant d?hésitation, je pris une grande bouffée d?air, qui lui au moins se respirait normalement, et commençais à descendre.
Si les parois de part et d?autre restaient sombres, l?escalier en revanche émettait de la lumière à cinq mètres devant moi, au fur et à mesure que j?avançais.
Après avoir descendu une dizaine de marches, je me suis retourné et j?ai constaté que derrière moi, l?escalier avait disparu et, que le chemin parcouru, était de nouveau dans l?ombre.
La voix, dont je ne saurais dire de quelle distance elle émettait, et qui s?exprimait dans un français normal, était incontestablement féminine. Elle me dit :
- Vous êtes un peu surpris, c?est bien normal, mais soyez sans crainte. Continuez à descendre.
Sans crainte, sans crainte?.Elle était drôle la voix !!! D?abord qui était-elle, et d?où venait elle ? Le mieux était de lui poser les questions. C?est ce que je fis.
- Je suis tout à côté de vous, mais vous ne pouvez pas me voir. Vos yeux de terrien ne sont pas faits pour nous voir. Quand à votre autre question, qui suis-je ? Je ne suis pas habilitée à vous répondre.
J?ai été chargée de vous accueillir, et de vous amener au Centre. Là, vous serez reçu par le Ralah

- Je suppose que si je vous demande qui est le Ralah vous ne me répondrez pas ?
- Mais si ! Il dirige le district.
Je n?étais pas plus avancé, mais je ne questionnai pas plus avant.
Je viens de m?apercevoir que je n?ai pas parlé de l?état d?esprit dans lequel je me trouvais. C?était tout simplement parce que je n?avais rien à en dire de spécial. Assez tendu lorsque j?étais là haut dans le nuage bleu, j?avais été soulagé de voir sous mon appareil une surface plane et dure, sur laquelle j?allais pouvoir me poser. Et puis, toutes les anomalies découvertes les unes après les autres, avaient excité ma curiosité, sans engendrer de crainte particulière.
Je ne me sentais pas en danger, et d?ailleurs « La Voix » qui s?était manifestée, d?une part, avait une consonance normale pour un terrien français, et d?autre part, s?adressait à moi avec calme et douceur. En fait, et je m?en étonnais moi-même, j?étais assez décontracté
Je pense que j?avais dû descendre 40 ou 50 marches, lorsque le sol est devenu plat.
Derrière moi, c?était l?obscurité totale, mais devant moi, une luminosité sur 5 ou 6 mètres me permettait d?avancer sans risquer de heurter un obstacle quelconque. D?ailleurs, depuis mon « atterrissage », je n?avais pas rencontré un seul objet faisant saillie. Sous mes pas, sur les parois que je longeais depuis que je m?étais engagé dans l?escalier, à part ce dernier, je n?avais vu que des surfaces planes.
Je continuais à marcher, sans savoir où j?allais, et sans poser de question, malgré la sensation que « La voix » ne devait pas être très loin de moi. J?en eus d?ailleurs la confirmation car elle se fit entendre à nouveau.
- Vous n?êtes pas très curieux pour un terrien.
- Vous trouvez ? Parce que vous connaissez des terriens ?
- Il ne m?appartient pas de tout vous expliquer, mais je puis vous dire que nous sommes tous d?anciens terriens.
- Quand étiez-vous sur terre ?
- Il n?y a pas très longtemps, je crois. J?ai quitté la terre en 1830. A quelle époque en êtes-vous là bas ?
- Nous sommes au XXIème siècle.
- Ah bon ! Je n?en avais aucune idée. Ici, nous n?avons pas la notion du temps.
- Si je comprends bien, vous avez vécu sur terre, et après votre mort, vous êtes venue ici ? Dois-je en conclure que je suis mort, moi aussi ?
- Non, c?est exceptionnel, mais vous n?êtes pas mort. Vous êtes le seul, ici, dans cette situation.
- Pourquoi moi ?
- Ah ! ça, je n?en sais rien. Peut être l?apprendrez-vous, mais moi, je l?ignore. Je vais vous quitter, vous êtes arrivé. Adieu












CHAPITRE 2



J?eus à ce moment-là, la sensation très nette que quelqu?un venait de partir et que je me retrouvais seul. Je me suis arrêté, et c?est une autre voix, mâle celle-ci, qui me dit :
- Ne soyez pas inquiet, vous n?êtes pas en danger.
- Je ne suis pas stressé, je suis curieux.
- C?est bien pour cela que nous vous avons choisi.
- Choisi ? Pour quoi faire ? Qui êtes-vous ? Où suis-je? Que faites-vous, ici ? Que me voulez-vous ?
- Vous ne m?auriez pas dit que vous étiez curieux, je l?aurais deviné. Un peu de patience !
Nous nous trouvions dans une pièce, entièrement vide, d?environ 5 mètres sur 5, et le plafond assez haut, de 4 mètres environ. Tout était constitué de la même matière, une sorte de plastique jaunâtre qui émettait une luminosité douce et homogène. J?étais seul avec la voix, et, je dois le dire, c?était désagréable de discuter avec une personne invisible. Je le dis très franchement à « La Voix » qui, gentiment me répondit qu?elle pouvait facilement me donner satisfaction.
Peu à peu devant moi, une forme humaine se dessina, et quelques secondes plus tard, je me trouvais en présence d?un homme d?une soixantaine d?années, vêtu d?une longue robe blanche, une toge. Il me sourit.et me demanda si c?était mieux comme cela.
C?était un homme, aux cheveux blancs, aux traits fins, mais dont le regard était absolument vide. Ce sont ces yeux sans expression qui provoquèrent en moi une sorte de malaise, ou plus exactement, la sensation que ce n?était pas vraiment un homme. Bien sûr, il en avait l?apparence, mais?..
Ses yeux sans expression ne signifiaient pas que cet être était amorphe et sans pensée. Il me le démontra immédiatement en me disant qu?il concevait ma surprise, et qu?elle était normale.
- Vous trouvez que j?ai l?apparence humaine, mais qu?il me manque quelque chose ? Vous avez raison, mais ne cherchez pas ! Ce qui me manque, c?est la chaleur de la vie. Ici, nous sommes incorporels, et je n?ai pris une apparence humaine que pour vous rassurer, vous mettre plus à l?aise. Tenez ! Voulez-vous que nous nous serrions la main ?
Comme il tendait le bras vers moi, je voulus saisir sa main, mais la mienne ne rencontra rien. Elle passait à travers la sienne qui n?avait pas de réalité tangible. C?était une expérience très désagréable
D?une voix très douce, il continua ses explications..
- Des milliards d?humains se sont posé cette question : Pourquoi sommes-nous sur terre ? Qui nous y a mis ? Et pourquoi ? Vous allez avoir, vous, le premier humain à venir jusqu?ici, des réponses à ces questions.
Mais ne croyez pas que nous sommes, ici, initiés à tous les secrets. Nous connaissons quelques réponses que nous nous étions posées quand nous étions sur terre, mais la part de mystère, pour nous aussi, reste énorme.
Il existe un Esprit Suprême dont tout émane. Sur ce point, les hommes, sur terre, voient juste. Qu?ils appellent cet Esprit Suprême, Dieu, Allah, Yahvé ou sous une autre dénomination, peu importe.
Cet Esprit Suprême n?est pas l?Univers lui-même, comme les Panthéistes le pensent. Il est extérieur à l?Univers, qu?il a créé.
Parmi ses créations, il y a l?homme, son chef d??uvre jusqu?à ce jour, qu?Il a posé sur la terre, et sur la terre uniquement. Il n?y a pas de vie en dehors de la terre, qui est le champ d?expérimentation de l?Esprit Suprême. Quand à l?humanité, c?est pour l?Esprit Suprême, une sorte de réservoir d?éléments qu?il élève pour obtenir des esprits qui sont nécessaires à sa pérennité.
Vous avez remarqué, que l?homme était capable d?inventer, de modifier ses conditions de vie, sa longévité etc.
L?Esprit Suprême a créé l?homme, être social, pour que, du frottement, des confrontations, de tous les esprits individuels, naissent des esprits toujours en progrès, toujours plus complexes, qui lui serviront de carburant pour ainsi dire, pour poursuivre sa tâche.
Si vous voulez un raccourci, je peux vous dire que les hommes dans leur globalité, mais aussi dans leurs singularités, participent à la permanence de l?Univers.
Je ne pus m?empêcher de l?interrompre.
- Si je comprends bien, les hommes sont un peu comme nos troupeaux de vaches que nous élevons pour nous nourrir, mais l?Esprit Suprême, élève les hommes pour en utiliser les esprits ?
- C?est à peu près ça
- Mais alors, pourquoi suis-je ici, puisque je suis encore un homme de corps et d?esprit.
- Votre promptitude à comprendre nous conforte dans l?idée que nous avons eu raison de vous choisir. C?est vrai qu?aucun homme vivant n?est venu sur cet astéroïde que nous appelons Krop, et vous n?êtes pas destiné à y rester.
Je vous ai dit, tout à l?heure, que L?Esprit Suprême, avait créé les hommes, et les avait posés sur la terre pour qu?ils y restent, se développent, et produisent des esprits de valeur. Mais la réussite, est sans doute trop parfaite, car les hommes dont les ambitions sont démesurées, désirent désormais s?évader de la terre, pour s?établir ailleurs. Ils sont déjà allés sur la lune et font des projets pour se rendre sur d?autres planètes du système solaire, et même, un peu plus tard, aller dans d?autres galaxies.
Cette évasion ne peut être tolérée. Vous êtes là, pour comprendre ce qu?aucun être humain ne sait encore, afin que de retour sur terre, vous puissiez témoigner de ce que vous avez vu, de ce que vous avez appris, et de ce qu?exige l?Esprit Suprême . Il vous faudra dire aux hommes, qu?ils peuvent poursuivre leurs recherches dans tous les domaines, mais que les tentatives pour aller se fixer sur d?autres planètes marqueraient la fin de l?humanité, d?une façon quasi certaine. Votre mission, est de les convaincre qu?il en va de leur survie.
J?espère que pour vous, les choses sont claires ?
- Théoriquement, je crois comprendre ce qui m?est demandé, Mais?.Car il y a des mais?. . Je ne vois pas pourquoi, toutes les recherches nous sont permises, sauf dans le domaine astronautique. Par ailleurs, je crois que vous faites une erreur, si vous croyez qu?un jeune homme seul, et qui ne représente rien, comme moi, pourrait parvenir à persuader toute l?humanité qu?en poursuivant ses recherches spatiales, sa fin serait inéluctable.
- Nous ne faisons aucune erreur. Songez que Jésus, simple fils de charpentier, a, il y a deux millénaires, apporté un enseignement qui est toujours valable sur terre. Même ceux qui se disent opposés à la religion qu?il a créée, les Athées, adoptent les principes de vie, qu?il avait préconisés. Il en sera de même pour vous.
Vous serez à votre tour, le Représentant de l?Esprit Suprême, vous aurez vos fervents adeptes, et nous espérons que la fin de votre vie terrestre, sera moins dramatique que celle de Jésus. Par ailleurs, vous saurez par avance où vous viendrez, lorsque votre heure arrivera. Nous vous accueillerons ici.
Tout ce que je venais d?apprendre me bouleversait. J?étais donc appelé à devenir un nouveau Messie qui apporterait la parole de l?Esprit Suprême ? Certes, ma mission sera beaucoup plus restreinte. Je n?aurais pas à enseigner à l?humanité entière, des modes de pensée et d?action, puisqu?il s?agira pour moi, uniquement, de dissuader les hommes de poursuivre leurs rêves d?aller se fixer sur une autre planète que la terre. Mais au fait, pourquoi les hommes devraient-ils rester prisonniers sur cette terre ? Je posais à nouveau la question à mon interlocuteur qui me répondit.

- Vous avez dit vous-même, que vous étiez, en définitive, comme les troupeaux de bovins que vous élevez pour votre consommation. Or, que faites-vous avec vos troupeaux ? Vous les parquez dans des limites précises, pour qu?ils ne se sauvent pas, et que d?autres ne puissent s?en emparer. Hé bien il s?agit du même problème. L?Esprit Suprême ne veut pas que certains esprits humains, partis sur d?autres planètes, soient capturés par une force antagoniste, créée elle aussi par l?Esprit Suprême, mais qui est entrée en rébellion. Mais c?est là un problème que vous ne connaitrez qu?un peu plus tard?.Un peu de patience.
Je vais maintenant vous dire deux mots sur l?organisation de votre séjour ici.
Vous êtes un homme de corps et d?esprit. Votre corps va donc avoir ses nécessités normales. Nous avons aménagé un appartement dans lequel vous pourrez vous reposer et vous nourrir. L?un des nôtres vous servira. A ce propos, je vais vous donner quelques indications.
Par exemple, vous parlez sur terre d?OVNI et ne savez qu?en penser. La plupart des cas, ne sont que des phénomènes naturels, que vous n?êtes pas capables d? interpréter, mais, dans certains cas, c?est nous, qui sommes amenés à venir inspecter notre « troupeau », pour reprendre votre expression.
Pour aller sur terre, nous utilisons des véhicules propulsés par des rayons cosmiques que vous n?avez pas encore découverts et qui permettent d?atteindre des vitesses, des milliers de fois supérieures à celle de la lumière. Lorsque vous vous êtes retrouvé dans un nuage bleu, il s?agissait de rayons cosmiques colorés, qui vous ont, en quelques unes de vos minutes, fait traverser plusieurs systèmes analogues au système solaire, pour vous amener ici.
Pour ces missions d?inspection, un esprit emprunte provisoirement un corps humain, afin qu?il puisse aller en tous lieux sans se faire remarquer.
C?est pour pouvoir vous nourrir, que nous avons envoyé sur terre, un esprit, lequel,, gardant sa forme humaine, même ici, vous préparera les repas avec les provisions ramenées.
Afin que vous ne soyez pas trop dépaysé, nous lui avons donné le nom d?Anna, et les repas seront identiques à ceux auxquels vous êtes habitué.
Voilà. Je vais vous quitter provisoirement. Nous aurons bien sûr l?occasion de nous rencontrer. Ici, nous ne portons pas de nom, mais, pour vous, afin de vous faciliter les choses, je m?appellerai François.
En quelques secondes, son corps s?estompa, cependant que tout à côté, une autre forme humaine se dessinait. C?était une jeune femme, qui contrairement à François, avait les yeux pétillants et rieurs.





CHAPITRE 3




Elle aussi, était habillée d?une longue toge blanche.
- Bonjour. Je suis Anna. J?ai été désignée pour être votre femme de ménage, votre gouvernante, votre professeur, votre guide, durant votre séjour chez nous.
J?étais française et je vivais au XVIIème siècle. Je suis venue ici, après avoir été renversée par un cheval emballé.
- Bonjour. Je m?appelle Pierre, mais vous devez le savoir. Pouvez-vous me dire si tous les esprits parlent le français ?
- Evidemment non. Nous n?avons pas à parler entre nous. Nous procédons par transmission de pensée, et les langues n?ont aucun intérêt. C?est parce qu?un Français a été choisi, pour cette mission capitale, que ce sont des Français (et moi en particulier) qui s?occuperont de vous. Il n?y aura donc pas la barrière des langues. Si vous le voulez, je vais vous conduire à votre appartement.
- Volontiers. Mais si vous le permettez, j?aurais une question à vous poser.
- Une seule, me dit-elle en riant ? J?en serais surprise. Mais je vous écoute.
- Vous êtes très différente de François. Votre regard en particulier, me semble normal, alors que celui de François?.. Existe-t-il une explication particulière ?
Sans un mot, elle me tendit la main, je la saisis?.et c?est moi qui fus saisi? de constater que, contrairement à celle de François, elle était faite de chair et de sang.
- Mais alors, vous êtes vivante ?
- Pendant votre séjour ici, je vais être en apparence et provisoirement un être humain normal, avec toutes les exigences requises par le corps. J?y suis un peu habituée, car, lors de mes missions sur terre, pour ne pas attirer l?attention des humains, je dois leur être totalement semblable. Je ne vous cache pas, que pour moi, c?est une corvée. Vous ne pouvez pas savoir encore, comme il est plus simple d?être un esprit, sans toutes les petites misères corporelles. Mais quand j?ai une mission, je dois la remplir. Je dois avouer que celle-ci, toute nouvelle, est moins désagréable pour moi, que les autres. D?abord cela se passe ici, alors que sur terre, je me trouve toujours un peu déphasée, et puis, je lis dans votre esprit, et vous trouve très sympathique.
- Merci. Mais il faut reconnaitre que vous avez un gros avantage sur moi. Je ne connais que votre apparence physique?.A propos, est-ce exactement celle que vous aviez sur terre ?
- Très exactement !
- Comme je regrette de ne pas avoir vécu au XVIIème siècle !
- Je vous ai dit que lorsque j?allais sur terre, je me sentais déphasée, mais, je dois le reconnaitre,?. Une chose ne change pas ; Le Français restera toujours le Français : galant, flatteur et beau parleur.
- Il n?y avait aucune flatterie dans mes propos. Vous êtes très jolie et comme le XVIIème siècle était un grand siècle, je regrette aussi de ne pas l?avoir connu. C?est donc très simple !
- Je ne me livrerai pas à une joute oratoire avec vous. Venez visiter votre appartement.
- XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
En fait, je n?ai pas eu à bouger. Une porte s?est matérialisée devant moi. Anna, à mes côtés, me dit d?entrer. Ce que je fis, pour me trouver directement dans une salle de séjour meublée exactement comme il y en a des millions sur terre. Un séjour avec coin- cuisine américaine attenant, une porte sur la droite donnait sur ma chambre et une autre tout à côté était la salle de bains avec toilettes.
C?était simple, fonctionnel, et je me laissai tomber dans un fauteuil, réalisant pour la première fois que j?étais épuisé. Anna s?en rendit immédiatement compte, et me dit qu?après toutes ces émotions et mes heures de veille, c?était tout à fait normal. Elle me conseilla d?aller me coucher. Elle saurait, immédiatement, le moment de mon réveil, et viendrait alors m?apporter un repas.
J?eus encore la force de lui poser une dernière question ;
- Puisque vous êtes humaine, en ce moment, avez-vous aussi un appartement ?
- Evidemment. Tout à côté du vôtre. A plus tard.
Elle sortit, et tout aussitôt, je me levai du fauteuil, entrai dans ma chambre, me déshabillai rapidement. Il y avait un pyjama sur le lit. Après l?avoir enfilé il ne s?écoula pas une minute avant que je ne sombre dans un sommeil profond.
Lorsque je me suis réveillé, par habitude, j?ai consulté ma montre, mais elle était tombée en panne en même temps que tous mes appareils de bord, et ne s?était pas remise en marche. D?ailleurs, le temps ici, n?avait, sans doute, aucune signification. Je la mis dans ma poche, bien décidé à ne plus la consulter, puis, je commençai à récapituler tout ce qui s?était passé depuis mon entrée dans le nuage bleu. Je me posais sincèrement la question de savoir si j?avais rêvé ou vécu mes conversations avec François et Anna.
Mon incertitude ne dura pas, car on frappa à la porte, et Anna me dit.
- Non, vous ne rêvez pas ! Vous vous êtes bien reposé, c?est parfait. Après votre toilette, vous pourrez venir prendre un repas dans le séjour. Bon appétit.
Je voulus ouvrir la porte pour lui poser d?autres questions. Il n?y avait personne, elle était repartie.
J?étais exactement comme sur terre. L?air que je respirais était le même, l?eau qui coulait de ma douche était normale, et le repas simple mais copieux qui m?était servi était on ne peut plus terrien. Escalope de veau, petits pois, salade, fromage et fruits. J?avais eu, en me réveillant, un léger mal de tête, et comme j?avais trouvé dans une armoire de la salle de bains des médicaments courants, j?avais avalé deux cachets d?Aspirine.
Mon repas terminé, je m?installai dans un fauteuil, et commençai vraiment à réfléchir calmement. Ce que je vivais était extraordinaire, mais finalement ne défiait pas la raison. Je crois avoir l?esprit assez rationnel, et rien ne m?avait particulièrement choqué dans ce que m?avaient dit, François et Anna.
Après tout, qu?il y ait à notre mort, une disjonction du corps et de l?esprit, n?avait rien d?absolument inattendu. Sauf pour moi, mais j?y reviendrai
Que la race humaine ait été créée pour que les esprits soient élevés afin d?être utilisés par un Etre Suprême, pourquoi pas ?
Qu?il existe des rayons cosmiques des milliers de fois plus rapides que la lumière, n?a rien d?impensable.
Qu?au lieu de vivre à la surface d?une boule, comme les Terriens, les esprits soient réunis à l?intérieur d?une sphère, n?a rien d?irrationnel.
Que les esprits n?aient besoin d?aucun élément matériel, est tout à fait possible, malgré ce que je pensais jusqu?à maintenant, et j?en reparlerai.
Une chose me semblait cependant inexplicable. Pourquoi moi ? Pourquoi avais-je été choisi pour remplir une mission, qui ne correspondait en rien à mes aptitudes, que je savais très limitées. Mon esprit, commun, bien comme les autres, butait sur ce problème.
A vrai dire, , des questions, il y en avait des myriades qui me venaient à l?esprit. Combien de temps allais-je rester ici ? Que veulent-ils m?apprendre ? Vont-ils me dire ce que je devrai faire, de retour sur terre ? Et comment vais-je y retourner? Où étions-nous exactement ? Si j?en croyais ce qu?avait dit François, j?aurais traversé plusieurs systèmes analogues au système solaire. Ce serait vertigineux. Pourquoi existe-t-il de l?air, analogue à celui de la terre, alors que les esprits, manifestement, n?en ont pas besoin ?
En fait le seul élément compréhensible pour moi, était la faible pesanteur. Je me trouvais sur, ou plutôt, à l?intérieur d?une planète dont la masse était sensiblement inférieure à celle de la terre. Donc l?attraction était moindre.
Je me sentais en pleine forme. Mon mal de tête avait disparu, et je résolus de partir à l?aventure. Je n?avais reçu aucune interdiction, alors, pourquoi pas ?
C?est en sortant de mon appartement que je me rendis compte d?une chose. Toutes les pièces de mon appartement, étaient éclairées par les murs qui dégageaient une luminosité. Ma chambre, elle, n?était éclairée que lorsque j?étais éveillé. Juste avant de m?endormir, et après mon réveil, j?avais inconsciemment constaté que je me trouvais dans l?obscurité. Décidément, il n?était pas désagréable de vivre
ici, on veillait sur votre confort, et ce doit être bien agréable d?y vivre. Quoique,?..quoique, j?ignore encore, ce que peuvent faire les esprits durant l?éternité, ce qui, pour mon petit esprit de terrien était bien désagréable. D?ailleurs, que de choses inconnues autour de moi !! J?aurai des milliers de questions à poser soit à François, soit à Anna?..Mais voudront-ils me répondre ?
Je fis quelques pas, et me retrouvai dans une sorte de couloir dont les parois n?émettaient une luminosité, que lors de mon passage, sur environ 5 mètres devant moi.
En dehors de ce phénomène curieux, il n?y avait rien à voir. Il n?y avait rien pour accrocher le regard. Pas un seul objet, même pas une saillie des parois. Il n?y avait vraiment rien à voir. Tout était uni, plat, ce vide finit par m?oppresser et m?incitait à revenir dans « mon » appartement. Je fis donc demi-tour.
Mais je ne savais plus où j?étais exactement. Je pensais avoir accompli à peu près le même trajet en revenant sur mes pas, et je ne voyais pas la porte de mon appartement. Je revins plusieurs fois en arrière, sans me retrouver. Il n?y avait aucun repère, et je commençais à paniquer, au point que je me suis surpris à dire à haute voix : « Mais où suis-je ? »
Aussitôt, Anna se matérialisa à mes côtés.
- Je ne voulais pas vous donner la désagréable impression d?être constamment à vos côtés pour vous surveiller, mais je vous vois un peu perdu. Ne craignez rien : je suis toujours là.
- Toujours ? Vous êtes toujours à mes côtés ?
- Bien sûr. C?est mon rôle !
- Mais alors, même lorsque, tout nu, je prends ma douche ? Car enfin, vous êtes une jeune femme?euh?.normale?.au moins en ce moment.
- Non me répondit-elle en riant. Je sais être discrète. Mais je ne suis jamais loin de vous. Quand à ma jeunesse, n?oubliez pas que je suis du XVIIème siècle, alors, ma jeunesse?.
- Ne jouons pas sur les mots. Vous êtes jeune et jolie. Pour ne rien vous cacher, j?aimerais assez que vous reveniez sur terre pour m?accompagner jusqu?à ma propre fin.
En reprenant forme humaine, ressentez vous les mêmes sentiments, les mêmes pulsions, que nous ?
- Vous êtes ici dans un but bien précis. S?il vous plait, n?en déviez pas !
- Savez vous que vous venez pratiquement de répondre à ma question ? Bon. Passons à autre chose. François et vous, m?avez dit que nous étions, en fait, un élevage, dont, seul l?esprit présente un intérêt pour l?Esprit Suprême. Alors, expliquez-moi, pourquoi élever des hommes avec un corps et un esprit ? Pourquoi le corps, si seul l?esprit vous intéresse ?
- La réponse est simple. L?esprit seul, évolue très lentement. Lorsqu?il est dans un corps, les souffrances qu?il subit, toutes les petites contingences matérielles, auxquelles il est astreint, font évoluer les esprits à grande vitesse. L?Esprit Suprême a doté les hommes de caractéristiques (que vous appelez défauts ou qualités) pour aiguiser vos esprits, et les faire évoluer dans de multiples directions.
La richesse d?un esprit humain est considérable, et je vais vous confier qu?il existe l?un de vos dictons qui explique le mieux la crainte de la mort qui vous habite.
- Je vous écoute ! Quel est ce dicton ?
- Hé bien, c?est le dicton, dont j?ignore l?origine selon lequel :
« Quand un homme meurt, c?est une bibliothèque qui disparait »
Or, cette richesse provient des circonstances matérielles, que les corps humains ont du traverser, et percevoir par l?intermédiaire de leurs sens.
C?est vrai que les humains sentent confusément que la mort est un effroyable gaspillage. Les humains pensent que toutes ces richesses, ces expériences et connaissances accumulées tout au long d?une vie, sont détruites. En fait, c?est une erreur. Toutes les expériences, toutes les épreuves qui jalonnent une vie humaine concourent à forger un esprit, à l?enrichir. Il devient complexe et présente un grand intérêt pour l?Esprit Suprême.
- - Vous venez de m?expliquer, en fait, que toutes les horreurs qu?il y a sur terre, les crimes, les guerres, sont nécessaires aux développements des esprits humains, et par voie de conséquence à l?Esprit Suprême. Mais alors, même si je raisonne avec un esprit humain, il faut bien avouer qu?il n?est pas très gentil l?Esprit Suprême.
- Même nous, nous n?avons pas tous les éléments en main pour en juger, alors, vous, les humains??. Sachez cependant, que les notions de bien et de mal, sont indispensables pour rendre vivable l?existence en société des hommes. C?est pourquoi, Messie, Prophètes et autres vous ont été envoyés pour vous enseigner ces notions. Mais il faut bien comprendre qu?elles ne sont valables qu?à votre échelle humaine. La bonté, la justice, sont des notions qui vous été inculquées pour vous permettre de vivre en société en limitant, dans le domaine du possible, les affrontements entre vous. Mais ces notions n?ont pas de valeur universelle.
- Au fond, si je comprends bien, on m?a fait venir ici pour me donner une leçon d?humilité, et le sens de la relativité.
- Absolument pas !! Que les hommes soient humbles ou vaniteux, peu importe à l?Esprit Suprême. Si vous êtes là, c?est pour vous confier une mission capitale. : Avertir les hommes, qu?ils ont été mis sur la Terre, pour y rester, et qu?ils ne doivent pas tenter de s?en échapper. L?Esprit Suprême le veut ainsi, et c?est l?intérêt des hommes eux-mêmes qui, en cas de désobéissance, risqueraient de se retrouver sous une tutelle qui leur apporterait des tourments et souffrances dont ils n?ont pas idée.
- Oui?.On en revient là : Cette fameuse mission ! Je me demande, comment, moi, toute petite unité d?un immense troupeau je vais pouvoir catéchiser la terre entière. Enfin ! Dis-je en plaisant, mon père n?est pas charpentier, il est médecin, alors peut être suis-je mieux placé?.
J?avais sorti cette plaisanterie, mais Anna ne la prit pas comme telle.
- La profession de votre père n?entre pas en ligne de compte. Vous aurez plus d?atouts que vous ne le pensez. En particulier, vous partirez avec des preuves de la réalité de ce que vous vivez en ce moment.
Pour l?instant, vous êtes fatigué, et il faut vous reposer. D?ailleurs moi aussi je sens la fatigue. Ce n?est pas drôle d?être réincarnée. Je vais me reposer également. A votre réveil, vous aurez un repas.
C?est vrai, que je me sentais très fatigué, et que j?avais sommeil. Pourtant j?avais l?impression que je venais de me réveiller, et que je n?avais eu aucune activité physique importante. Mais le temps, ici, n?a pas la même mesure que sur terre, quand à la fatigue, elle peut venir de toute autre chose que de l?exercice physique.





















CHAPITRE 4




Après un repos réparateur, dont j?avais eu grand besoin, Anna est venue frapper à ma porte, pour me préciser que mon repas était prêt, et cette fois-ci, au lieu de la laisser repartir, je lui ai demandé si elle voulait bien partager mon repas. A la suite d?une courte hésitation, elle accepta, et ma douche prise, nous nous sommes retrouvés attablés face à face. Je voyais qu?elle était très gênée, et elle finit par m?en donner elle-même la raison.
- Vous savez, je vivais au XVIIème siècle dans un milieu assez pauvre, et nous ne nous servions pas de couverts. Pour avoir vu depuis, des terriens au restaurant, je sais que vous vous servez tous, de fourchettes et de couteaux, alors que pour nous, il était plus facile et moins onéreux de nous servir de nos doigts,
- Faites comme vous en aviez l?habitude, lui dis-je, cela n?a pas d?importance à mes yeux.
C?est ce qu?elle fit, mais avec une telle habileté, que non seulement, ce n?était pas rebutant, mais plutôt gracieux, et je l?en félicitais.
Le repas terminé, elle me dit qu?une réunion d?esprits de classe « 1 » allait commencer. Bien sûr, je ne pourrais pas y participer car les échanges se faisaient par transmission de pensée, mais j?étais cependant autorisé à y assister.
Je ne voyais pas l?intérêt de la chose, puisque d?une part, les esprits étaient invisibles pour moi, et leurs échanges inaudibles. Mais bon ! C?était une expérience unique, et si on me demandait d?y assister c?est que j?avais peut être un enseignement à en tirer. Je pouvais toujours commencer par demander ce qu?étaient ces esprits de classe « 1 », et Anna voulut bien me répondre sans réticence.
- Nous avons ici 5 classes d?Esprits. En arrivant, les esprits des terriens, entrent évidemment dans la première classe. Vous avez remarqué sans doute que nous sommes à l?intérieur d?une boule gigantesque, qui tourne sur elle-même. Un tour sur elle-même de cette boule, s?appelle un stade, et c?est notre unité de temps. Chaque début de stade, les esprits se rassemblent par classe, et la réunion dure un demi-stade. Durant l?autre demi- stade, les échanges sont libres, et peuvent avoir lieu, théoriquement, entre des esprits de classes différentes. Je dis théoriquement, parce qu?un esprit de classe 3, par exemple, aurait du mal à suivre la pensée d?un esprit de classe 4.
- Et vous, Anna, dans quelle classe, vous trouvez vous ?
- Puisque je suis amenée à vous piloter, c?est que je suis de la classe 5.
- Voilà une évidence?. qui ne me semblait pas évidente !
- Mais si bien sûr. Vous allez être amené à enseigner au troupeau humain, qu?il lui est interdit de sortir des limites terrestres. Votre mission sera extrêmement importante, et l?esprit chargé de vous former et vous informer, ne pouvait être que de la classe 5.
- Donc, vous en êtes très fière ?
- Si j?étais redevenue entièrement une humaine, peut être en serais-je fière, mais au stade de l?esprit pur, ces sortes de sentiments n?ont plus cours.
- Puis-je savoir, qui vous a confié cette mission, autrement dit, existe-t-il un chef ?
- L?Esprit Suprême n?est pas parmi nous. Il faut que vous le sachiez : Nous ignorons beaucoup de choses. Toutes nos décisions sont prises par la classe 5, collectivement, après discussions, puis, c?est celui qui, pour vous, s?appelle François, qui assure les relations avec l?Esprit Suprême
- Une fois que vous êtes dans la classe 5, y restez-vous indéfiniment ?
- Il n?est pas indispensable que vous connaissiez la réponse à cette question pour remplir votre mission.
Il y avait donc des limites, au delà desquelles, j?étais en territoire interdit. On ne pouvait tout me dire. Mais après tout, il n?y avait rien d?anormal à cela. Je ne suis qu?un être humain, et l?on m?avait déjà initié à beaucoup de secrets.
Sans avoir fait un geste, je me suis trouvé en un lieu curieux. C?était une salle, sans meuble évidemment puisqu?il n?y a que mon appartement qui semblait en comporter. Je ne voyais personne, à l?exception d?Anna, tout en ayant la sensation de présences multiples autour de moi. De plus, l?air était sillonné de brefs traits de lumières multicolores.
- Je vais devancer votre question, me dit Anna, en souriant. Il y a autour de nous des millions d?esprits, et les éclairs lumineux que vous voyez sont des idées émises avec trop de véhémence par certains esprits.
- De quoi parlent-ils ?
- De vous, précisément. Et de moi. Il semble que je me suis montrée, et que je me montre, trop humaine avec vous.
- Demandez à celui qui vous attaque le plus violemment d?apparaitre, et je vais lui dire deux mots, dis-je en prenant un air déterminé.
Je n?avais pas fini ma phrase, qu?une forme humaine se dessina devant moi. C?était un homme encore jeune, blond avec des yeux bleus, qui me fixaient, sans expression, comme ceux de François. Anna m?expliqua qu?il ne parlait pas le Français, étant allemand, mais qu?elle capterait ses pensées et me les transmettrait.
« Il dit, qu?il n?a rien à vous reprocher à vous, et qu?il estime même qu?en vous désignant, le choix a été judicieux. Mais il me met en garde, moi, contre ma tendance, à la suite de mes nombreux voyages sur terre, à revenir presque entièrement à ma sensibilité humaine ».
- Ne lui traduisez pas ce que je vais vous dire, mais au fond, il craint que vous ne soyez amoureuse de moi, comme moi, et vous le savez, je le suis de vous.
- Je n?ai pas besoin de le lui traduire. Vos propos se sont inscrits dans mon esprit, et il a pu les lire. Il pense que vous avez vu juste, et comme des sentiments ne peuvent exister entre un esprit et un humain?..
- Alors vous pouvez lui répondre, qu?il a en partie tort, car je suis bel et bien amoureux de vous.
Avec un petit air triste, qui m?a fait penser qu?elle le regrettait, Anna me demanda de raisonner. Elle n?était pas complètement humaine, et allait redevenir pur esprit dès mon départ. Alors il valait mieux concentrer mes pensées sur tout ce qui allait constituer ma mission sur terre.
Je ne répondis pas à sa remarque, mais je dis à Anna mon désir de retourner dans ma chambre. Elle n?y voyait aucun inconvénient, car je n?avais rien à apprendre, dans cette réunion.
Arrivés « chez moi », j?invitais Anna à venir dans ma salle de séjour. Nous nous sommes installés dans deux fauteuils, et après un moment de silence, je lui dis :
- J?ai appris beaucoup de choses, qui en fin de compte sont assez compréhensibles pour un esprit humain. Il n?y a qu?une chose qui me chiffonne : J?avais, une quasi certitude, qui vient de voler en éclat.
- Pour une fois, me répondit Anna, c?est moi qui vais vous écouter.
- Voyez-vous, depuis très longtemps, les hommes ont estimé que matière et esprit étaient de natures différentes. En ce qui me concerne, j?étais persuadé, au contraire, qu?il n?y avait pas de différence de nature entre la matière et l?esprit, mais simplement des stades de développement différents.
J?avais la conviction, que tout était matière, et qu?il y avait trois stades d?évolution : Le domaine physique, le domaine physiologique généré par des combinaisons physico-chimiques, et le domaine psychique qui est la matière la plus complexe, la plus évoluée, la plus performante.
Ce qui me faisait penser que le psychique, donc l?esprit, était également de la matière, c?était qu?une lésion de la matière cervicale, entrainait des modifications des raisonnements, des sentiments, et des comportements. Ces relations concomitantes, entre des lésions de la matière, et des modifications de l?esprit, prouvaient, à mon avis, que matière et esprit ne faisaient qu?un.
J?étais donc, foncièrement, déterministe. Je ne croyais pas à la liberté, au libre arbitre. J?estimais que ceux qui croyaient, que les êtres humains, étaient dotés d?un libre arbitre leur permettant de choisir les décisions qu?ils prenaient, étaient dans l?erreur.
Nous n?avons pas conscience de tous nos éléments de déterminations, puisque dans ces derniers, il y a ceux qui ressortent du subconscient. En résumé, je pensais que l?on se croyait libre, parce que l?on ignorait les causes complexes de nos actions, alors que toutes nos actions sont déterminées par la totalité de nos éléments matériels complexes, et en grande partie inconnus de nous.

L?existence, ici, de purs esprits, sans support matériel, démontrent que j?étais dans l?erreur. Je suis donc un peu déphasé.
- Votre raisonnement n?était pas ridicule, mais ce sont vos conclusions qui étaient fausses.
C?est vrai qu?une lésion cérébrale, entraine chez les humains, des modifications du comportement, des facultés intellectuelles, des sentiments mais la matière cervicale n?est que le support de l?esprit. Ce support étant affecté, l?esprit est modifié.
Je vais vous donner un exemple. Vous avez une table, et un vase. Ce sont deux objets différents et indépendants, d?accord ? Posez le vase sur la table. Cette dernière deviendra le support du vase. Si, pour une raison quelconque, la table devient bancale, le vase va tomber, et peut être s?ébrécher. Vous ne pouvez soutenir que parce que la table et le vase ont subi des dommages concomitants, c?est qu?ils sont de même nature.
C?est pourtant ce que vous faites en disant qu?une atteinte physique du cerveau, s?accompagne de troubles caractériels et autres, et qu?en conséquence, ils sont de même nature. Convaincu ?
- J?ai en quelques heures, plus appris que durant toute ma vie. Merci, Anna, c?est beaucoup à vous que je le dois.
- Oh non ! Je ne suis que le moyen qui a été désigné pour faire ce que tout autre esprit aurait pu vous enseigner. Mais je vois que vos yeux se ferment. Vous avez sommeil, allez dormir un peu.
- Il est vrai que j?ai sommeil. C?est d?ailleurs curieux car j?ai l?impression que mes périodes de veille sont très courtes. Pourtant, sur terre, des expériences hors le temps ont été effectuées et il avait été démontré que le cycle normal d?activité chez l?homme était à peu près le double du cycle solaire.
- Gardez vous d?essayer de rechercher des comparaisons entre la terre et ici. Vous n?arriveriez qu?à de fausses conclusions.
Anna a pris congé, et je suis allé me coucher, pour m?endormir immédiatement, comme si j?avais eu durant ma période de veille, à effectuer des travaux harassants.

CHAPITRE 5






L?habitude avait été prise. Dès mon réveil, dont elle était avertie je ne sais comment, Anna venait frapper à ma porte, et nous prenions notre repas ensemble.
J?ai assisté, en comptant la première dont j?ai parlé, à cinq réunions d?esprits. Je ne voyais personne, je n?entendais pas les esprits communiquer entre eux, en revanche, Anna me faisait part des sujets de conversation. N?attendez pas que je vous en parle. Plus la catégorie d?esprit montait, moins je comprenais ne serait-ce que le sujet du débat. Les esprits de stade un et deux, devaient s?exprimer avec une certaine véhémence puisque des éclairs lumineux striaient l?espace dans lequel nous étions. Mais avec les plus évolués, à partir du troisième stade, les esprits, sans doute plus maitres d?eux, devaient échanger leurs idées avec plus de pondération, et pour moi, c?était comme s?il ne se passait rien.
Mon séjour se poursuivait, sans qu?aucune indication ne m?ait été donnée sur sa durée. A vrai dire, je n?étais pas pressé, et je savais parfaitement pourquoi. Mon attachement pour Anna grandissait de plus en plus, et ma crainte principale était que les Esprits dirigeants, mettent fin à cette période si agréable pour moi.
Depuis mon arrivée, je n?avais pas revu François. Un matin, après avoir frappé à ma porte, Anna me dit que nous serions trois durant notre repas, bien que le troisième convive ne puisse pas s?alimenter, puisqu?il s?agissait de François, qui cependant prendrait une forme humaine, pour ne pas me troubler durant nos échanges.
Après avoir pris ma douche et m?être habillé, j?ai retrouvé Anna, déjà attablée, et François debout, tel que je l?avais vu pour la première fois. En les voyant, côte à côte, je constatais la différence entre eux. François avait le regard mort, et il avait raison, quand il m?avait dit que par rapport à un humain, il lui manquait la chaleur de la vie. . Je ne pouvais mieux dire : C?était exactement cela.
J?avoue que je n?étais pas très heureux de le revoir, car, j?en été persuadé, cela signifiait que mon séjour touchait à sa fin.
Mais aucune de mes pensées ne pouvait lui échapper, car il me dit que mon séjour allait se poursuivre encore un peu et que le moment était venu de me fournir les preuves qui me permettraient d?être crédible auprès des terriens.
Impatient par tempérament, je lui demandai quelles sortes de preuves pourraient convaincre mes contemporains de la réalité de mon vertigineux voyage, et de la fiabilité des renseignements que je rapportais.
- François est là pour vous le dire, soyez un peu patient, me dit Anna en souriant.
- Pardonnez-moi, je ne suis qu?un simple mortel, dis-je en lui rendant son sourire.
- Anne, dit François, vous avez le cahier et le stylo ?
Elle se leva, prit dans un tiroir un cahier d?écolier, un stylo bille, et me les remit.
- Voilà ce qui va se passer, continua François. Vous allez recevoir une dizaine d?esprits, fraichement arrivés ici, et de différentes nationalités. Chacun vous donnera une foule de renseignements sur sa vie terrestre récente, sa famille, ainsi que des faits connus d?eux-mêmes et d?une seule autre personne encore vivante.
Après votre retour sur terre, vous indiquerez que vous avez rencontré tous ces esprits, et les précisions que vous apporterez sur chacun d?eux, prouvera, même aux yeux des plus incrédules, que tout ce que vous dites est vrai, et que vous les avez bien rencontrés.
Donc, dans un premier temps, vous allez recevoir successivement ces esprits, vous noterez soigneusement tout ce qu?ils vont vous dire, par le truchement d?Anna, après quoi, je vous reverrai de nouveau. Vous allez voir le premier immédiatement.
J?étais tellement persuadé que je ne pourrais en aucun cas apporter la preuve de ce que je vivais au milieu des esprits, que le système trouvé par François me parut enfantin, puéril, et décevant. J?étais donc persuadé que l?important pour moi, était désormais de retourner sur terre, si possible avec Anna, et que ma mission était à l?évidence, vouée à l?échec.
J?avais oublié que François, comme Anna, lisait dans mes pensées, et avec un sourire, il me dit :
-Lorsque vous aurez réfléchi, vous conviendrez que cette m&


-Lorsque vous aurez réfléchi, vous conviendrez que cette méthode que vous jugez simpliste, aura les effets escomptés. Par ailleurs, Anna a définitivement quitté le mode des vivants, alors, ne vous faites pas d?illusion.
Je n?eus pas le temps de répondre, et d?ailleurs, je ne vois pas en vérité ce que j?aurais pu dire.
La silhouette de François s?estompa peu à peu, pendant qu?un autre personnage apparaissait. C?était un asiatique, vêtu comme tous ici, quand ils reprenaient forme humaine, d?une longue toge blanche. C?était un vieillard, les yeux très bridés et plissés, avec une barbiche blanche.
Anna me dit que c?était Yo Hu. Qu?il vivait, il y a encore peu, dans un petit village à 30 kilomètres de Nankin.
Elle m?indiqua que chaque esprit, lui transmettrait des informations qu?elle traduirait en Français, très lentement, afin de me permettre de prendre des notes.
Le Chinois donna son lieu de naissance, son domicile au moment où il quitta la terre, ainsi que des précisions sur ses parents, les dates de son mariage, et de naissance de ses quatre enfants. Il me parla longuement des études faites par ses enfants, de leurs goûts culinaires, de leurs occupations préférées.
Enfin pour parachever sa confession, il parla d?une circonstance, connue seulement de son cousin Hao Sing et de lui. Ils avaient 12 ans, lorsque, en plein été, malgré l?interdiction formelle des parents de Yo Hu, ils étaient allés se baigner dans une rivière dangereuse à cause de ses trous profonds. Hao Sing s?étant trop éloigné du bord fut prit dans un tourbillon généré par un trou. Yo Hu eut la présence d?esprit de ramasser rapidement une branche d?arbre mort, et de la tendre à Hao Sing qui put l?agripper et se sortir de ce mauvais pas. Bien sûr, il n?avait pas été question de parler de cette aventure, puisqu?ils avaient désobéi, et ils étaient deux seulement à la connaitre. Or, Hao Sing était encore sur terre, et pourrait en témoigner.
J?avais pris, sous la dictée d?Anna, une vingtaine de pages de notes, et je pensais finalement, qu?en rapportant sur terre, tant de précisions sur des personnes de différents pays, avec des faits connus seulement d?un tout petit nombre, mes assertions, selon lesquelles j?avais rencontré les esprits, avaient une petite chance d?être crédibles.
Pendant toute la dictée, Anna ne cessait ne me regarder pour adapter sa traduction, à la vitesse de mon écriture.
L?histoire de la vie de Yo Hu, étant terminée, j?aurais bien voulu continuer à parler avec lui, par le truchement d?Anna, mais il me fit dire, que sa mission étant terminée, il ne pouvait s?attarder, car une réunion de sa classe devait avoir lieu.
Tout comme cela s?était passé avec François, sa silhouette s?estompa et je me retrouvais seul avec Anna.

- Je vois que votre opinion a quelque peu évolué. Vous commencez à croire que votre mission pourrait être couronnée de succès.
Il est vraiment très pénible d?être avec une personne qui peut lire absolument toutes vos pensées, alors que vous ne disposez pas de la même aptitude. Et j?allais le lui dire, lorsque je réalisais que c?était inutile, puisqu?elle le savait déjà.
Une chose était certaine. Malgré son regard mort, François m?avait fait une énorme impression. Il émanait de lui, une force psychique paralysante pour moi, et je pense, pour tout ceux qui devaient se trouver en face de lui. Anna, n?avait pas hésité à me révéler qu?elle vivait au XVIIème siècle, et j?en conclus qu?elle accepterait de me parler de François.
- Je dois vous avouer, Anna, que celui qui m?a demandé de l?appeler François, me fait une impression considérable. Savez-vous à quelle époque il vivait ?
- Je ne crois pas trahir un secret, en vous disant qu?il est passé sur terre, avant moi, le siècle précédant le mien.
- Ici, il semble avoir un rôle important. En était-il de même quand il était vivant.
- Oui et non. Il était d?origine italienne, possédait une intelligence universelle, et un homme qui, lui était un grand chef, lui a demandé de venir en France, où il pourrait librement poursuivre ses recherches, son travail, ce qu?il a accepté.
Je ne vous dirai pas quel était son nom, mais le prénom qu?il a choisi pour se présenter à vous, était celui de ce grand chef qui l?a aidé à donné libre court à son esprit inventif.
Je suis désolée, mais je ne peux vous en dire plus.
Il n?était pas nécessaire qu?elle soit plus explicite. Je savais maintenant que François n?était autre que l?Esprit de celui qui sur terre s?appelait Léonard de Vinci, et était venu en France, à la demande de François 1er.
De son vivant, c?était un savant de tout premier plan, mais les humains n?étaient pas dirigés par des savants. En revanche, ici, il était tout à fait normal, parmi les esprits, que celui de Léonard de Vinci ait une fonction de toute première importance.
J?étais perdu dans mes pensées, lorsque je réalisais que ces dernières étaient immédiatement connues d?Anna.
Je lui souris, et elle me sourit gentiment à son tour, en me disant qu?il était temps d?aller me reposer un peu. Elle ajouta qu?après mon repos, je recevrai un Brésilien qui à son tour, m?apporterait des renseignements destinés à me rendre crédible auprès des terriens.
Si, pour simplifier, j?appelle « journée », la période qui sépare deux sommes, les dépositions durèrent 10 journées alors que mon absence totale sur terre n?avait durée que deux jours.
Je reçus successivement les dépositions d?un Chinois, donc, puis d?un Brésilien, d?un Anglais, d?un Turc, d?un Français (De Bordeaux) d?un Russe, d?un Américain, d?un Japonais, d?un Sénégalais, et d?un Allemand.
En dehors d?un curriculum très précis, chacun m?avait raconté, une circonstance exceptionnelle, connue de seulement une ou deux personnes, encore sur terre, et qui pourraient confirmer que je ne n?avais pu inventer tous ces détails. Le fait que j?avais été amené à rencontrer des Esprits, issus d?humains décédés depuis peu, serait établi d?une façon incontestable. Ma mission ne me paraissait plus impossible. Oui, je commençais à y croire.
A la fin de mes entrevues avec les dix esprits de la classe 1, j?avais rempli entièrement 2 cahiers, et la moitié d?un troisième. Je possédais ainsi, une foule de renseignements, en provenance des quatre coins de la terre, et qu?aucun humain n?aurait pu réunir.
Le dernier esprit que j?avais reçu, me dit, par le truchement d?Anna, avant de me quitter, qu?après ma période de sommeil, je recevrai la visite de François, qui assisterait à mon repas.
Ce compte rendu, que j?écris actuellement, étant appelé à être publié, je ne m?étendrai pas sur mes pensées profondes personnelles. Je me contenterai de dire qu?un humain, en présence d?une femme très jolie et intelligente, et ne voyant pratiquement qu?elle, durant toute une période, ne pouvait rester insensible à son charme.










CHAPITRE 6




A mon réveil, nous nous sommes retrouvés, Anna et moi, attablés dans la salle à manger, et dégustant ce que je sentais être mon dernier repas parmi les esprits. Certes, je n?avais pas acquis la faculté de lire dans les pensées de ma convive, mais je devinais qu?elle ressentait une certaine tristesse, et je ne pouvais m?empêcher de croire (en tous cas d?espérer) que mon départ proche en était la cause.
Nous arrivions au dessert, et contrairement à nos habitudes, nous n?avions pas prononcé plus de deux ou trois phrases. La silhouette de François se matérialisa peu à peu, et son incarnation terminée (toujours à l?exception de son regard qui restait inexpressif) il me dit que comme je l?avais deviné, j?arrivais à la fin de mon séjour parmi eux.
- Vous allez maintenant devoir remplir la mission, pour laquelle vous avez été désigné, formé, et informé. Vous allez remonter dans votre avion, sans oublier vos cahiers, bien sûr, et vous allez retourner chez vous.
Pour votre voyage, vous n?avez rien de particulier à faire. Dès que vous serez installé dans votre cockpit, vous serez pris en charge par un faisceau de rayons cosmiques.
- Ah, oui, le nuage bleu ?
- Non. Il n?y aura pas de nuage bleu. Pour votre venue, nous avons tenu à vous éviter un stress inutile. Songez un instant quelle aurait été votre réaction, si, subitement, sans aucune préparation, vous aviez vu défiler à une allure vertigineuse, des planètes, leurs satellites, et des étoiles?.Vous seriez peut être devenu fou de terreur. C?est pourquoi nous vous avions entouré d?un voile bleu. Mais pour le retour, ce sera inutile, puisque vous savez désormais qu?il s?agit d?un phénomène normal.
Il faut que vous soyez pénétré de votre mission, et que vous soyez convaincu de son importance ?.universelle.
L?esprit Suprême, je vous l?ai dit, est en lutte constante contre une puissance qu?il avait lui-même créée et qui est entrée en dissidence. La Terre, elle, et ses abords, est sous le contrôle absolu de L?Esprit Suprême, mais si vous en sortez, vous risquez de tomber sous la domination de cette force que nous appelons Caliure, et qui s?est donnée pour mission de détruire les créations de l?Esprit Suprême. La capture d?une partie des humains serait pour Caliure d?une importance extrême, car il sait que les esprits humains, affinés dans nos centres sont indispensables pour conserver les vertus créatrices de l?Esprit Suprême.
Lorsque vous serez de retour sur terre, nous ne pourrons plus rien pour vous. Il faudra, qu?avec les éléments que nous vous avons fournis, vous parveniez à convaincre l?humanité toute entière, que vous êtes bien venu chez nous, et que nos prescriptions selon lesquelles, les hommes ne doivent pas s?évader de la terre, doivent être rigoureusement respectées.
A plus tard, car vous nous reviendrez d?une façon normale, après la fin de votre séjour terrestre. Maintenant, j?autorise Anna à vous accompagner jusqu?à votre appareil.
- Merci. Mais vous avez omis un petit détail : Je ne dois plus avoir beaucoup d?essence dans mon appareil.
- Détrompez-vous. Nous n?oublions jamais rien. Votre réservoir contient encore le tiers de sa contenance, ce qui vous est largement suffisant. Je vous l?ai dit, vous serez transporté par un faisceau de rayons cosmiques, et vous serez lâché à environ 100 km de votre point d?atterrissage. Vous avez largement assez d?essence pour arriver chez vous.
- Comment saurai-je à quel moment, je serai en autonomie de vol ?
- Tout simplement, quand vous perdrez de l?altitude. Cela signifiera que vous ne serez plus porté par les rayons cosmiques, et qu?il sera temps de reprendre votre appareil en mains.
Sans même me dire au revoir, ou bonne chance, la silhouette de François disparut, et je me retrouvai seul avec Anna.
- Allons, me dit-elle, il faut y aller. C?est vrai que vous serez seul sur terre pour accomplir votre mission, mais sachez que je ne cesserai de penser à vous et de souhaiter votre réussite.
Mon appartement et les meubles qu?il contenait disparurent et un escalier, éclairé sur cinq mètres devant moi, comme d?habitude, apparut. Anna et moi, nous avons commencé à monter, et après une cinquantaine de marches, nous nous sommes retrouvés « dehors » c'est-à-dire sous la grande voûte.
A quelques mètres de là, mon appareil n?avait pas été déplacé, et m?attendait comme je l?avais laissé.
La pesanteur étant infiniment moindre que sur terre, je n?eus qu?un petit bond à faire, pour me retrouver dans mon cockpit. Je n?avais pas voulu faire trainer nos adieux avec Anna, et je savais qu?elle était d?accord avec moi sur ce point. Après m?être équipé, je n?eus pas à toucher le moindre instrument, pour que mon avion parte, sans me faire subir la moindre pression..
Je n?avais eu aucun « G » à encaisser, ce qui était plus que surprenant si l?on considère l?accélération phénoménale à laquelle j?avais été soumis, en passant de la vitesse 0 à des milliards de kilomètres par heure En fait, j?étais aussi à l?aise que dans un transat sur terre.
Ma vitesse, était si incommensurable, que mon ?il avait à peine le temps d?apercevoir grossir des planètes, que déjà elles avaient disparues.
Je n?ai aucune idée du temps que dura ce vol intersidéral, mais je sentis soudain, que je n?étais plus porté, et que mon appareil perdait de l?altitude. Je pris en main mon manche à balai, et je constatai que je survolais la terre.
Tous mes appareils fonctionnaient, et je tentai de prendre contact avec la tour de contrôle de l?aéroport d?Agen, qui, et j?en fus presque surpris, me répondit immédiatement.
Mon extraordinaire voyage se terminait là.
Depuis mon arrivée dans mon appartement, à Agen, j?ai écrit »non stop » durant 10 heures. Je vais me reposer, et demain, je ferai mon plan pour accomplir ma mission.



















































DEUXIEME PARTIE









CHAPITRE 1






Je viens de dormir pendant 15 heures. Je me suis réveillé avec un abominable mal de tête, fatigué, comme si je venais de courir un marathon.
La pesanteur terrestre est vraiment pénible, quand on vient de vivre en un lieu où, l?attraction des corps se faisait peu sentir.
Après avoir pris un analgésique, je me mis à relire ce que j?avais écrit la veille. Plus que lorsque j?avais tracé ces lignes, plus que lorsque j?avais vécu les évènements rapportés, je me rendais compte de l?étrangeté de mon aventure.
J?en venais même à me demander, si je n?avais pas rêvé ce que je racontais dans mon compte rendu. Heureusement, la lecture de mes cahiers, étaient là pour me confirmer que tout cela était réel, mais je me rendais parfaitement compte des difficultés que j?allais affronter pour persuader les hommes de cette terre de la véracité de mon histoire, puisque moi-même, j?avais du mal à y croire.
Après une longue réflexion, je décidai de procéder de la façon suivante.
En premier lieu, j?allais chercher sur internet un cabinet, susceptible de traduire en plusieurs langues, mon compte rendu. En ce qui concerne mes deux cahiers, je préférais ne pas les divulguer dans l?immédiat.
Il me fallait 7 traductions dans les langues maternelles des esprits que j?avais entendus. Donc des traductions en Chinois, en Portugais ( pour les Brésiliens), en Anglais ( pour les Américains et les Anglais), en Russe, en Japonais, en Allemand, en Turc, outre la version française que je venais d?écrire pour les Français et les Sénégalais.
Pour trouver une société de traduction, je n?eus que l?embarras du choix, et, rapidement, j?eus l?engagement de l?une d?elles, de me fournir le travail sous trois jours.
Ayant réglé ce problème, je pensais, que puisqu?il s?agissait de diffuser le plus largement possible une information, la meilleure solution était
d?essayer d?entrer en contact avec l?Agence France- Presse.
Mon histoire était tellement extraordinaire, que je ne tentais même pas de l?exposer par téléphone. Je préférais me retrouver devant un homme, auquel je fournirais des preuves irréfragables et surtout il me serait possible de me montrer plus persuasif.,
Je parvins à joindre un haut cadre de l?Agence France-Presse, et pris rendez-vous pour le lendemain au début de l?après midi, à 14 heures, avec monsieur Dubois, Fondé de Pouvoirs.
Ces dispositions prises, j?avalai un repas léger, et me couchai à 6 heures de l?après midi.
Si je n?avais pas senti vraiment la fatigue, là haut, au moment du départ, elle m?écrasait maintenant.
J?avais décidé de me rendre à Paris avec mon avion, et je décollai le lendemain vers 9 heures du matin, de l?aérogare d?Agen, avec mes précieux documents.
Je fus reçu à l?heure prévue, 14 heures exactement, par un homme d?une quarantaine d?années, qui, en homme très occupé, me dit qu?il m?accordait cinq minutes pour exposer mon problème.
C?était un homme, imbu de sa personne et de l?importance de ses fonctions. Il n?entendait pas perdre son précieux temps pour des broutilles débitées par des individus plus ou moins fantaisistes.
En fait, je sortis de son bureau à plus de 19 heures, après avoir pris un nouveau rendez-vous pour le lendemain à 14 heures également, car dans la matinée du lendemain, il devait organiser une réunion de tous les dirigeants de l?Agence.
Il lut mon compte rendu, et me dit tout d?abord, qu?il ne s?occupait pas d?édition, et que si j?étais un auteur de science fiction, je n?avais pas frappé à la bonne porte. Il s?était déjà levé pour marquer que l?entretien était terminé, lorsque je lui dis :
- Monsieur, vous pouvez douter de l?exactitude du récit que vous venez de lire. Mais si je vous apportais la preuve que j?ai rencontré des esprits de différentes nationalités, récemment décédés et qu?ils m?ont rapporté des faits que seule, une personne encore vivante peut connaitre. Ne seriez vous pas tenté d?examiner un peu plus sérieusement le récit de mon aventure ? Je dois vous dire, qu?une mission m?a été confiée et que je la remplirai, soit avec vous, soit par un autre canal si c?est nécessaire.

mais dans ce dernier cas, il faudra vous préparer à quitter votre beau fauteuil.
Je ne connaissais pas ce monsieur Dubois, mais il semblait que j?avais touché un point sensible, car il s?adoucit immédiatement.
- Avez-vous vraiment en votre possession des témoignages de diverses personnes sur des faits tenus secrets ?
Je lui fis voir les 3 cahiers en ma possession, et lui énonçais les nationalités des esprits récemment décédés. Je lui fis lire le témoignage du français, et il parut ébranlé par l?abondance de précisions qu?il contenait.
- Tous les témoignages recueillis sont-ils aussi précis ?
- Tous ! Mais pour l?instant, je pense qu?il ne serait pas opportun de les divulguer sans en avoir discuté avec les plus hauts dirigeants de votre organisme.

A partir de là, Dubois se mis à me poser une multitude de questions, sur mon voyage lui-même, l?aspect de la planète occupée par les esprits, leur réincarnation etc. Il ne regardait pas sa montre, il n?était plus pressé de me voir partir.
Je lui laissais lire la totalité de mes deux cahiers et demi, et il convint, que si tout ce que je rapportais était d?une vérité absolue, il n?y aurait place, pour aucun doute sur la véracité de mon aventure.
Il regrettait, et moi avec lui à ce moment là, que je n?aie pas pu obtenir plus de précisions sur cet être crée par l?Esprit Suprême (Que nous appellerons ici, le Diable, puisque c?est sous ce nom qu?il est connu sur terre)
C?est vrai que je ne rapportais pas beaucoup d?éléments à son sujet, mais j?étais persuadé, que même en insistant, je n?en aurais pas obtenu beaucoup plus, ce qui était bien normal, car la connaissance de la nature du Diable n?était pas indispensable à la réalisation de ma mission. Il suffisait que je connaisse son existence, et le danger qu?il représente pour nous.
Si, au début de notre conversation, le Fondé de pouvoirs, avait eu à mon égard, une attitude hautaine, un peu méprisante, qu?il devait avoir avec tous ceux qui venaient voler son précieux temps pour des peccadilles, je dois dire que nos discussions avançant, il me considérait de plus en plus comme un homme exceptionnel, qui avait vécu des moments exceptionnels, et pourrait lui procurer, à lui, une renommée?.exceptionnelle, elle aussi, puisqu?il était le premier homme à avoir discuté avec le nouveau Messie.
Aussi, la poignée de mains qu?il me donna, lorsque nous nous sommes quittés en fin d?après midi, était chaleureuse, admirative, et?. reconnaissante pour ce qu?il allait pouvoir en tirer personnellement comme avantages.
Lorsque je me suis présenté le lendemain à l?Agence France Presse, le Fondé de pouvoirs qui m?avait reçu la veille, Dubois, était entouré de 5 autres hauts dirigeants de l?Agence.
S?il avait rassemblé toutes les grosses têtes de l?Agence, c?était de bon augure, et je pensais, avec un peu d?amusement, que j?avais devant moi, peut- être, mes premiers apôtres. En quelques minutes, je savais, que je ne pêchais pas par excès d?optimisme.
Dans la matinée, ils avaient eu le temps d?entrer en contact avec la famille du Français, dont l?esprit m?avait longuement parlé, et révélé de nombreux détails connus d?une seule personne, en dehors de l?Esprit . Certes, après l?étude d?un seul cas, ces Messieurs n?étaient raisonnablement convaincus qu?à 99 pour cent, dans l?attente de la vérification des renseignements donnés par les neuf autres esprits qui m?avaient confié les détails de leur vie, mais leur intime conviction était déjà faite.


J?ai du répéter ce que j?avais écrit, et ce que j?avais déjà dit la veille au fondé de pouvoir, mais je le fis sans aucun agacement, car je sentais que je n?allais plus être seul, pour convaincre l?humanité entière.
- Monsieur Moreau, me dit le Président, si vous n?y voyez aucun inconvénient, nous allons nous livrer nous-mêmes, aux neuf enquêtes concernant les familles, dont l?un des leurs, récemment décédé vous a fait des confidences. Bien entendu, afin que le sérieux de notre enquête ne puisse être mis en doute, nous mènerons ces enquêtes conjointement avec des délégués désignés par les plus hautes autorités de chaque pays.
Chaque fois qu?une enquête sera terminée, nous organiserons sur place une conférence de presse à laquelle, bien entendu, vous serez convié. Avez-vous des objections à faire sur notre proposition d?action ?
- Non pas d?objection. Mais deux problèmes à voir avec vous.
Tout d?abord, je vous demande instamment, de rendre public, partout et au même instant, mon rapport concernant toute mon aventure. En revanche, il est primordial que le contenu de mes cahiers, ne soit pas connu pour l?instant. Certains pourraient profiter de l?occasion pour mettre sur pied, je ne sais quelle escroquerie, ou pire, pourraient faire en sorte que le sérieux de ma mission, puisse être mis en doute.
Je demande donc, une sorte de Secret Défense sur les confessions de mes dix confidents. C?est indispensable pour que ma mission aboutisse, sans discussion possible.
Le deuxième problème, que je redoute un peu, est que mon nom, soit divulgué et connu de tous. Or, je ne me sens pas de taille à affronter seul, la presse du monde entier, les paparazzis, et tous les curieux. Aussi, je vous demande conseil : Que dois-je faire ? Vous devez être habitués à ce genre de situation, puisque votre métier, consiste à révéler au public, des faits sensationnels auxquels des hommes ont été mêlés.
- Vos préoccupations sont parfaitement légitimes, et nous allons tout d?abord, répondre à la première. Je propose, que l?un après l?autre, nous nous engagions sur l?honneur, à ne jamais divulguer le contenu de vos cahiers, sans votre accord, monsieur Moreau.
Les promesses furent faites, et le Président, qui me semblait être un homme aimant les choses concrètes, me dit:
- Parlons maintenant du second point que vous avez soulevé. En ce qui concerne la protection de votre personne, et le respect de votre vie privée, je propose que dès maintenant, nous mettions à votre disposition, un appartement dans nos locaux. Vous pourrez ainsi bénéficier de notre système de protection très efficace. Par ailleurs, je crois, Monsieur Moreau que vous êtes en congé, pour encore 10 jours. Mais il serait préférable, que vous ne repreniez pas vos fonctions actuelles de Directeur Commercial adjoint, car vous seriez harcelé par tous, dans votre société. Je vous suggère de donner votre démission, et vous pourriez être engagé chez nous, à vos conditions actuelles. Ainsi, vous n?auriez qu?à vous consacrer en toute indépendance, à votre mission, tout en étant à l?abri, en grande partie, de tous les curieux qui voudraient vous traquer à chaque instant. Que pensez-vous de ma proposition ?
Il faut croire que la fréquentation des esprits, m?avait retiré une partie de mon sens du concret et de mes ambitions, car je n?ai pas songé une seconde, à profiter de ma situation particulière, centrale dans cette affaire, pour obtenir une augmentation?. Mais les intérêts en jeu, étaient sans commune mesure avec ma situation matérielle personnelle.
Je dois dire cependant, que je fus installé dans un agréable appartement de 3 pièces, au dernier étage de l?Agence, avec une vue magnifique sur tout Paris.

Par moment, je souffrais de troubles curieux, j?en arrivais à perdre la respiration. Il m?arrivait tant de choses incroyables ! Je vivais plusieurs vies en accéléré. Même des gestes très simples, comme me laver les mains, ou boire un verre d?eau, me semblaient décalés dans le temps, comme si ce n?était plus moi, qui étais en train d?agir. Je crois que cela venait du fait que je ne parvenais pas à réaliser, vraiment, l?incroyable aventure, que je venais de vivre, et je me sentais aussi déphasé, ici qu?en haut. Je venais, dans un court laps de temps, vivre deux vies simultanément
L?Agence France Presse publia un communiqué résumant l?aventure à laquelle j?avais participé, en renvoyant pour plus de détails à la lecture des journaux nationaux.
Deux heures, après la sortie du communiqué de l?Agence France- Presse, Dubois m?appelait sur mon portable.
- Je viens de recevoir un coup de fil de l?Elysée. Demain matin, à 9 heures 30, une voiture viendra vous prendre ici, à l?Agence, pour vous amener à l?Elysée. Le Président veut vous voir.
- Bigre ! Déjà ? Il ne me laisse pas récupérer du décalage horaire ? Ai-je répondu sur le ton de la plaisanterie.
- Il doit y avoir à L?Elysée un gars dont le rôle consiste uniquement à rester à l?affut de tous les communiqués que nous sortons, pour, après un tri sommaire, les transmettre au Président.
- Il a une activité, de 10 dix gros travailleurs, ce gars là. Bon. Je serai dans votre bureau demain à 9 heures 30.
A dix heures et quart, le lendemain, je pénétrai dans le bureau du Président.
Il ne perdit pas de temps en considérations oiseuses. Il me demanda immédiatement ce qu?il y avait de vrai dans le communiqué de l?Agence.
- Tout, monsieur le Président lui répondis-je.
-
- Vous avez des preuves ?
- Oui, monsieur le Président.
Aussitôt, il appuya sur un bouton de son interphone et dit simplement :
- Annulez mon rendez- vous de onze heures. Voyez dans mon emploi du temps pour fixer une autre date cette semaine. Je dis bien cette semaine.
Puis, se tournant vers moi, il me dit :
- C?était le syndicat des producteurs de maïs. Je ne peux pas les faire droguer trop longtemps. Alors ? Il était question de preuves de votre petite virée dans le cosmos. Quelles sont ces preuves ?
Je lui expliquais que j?avais été amené à rencontrer les esprits de 10 personnes récemment décédées, lesquelles m?avaient fourni une foule de renseignements, dont certains ne pouvaient être connus que par une ou deux personnes encore vivantes.
- Si vos renseignements s?avèrent exacts, on pourra en effet considérer que votre récit était réel. Racontez moi en détail, tout ce qui vous est arrivé à partir de votre départ de l?aéroport?.d?Agen je crois ?
- C?est en effet d?Agen que je suis parti.
Et je lui ai fait la relation complète de mon aventure.
Le coude sur son bureau, le menton dans la paume de la main, il m?a écouté sans m?interrompre, prodigieusement intéressé.
A la fin de mon récit, sa première réflexion a été :
- Monsieur Moreau, vous allez dans 48 heures avoir un nom plus connu que le mien.
Puis, il remarqua qu?en dehors des 10 esprits- témoins, je n?avais vu, réellement, que deux esprits réincarnés. François et Anna.
- Plus, celui qui s?est matérialisé pour me répondre lors de la première réunion à laquelle j?ai assisté.
- C?est exact, mais c?était un personnage secondaire. Je voudrais que vous me décriviez plus minutieusement ceux qui se sont présentés sous les prénoms de François et d?Anna. Cette dernière est-elle vraiment très jolie ? Quant à François, avez-vous la certitude qu?il s?agissait bien de Léonard de Vinci ?
- Un inventeur de renom qui vivait au XVIème siècle, était italien d?origine et a été amené en France par un personnage très haut placé, voyez vous quelqu?un d?autre, Monsieur le Président ?
- Non, évidemment. Et après tout, il est bien normal qu?un esprit tel que celui de Vinci, occupe, parmi les esprits une place prépondérante. Je me demande quelle place me sera réservée. Avez-vous eu l?impression, que pour se faire une place, là haut, il faut savoir s?imposer?..enfin, se battre avec d?autres ?
- Pour être franc, l?impression qui m?est restée, est que tous les sentiments humains n?ont plus cours entre les esprits. Leur seul souci est semble-t-il de s?améliorer par de nombreuses discussions entre eux, afin de pouvoir être utiles à l?Esprit Suprême. Je pense que c?est leur seul but.
Vous m?avez demandé par ailleurs de vous parler d?Anna. Malheureusement, je n?ai pas assez de mots pour vous la décrire. Selon elle, elle était sur terre, exactement comme elle m?est apparue, et c?est cela que je n?arrive pas à concevoir. Une femme d?une telle beauté, cela n?existe pas sur terre.
- Il y a mon épouse, me dit le Président en souriant.
Un peu courtisan, je lui dis qu?en effet, l?épouse du Président était une très belle femme, mais que, sans pouvoir préciser en quoi, Anna, c?était autre chose.
- Bon, revenons au centre du problème, me coupa le Président. Il faudrait donc que nous stoppions, toutes nos tentatives pour envoyer des humains sur d?autres planètes. ?
- C?est exact. La mission qui m?a été confiée est en effet de persuader les chefs des grands Etats, qu?il serait dangereux pour l?humanité toute entière d?envoyer des hommes dans l?espace et sortant de la zone terrestre, car ils pourraient être capturés par Caliure.
- Ce Caliure, serait donc bien cet Ange déchu que nous connaissons sous le nom du diable.
Mais, dites ?donc, Moreau, je vois une contradiction dans ce que vous dites.
- Laquelle, Monsieur le Président ?
- Vous m?avez dit, que parmi les esprits, tous les sentiments que nous connaissons sur terre : Esprit de lucre, orgueil, méchanceté, ambition etc, n?existaient pas la haut.
- C?est exact !
- Mais alors, si c?était vrai, comment expliqueriez vous l?attitude de ce Caliure ? Il est ambitieux, non ? Il veut la perte de votre Esprit Suprême, et le supplanter, non ? Il me semble que ce sont là des sentiments typiquement humains.
- Je m?étais fait cette réflexion, monsieur le Président, et la seule réponse que je peux vous donner, c?est l?explication que m?avait donnée François, d?ailleurs spontanément, sans que je l?interroge. Il m?a expliqué l?attitude de Caliure par quelque chose d?analogue à ce que nous appelons un vice de fabrication. Il s?agirait donc bien d?un cas unique et exceptionnel. Une exception qui justement, confirme la règle
Après quelques secondes de réflexion, le Président me dit qu?il userait de tous ses pouvoirs pour faire cesser toutes les recherches astronautiques, ayant pour but de propulser des humains sur d?autres planètes. Il me dit que son influence, était suffisante, pour rallier toutes les nations européennes, mais qu?en revanche, la partie n?était pas gagnée, auprès de certaines très grandes puissances, dans lesquelles, des lobbies extrêmement puissants, tiendraient à rentabiliser les capitaux énormes, déjà investis dans ce domaine.
L?entrevue se termina par une poignée de main, et le Président me dit, en riant, qu?il aurait bien aimé être à ma place, mais que malgré cela, même en sachant ce qui l?attendait, il n?était pas pressé pour partir définitivement sur Krop.
- Comprenez-moi, me dit-il, je ne suis pas certain d?obtenir là haut des fonctions aussi passionnantes que celles que je remplis ici.
' A suivre)


CHAPITRE 2

Les plus importants quotidiens de chaque Etat, ont publié in extenso ma relation des faits, et ont annoncé que des preuves irréfutables seraient apportées confirmant la véracité des faits mentionnés.
Les chefs d?Etat, des pays dont étaient originaires les esprits qui s?étaient confiés à moi, ont eu connaissance de ces témoignages, et ont tous engagé des enquêtes sérieuses, menées par des personnes bénéficiant dans le pays d?une réputation morale irréprochable.
Finalement, nous avons décidé, que, contrairement à ce que nous avions prévu au début, mieux valait, que les résultats des enquêtes ne soient pas divulgués par chaque Etat, au jour décidé par eux
Les résultats de ces enquêtes devaient rester secrets, pour être divulgués simultanément le même jour.
C?était l?ONU qui avait pris les choses en main. Je devais me rendre devant l?Assemblée Générale pour raconter une fois de plus, mon odyssée, puis, un représentant de chacun des pays qui s?étaient livrés à une enquête, devait venir exposer les résultats de leurs investigations.
J?avais un trac fou, lorsque j?ai été appelé à monter à la tribune de l?ONU, et mon intervention a été très brève, car, j?avais déjà tout dit dans mon compte rendu, et chaque participant à l?Assemblée Générale, en possédait un exemplaire dans sa langue.
Puis, ce fut au tour des Ambassadeurs.
Les conclusions des 10 intervenants, ont toutes été identiques. Pas la moindre petite erreur n?avait été trouvée, dans les témoignages rapportés, et tous concluaient dans le même sens : Mes allégations ne pouvaient être mises en doute. J?étais bien allé dans le monde des Esprits, et j?avais bien reçu des renseignements précis, et souvent confidentiels, directement, de la part des esprits de personnes décédées récemment..
Une décision s?imposait donc : Comme il me l?avait été demandé, il fallait interrompre toutes les expériences spatiales, destinées à projeter l?homme sur d?autres planètes. La survie de l?humanité était à ce prix.
Cependant, tous les orateurs me posaient deux questions, auxquelles, d?ailleurs, je n?étais pas en mesure de répondre.

1/ Pourquoi, l?Esprit Suprême avait-Il besoin de nos esprits humains ?
2/ Il était question d?une zone terrestre, dans laquelle l?Esprit Suprême avait la certitude que son influence ne pouvait être combattue. Quel était cet espace ? Cette question avait un intérêt primordial sur le plan pratique : Tous nos systèmes de communications modernes, sont basés sur des satellites. Les hommes pouvaient-ils poursuivre le lancement des satellites ? Dans la négative, nous assisterions à un bouleversement catastrophique de nos Economies et de nos modes de vie.

Je n?avais pas la réponse à ces questions, mais seule la seconde présentait un intérêt, d?ailleurs, effectivement primordial. La première n?étant destinée qu?à satisfaire une simple curiosité.
En tout état de cause, il était peu probable que je puisse être de nouveau en contact avec les Esprits. Je le dis très simplement, en ajoutant mon sentiment personnel. Les satellites faisant partie de la zone d?attraction terrestre, il me semblait que dans ce domaine, les hommes pouvaient sans doute poursuivre leurs expériences.
En effet, L?Esprit Suprême redoutait avant tout, que des humains soient capturés par ce que nous appelons le Diable. Il me semblait donc qu?il faudrait cesser d?envoyer des satellites habités, mais l?envoi de satellites de communication, ou d?observation, de devraient pas entrer dans le cadre de l?interdiction.
Je ne faisais, que donner là, mon opinion, mais tous estimèrent que par ma bouche, c?était l?Etre Suprême qui s?exprimait. Nous verrons ce qui en résultera.
J?avais un énorme besoin de prendre un peu de repos, de recharger les accus, et plutôt que d?aller dans l?appartement mis à ma disposition par l?Agence France-Presse, je préférais aller dans mon cadre habituel, à Agen.
Après moult précautions pour échapper aux curieux, je suis parvenu de nuit, dans mon appartement, et, mon téléphone coupé, la sonnette de ma porte débranchée, j?ai pu me reposer tranquillement.
Deux jours après mon entrevue avec le Président de la République, j?ai reçu un nouveau coup de fil de Dubois.
- Vous êtes très demandé, mon cher. Je viens de recevoir un coup de fil du Vatican. Le Pape serait très heureux de pouvoir parler avec vous. Il vous demande si vous pourriez vous rendre à Rome. Vous remarquerez qu?il a pris plus de temps que le Président pour réagir, et qu?il ne vous impose rien, ni la date, ni même votre venue. Pourtant, il me semble qu?il est intéressé au plus haut point par les révélations que vous avez faites.
- C?est vrai qu?il ne me convoque pas, mais je suis moralement obligé de satisfaire son désir. Je me rendrai au Vatican après demain. Je m?envolerai pour Rome demain matin.
La rencontre avec le Pape fut plus longue que celle que j?avais eue avec le Président. Nous étions seuls dans son bureau, et il ne s?attarda pas sur le fond de la mission qui m?avait été confiée. Il voulait le maximum de renseignements sur L?Etre Suprême et sur Caliure, malheureusement, je n?avais pas grand-chose à lui apprendre, car à toutes les questions que j?avais posées à leur sujet, il m?avait été répondu que ma mission pouvait être remplie avec les éléments qui m?étaient fournis, et que tout le reste, n?était que de la curiosité inutile.
Le Pape parlait beaucoup. J?avais l?impression qu?il pensait tout haut. La religion dont il avait la charge suprême était basée sur la croyance, et bien entendu si l?existence de l?Etre Suprême était confirmée, tout un pan de la religion catholique devenait caduc. Tous les principes moraux qui devaient être respectés sur terre, pour avoir ensuite une vie meilleure, n?avaient plus de raison d?être puisque parmi les esprits, il ne semblait pas qu?il y ait une différence de traitement, entre les bons et les mauvais.
Le Pape était particulièrement tourmenté par un fait. Dieu avait envoyé des messages aux humains, par l?intermédiaire de Messies et Prophètes, pour faciliter la vie entre hommes, et maintenant, il réduisait à néant tout ce travail qui avait demandé des millénaires d?efforts.
« Pourquoi nous faire enseigner des principes moraux, qu?il fallait absolument suivre, si l?on voulait espérer avoir une vie éternelle agréable, pour maintenant, démontrer par votre intermédiaire, que l?Etre Suprême a besoin de tous les esprits, et ne semble pas faire de différence entre ceux qui ont eu une vie terrestre édifiante et les autres ? Pourquoi ?
En se posant cette question, il me la posait également et je n?ai pu que lui répondre ;
- Je crois que la réponse à vos questions se trouve en une petite phrase que vous répétez souvent : « « Les desseins de Dieu sont impénétrables »
Pour la première fois depuis le début de notre entrevue, le Pape sourit et me demanda si je n?avais pas songé un jour, à venir les rejoindre.
En poussant un long soupir, et en se levant pour me signifier que l?audience était terminée, il me dit.
- Monsieur Moreau, la croyance est parfois plus confortable, que la certitude. Vous allez, déclencher un cataclysme, sans l?avoir voulu, bien sûr. Que l?Etre Suprême, puisqu?il faut l?appeler ainsi, nous vienne en aide, car moi, son représentant sur terre, je suis déstabilisé.
C?est au cours de cette audience que j?ai pleinement réalisé les énormes conséquences que mon aventure allaient avoir sur la vie de l?humanité, et je ne pouvais m?empêcher de penser à la dernière réflexion du Pape. C?est vrai que la croyance laissait plus de liberté de man?uvre à l?imagination, que la certitude, qui stérilise toutes les possibilités d?interprétation.

Je me trouvais dans mon appartement à Agen, deux jours après mon voyage à Rome, et j?écoutais les nouvelles à la radio.
La plupart des commentaires ne mettaient pas en cause mon récit et la grande majorité des voix qui se faisaient entendre, pressaient les gouvernants à respecter la demande de l?Etre Suprême.
Mais bien entendu, il y avait quelques voix discordantes. J?étais un manipulateur, peut être génial ( je les remerciais au passage) mais il ne pouvait pas y avoir une once de vérité dans mon pseudo compte rendu, ne serait-ce que parce qu?un corps humain, ne pourrait résister à un tel voyage intergalactique, surtout en un temps aussi court.
Je ne pouvais qu?admettre leur raisonnement, mais sans comprendre le comment de mon aventure, je la savais bien réelle.
Je réfléchissais à l?article que je pourrais écrire pour plaider ma cause, lorsque j?entendis frapper à ma porte. Je me gardais, bien sûr, d?aller ouvrir, persuadé qu?il s?agissait de journalistes qui tentaient leur chance, en venant à mon domicile.
Les coups sur ma porte devenant de plus en plus violents et insistants, m?étant déchaussé, je suis venu, sans bruit, pour voir par l??illeton quel était l?individu qui obstinément, continuait son vacarme.
En voyant de qui il s?agissait, je faillis tomber de saisissement et m?appuyais un moment contre le chambranle de la porte.



















































CHAPITRE 3






C?était Anna, et je lui ouvris immédiatement ma porte.
Jamais, jamais, je n?aurais pu imaginer une aussi belle vision.
J?avais toujours vu Anna, revêtue de sa toge. Là, elle était habillée avec une élégance inouïe. Elle portait un tailleur de couleur crème, à revers bordeaux, dont la veste, cintrée, mettait en valeur sa taille mince et sa superbe poitrine.
Elle souriait devant mon étonnement, et m?expliqua :
- Vous pensez bien que je ne pouvais pas me promener parmi les Humains en toge blanche. Cela aurait attiré la curiosité.
- Sans doute. Mais croyez-vous que votre beauté inégalable, vous fasse passer inaperçue ?
- Peut être que les autres ne me voient pas avec les mêmes yeux que vous ?
Je la fis entrer dans mon petit salon et, immédiatement, lui posais la question qui me brûlait les lèvres.
- Pourrez-vous rester longtemps parmi nous ?
- Non, hélas. Deux de vos jours seulement.
- Et si vous restiez un peu plus, qu?arriverait-il ?
- Dans quarante huit heures, je me désincarnerais et mon esprit reviendrait à sa vraie place.
Voyant que j?étais déçu et malheureux, elle se leva, vint vers moi, me caressa la joue d?une main incroyablement douce et me dit.
- Vous savez, le temps est chose très relative. Et deux jours peuvent paraitre très longs.
Je me levai, et la pris dans mes bras.


Lorsque nous avons fait l?amour, il y avait quelque chose de divin qui participait à la fête de nos corps, et ces deux jours, très courts normalement, furent tellement riches, en sensations nouvelles et puissantes pour moi, qu?il me semble maintenant (Anna avait bien raison), que notre vie commune avait été longue, longue, pleine de choses merveilleuses et diverses. Nos conversations ont été enrichissantes, et je ne crois pas qu?elle ignore un détail de ma vie, comme je crois savoir tout ce qu?elle avait vécu durant sa courte vie terrestre.

Cela fait trois jours qu?elle est partie.
Oui, cela fait trois jours, et je commence seulement à reprendre pied dans la vie normale.
Anna était venue en mission, bien sûr, même si nous ne nous sommes occupés de cette mission, que quelques courts instants.
Elle était venue m?apporter la réponse à la question qui m?avait été posée à l?ONU. Oui, les hommes pouvaient poursuivre l?utilisation des satellites, pour leurs communications. Ils pouvaient également aller sur la lune si cela les amusait, puisque c?était également un satellite de la terre. En revanche, interdiction absolue d?envoyer des hommes sur une autre planète, même très proche comme Mars.
Par acquis de conscience, je lui posais la question de l?intérêt que présentaient les esprits humains pour L?Esprit Suprême, mais elle répondit, comme je m?y attendais, qu?il s?agissait là d?une question sans aucune portée pratique, et qui ne relevait que de la simple curiosité. Elle voulut bien me dire cependant, que si le Caliure, (notre diable), était incapable de créer des hommes, en revanche, il pouvait, s?il en capturait, les laisser se reproduire, et en faire des êtres belliqueux soucieux seulement de détruire l?humanité terrestre, car l?homme est un produit malléable, dont il était possible de modifier considérablement les pensées et les actes.
Si les humains ne respectaient pas les directives de l?Esprit Suprême, ils en seraient les premières victimes.
En attendant, le monde humain était en effervescence. Si la mondialisation cherchait un exemple pour se définir, il était maintenant tout trouvé. Toute l?humanité n?avait qu?un sujet de conversation. Dans les cases africaines, les igloos lapons, les palaces occidentaux, les maisons de papier du Japon, les peuplades troglodytes, partout, les habitants étaient au courant de mon odyssée, de la menace qui pèserait sur nous, si nos chercheurs passaient outre aux recommandations de L?Esprit Suprême.
J?ai été appelé à me rendre au Brésil, en Chine, au Sénégal, et bien sûr dans diverses villes françaises, pour parler de mon voyage vertigineux.
Je me suis félicité d?avoir, dès mon retour sur terre, tenu à écrire immédiatement un contre rendu de ce que j?avais vu, car, je dois bien l?avouer, lors de mes conférences, j?ai conscience d?avoir ajouté quelques détails de mon cru, qui à mon sens « faisaient bien » dans le décor, mais où la réalité avait du mal à trouver sa place..Je ne suis qu?un homme.
Seul donc, mon premier rapport, présente toutes les garanties d?une vérité absolue.
Evidemment, je suivais les progrès rapides de mon apostolat, mais franchement, ce qui occupait mes pensées avec opiniâtreté, malgré mes efforts pour me consacrer à ma mission, c?était Anna. Anna, ma merveilleuse, ma belle, ma douce, mon intelligente, ma délicieuse Anna.
Lorsque nous nous sommes quittés, je lui avais demandé, quand elle pensait revenir. Elle n?avait pas pu me répondre, et je lui avais dit avec une sincérité totale.
- Anna, mes sentiments pour vous sont largement au dessus des amours humaines les plus accomplies. Même si jusqu?à la fin de ma vie terrestre, je ne dois plus vous revoir, je ne me marierais jamais, et jamais je n?aurais d?enfant. Je vais passer le reste de ma vie à vous attendre, ou plus exactement à attendre le moment de vous rejoindre.
- Vous êtes un homme merveilleux, mais vous le savez, nous ne pouvons avoir de relations pérennes. Je suis morte il y a quatre siècles. Je ne suis qu?une morte en permission très provisoire. Profitez de votre temps de vie, et lorsque nous nous reverrons, votre temps sur terre terminé, vous constaterez que vos sentiments se seront entièrement modifiés. C?est à juste raison que vous parlez de purs esprits. Ce qui s?est passé entre nous sur terre, aurait été absolument impossible entre des esprits, même réincarnés, là haut.
Je vous le dis, en cet instant, sur terre, je brûle pour vous d?un amour, envoûtant, puissant, mais je sais aussi qu?en quittant la terre, je redeviendrai un esprit, sans ces pulsions charnelles.
Je ne pus m?empêcher de lui dire que l?Esprit Suprême, pourrait bien veiller à ce qu?il y ait un peu plus de justice sur terre. Pour ne parler que de mon cas personnel (qui je l?avoue, présente un intérêt primordial à mes yeux?. ) j?étais condamné à vivre avec, dans le c?ur, un amour impossible, alors qu?Anna, revenue chez elle, si elle parvient à se souvenir encore de moi, y pensera d?une façon détachée et sans tourments.
Anna, toujours bonne, me fit remarquer avec un sourire, que d?une part, j?aurais des souvenirs vivaces, plus exaltants, que je pourrais ressentir toute ma vie, alors qu?elle, ne ressentirait plus, même en souvenir, la passion brûlante qui l?avait dévorée sur terre. Par ailleurs, me dit-elle, la justice est une notion purement humaine que l?on a inculquée aux terriens pour rendre leur vie sociétale plus supportable. La justice n?a pas de vertu intrinsèque et universelle. Pas plus que la charité. Mais les hommes ont besoin de ces notions pour survivre d?une part, mais surtout, pour éduquer, affiner leurs esprits qui seront nécessaires à L?Esprit Suprême
Je ne partageais pas cette façon de voir, mais, nous n?allions pas nous disputer pendant les derniers instants passés ensemble. Nous avons fait une dernière fois l?amour, et je l?avoue, lorsque nous nous sommes retrouvés couchés, côte à côté, comblés et malheureux à la fois, j?ai pleuré sur mon bonheur infini??et pourtant finissant.
Anna a refusé de me dire comment, et d?où, elle allait repartir.
- Croyez-moi, me dit-elle, vos souvenirs seront plus enivrants, s?ils restent entourés d?un halo de mystère. Je vais prendre un taxi, et c?est tout ce que vous saurez. Surtout, n?oubliez pas que votre mission ne sera terminée que lorsque les dirigeants de toutes les nations importantes, auront accepté de signer une charte mondiale, aux termes de laquelle, tous les préparatifs en vu d?une évasion vers une autre planète, seront interrompus.

Il m?avait semblé, au début de ce que je pourrais appeler notre évangélisation des terriens, qu?avec les preuves irréfragables que je rapportais, il serait aisé de parvenir à un accord général.
Mais ce ne fut pas si simple !
Car, c?était sans compter, sur certains lobbies qui avaient déjà dépensé des sommes colossales, pour aller sur d?autres planètes et en premier lieu sur Mars.
Bien sûr, les relativement petits pays, France, Allemagne, et Angleterre inclus, ont vite été d?accord pour signer une charte universelle par laquelle toutes les nations acceptaient d?interrompre à jamais les recherches en vue d?envoyer des humains sur d?autres planètes.
Ce sont les Russes, les Américains, et les Chinois, qui se montrèrent les plus réfractaires à la signature de cette charte. Au point, que, certains, en Europe, envisageaient même d?utiliser l?armement nucléaire, pour ramener les Etats réticents à plus de sagesse. Mieux valait, disaient-ils faire la part du feu, et détruire une partie de l?humanité plutôt que de la sacrifier en totalité.
Je fus amené à faire des conférences, dans les grandes villes des Etats Unis et de Russie, et je finis par obtenir un accord sur le libellé de la charte.
Tous les pays, s?engageaient à ne jamais envoyer d?être humains, en dehors de la zone terrestre. En revanche, les Etats, pouvaient continuer à explorer l?univers pour faire progresser la science et notre connaissance du monde, en envoyant dans les espaces intersidéraux, des engins non habités.
Il m?avait semblé pouvoir accepter ce compromis, et une date avait été fixée pour la signature de cette charte par tous les représentants des Etats à l?ONU.
J?ai beaucoup parlé des grands de ce monde et des discussions entre Etats, mais il y avait un phénomène, véritable lame de fond, qui balaya l?humanité tout entière.
Dès l?origine de l?homme, la peur de la mort avait été le sentiment le plus fort et le plus partagé. Chacun s?était posé cette question : Et après ma mort, que vais-je devenir ? Le néant ? Ou alors une partie de moi va-t-elle pouvoir survivre ? Comme il n?y avait aucune certitude, ni dans un sens ni dans l?autre, des religions, sous diverses formes avaient fleuri spontanément, dont la raison d?être, était de donner un espoir aux humains.
Oui, enseignaient toutes les religions, soyez certains qu?il y a une vie après la mort, et si vous avez une vie exemplaire, c'est-à-dire qui épouse tous les préceptes de notre religion, vous aurez une seconde vie plus agréable. Si, durant votre vie terrestre, vous tournez le dos à nos principes, alors, tremblez ! Car vous connaitrez pour l?éternité d?affreux tourments.
Toutes ces religions ne pouvaient que se baser sur la foi, puisque l?on ne connaissait pas la vérité. Il fallait croire, pour adhérer à une religion.
Il était évident, que tous les enseignements tirés de mon odyssée, bouleversaient toutes ces données millénaires.
Il était désormais établi d?une façon irréfutable, qu?à notre mort, notre esprit survivait, et continuait à évoluer en un autre lieu. Et il ne semblait pas qu?il y ait une séparation entre les bons et les mauvais terriens.
Cette certitude enlevait les craintes de tous les humains. Mais elle n?était pas sans danger.
Les hommes, sachant que la mort ne signifiait pas la fin totale de leur existence, risquaient d?être, de plus en plus, attirés par le suicide. Pourquoi fallait-il endurer les tracas de la vie terrestre, puisque, délivrés des contingences matérielles, les esprits pouvaient ailleurs, trouver la sérénité ?
Le suicide, jusqu?à nos jours, avait été une exception, parce qu?il fallait être vraiment désespéré pour courir le risque de se détruire à jamais, et ce d?autant plus qu?en général les religions avaient pris la précaution de spécifier que le suicide, entrainait automatiquement une seconde vie très désagréable.
Une religion faisait exception à cette règle : la religion musulmane s?offrait des héros, des combattants pour sa cause, en promettant à ceux qui se suicidaient, pour le triomphe de leur foi, un paradis merveilleux.
Sous réserve de cette dernière exception, plus rien ne retiendra désormais, une personne souffrant par exemple, de migraines persistantes, ou une femme abandonnée par son mari, de préférer passer tout de suite à la vie suivante, puisqu?il y en avait une, c?était une certitude..
Toutes les religions se retrouvaient devant le même problème. La foi, la croyance, qui était le socle de tout leur édifice, n?avait plus lieu d?être, puisque la certitude était établie. Il fallait sans tarder remanier tous les principes qui avaient été établis depuis des siècles et quelquefois des millénaires. Il fallait trouver une parade à la solution facile du suicide, et tous les théologiens avaient l?obligation d?une reconversion?.et du pain sur la planche !
Quelques grands esprits humains, dont Einstein, avaient entrevu ce qui semblait être la réalité. Je dis « semblait », car malgré toutes mes découvertes, ni moi, ni même les Esprits rencontrés sur Krop, ne détenons la vérité.
Le grand physicien, sans se prononcer sur les diverses religions, estimait que l?organisation de la Nature, postulait l?existence d?un Esprit Supérieur, auprès de laquelle, l?intelligence humaine était quantité négligeable.
Parmi tous les enseignements religieux, une affirmation était incontestablement fausse. C?était celle selon laquelle, Dieu nous avait créé à son image. La différence entre l?Esprit Suprême et l?homme est si grande, que ce n?est pas une question de degré, mais de nature. Aucune comparaison n?est possible. Le seul enseignement que j?ai pu retirer de mon aventure, est que l?Etre Suprême a besoin des esprits humains pour alimenter son énergie. C?est un peu comme le cheval qui a besoin du foin, mais il y a une énorme différence de nature entre un cheval et le foin.
Je ne pouvais réfléchir à tout cela, que durant mes rares moments de détente, car, je n?avais plus beaucoup de temps à moi.
J?étais appelé aux quatre coins de notre planète, pour faire des conférences, et surtout, on me demandait de venir parce que, chaque homme voulait avoir vu ce nouveau Messie, qui avait apporté la réponse, à une question qui remontait loin, dans la nuit des temps.
Passionné d?aviation, j?aimais faire mes tournées de conférence en pilotant moi-même un appareil que je changeais en fonction des distances à parcourir.
Trois jours, avant la date arrêtée pour la signature de la Charte, j?étais à bord de mon Beach kraft personnel, et revenais de Moscou. Le temps était nuageux, par moment, mais dans l?ensemble le pilotage n?était pas désagréable. Tout allait bien à bord, lorsque soudain, alors que je me trouvais en plein soleil depuis un bon moment, ce fut l?obscurité. Lorsque mes yeux se furent accoutumés je constatais que j?étais dans un nuage bleu. J?eus alors la certitude que mon voyage m?emmènerait plus loin que prévu.
De fait peu de temps après, le nuage bleu se dissipa. Il n?avait servi qu?à me prévenir que j?allais de nouveau effectuer un bond prodigieux dans l?espace, et je vis, comme durant mon voyage de retour, des planètes se succéder à une allure folle.. Elles apparaissaient, grossissaient, rapidement, pour disparaitre instantanément, pendant qu?une autre apparaissait. J?étais en route vers Anna, car c?est à elle, exclusivement, que je pensais immédiatement.
Comme la première fois, je vis bientôt le sol de Krop. Instruit par l?expérience, au lieu de me poser loin des traits noirs, je vins au contraire atterrir tout près de l?un d?eux.
C?est sans inquiétude particulière, mais au contraire avec impatience que je sautai de mon cockpit, et me présentais devant un trou noir.
Comme la première fois, j?étais attendu.
- Bienvenue à vous, me dit une voix. L?escalier vous attend.
En effet un escalier se présenta devant moi, éclairé sur environ 5 mètres, et je m?engageais, sans hésitation cette fois-ci.
Je ne pus attendre d?avantage pour poser la question.
- Pouvez vous me dire où se trouve Anna ?
- Evidemment non. Je ne sais qui vous appelez Anna. Ici, nous ne portons pas de nom, puisque nous sommes identifiables par nos pensées.
Zut ! Comment allais-je faire pour la retrouver ? Je me souvins, alors que François, avait pris ce prénom pour me faciliter les choses, qu?il avait une fonction, ou plus exactement un titre, je crois, que l?on m?avait cité une fois lors de mon premier voyage. Je fis un effort de mémoire et parvint à le retrouver.
Le Ralah ! C?était ça. Et je posai la question :
- Pourrais-je voir le Ralah ?
- C?est vers lui que je vous emmène.
Il était évident, que ce ne pouvait être que lui qui m?avait fait revenir, j?aurais du y penser immédiatement, mais je dois avouer, qu?Anna occupait toutes mes pensées depuis que j?avais compris que j?allais revenir sur Krop.
Au bas des escaliers, qui disparurent, après mon passage, je me retrouvai dans l?un de ces couloirs qui semblaient constituer la totalité de l?architecture des lieux.
En entendant la voix de François, je m?arrêtai, attendant qu?il accomplisse sa réincarnation, ce qu?il fit lentement. Il était toujours souriant et me dit que globalement, j?avais fait du bon travail, mais qu?il restait quelques détails à régler.
Je n?étais pas opposé à la discussion sur les résultats de mon action sur terre, mais j?étais surtout impatient de revoir Anna. Je posai donc la question de savoir si c?est elle, qui allait s?occuper de moi durant mon séjour sur Krop.
Il me répondit?.sans me répondre :
- Votre séjour sera très court cette fois ci.
Je ne pouvais pas insister, sous peine de paraitre plus intéressé par mes propres sentiments, que par ma mission. Ce qui était vrai d?ailleurs, et je savais que François ne l?ignorait pas.
Je me sentis soudain très fatigué. Il y avait là, quelque chose de paradoxal. Ce n?était qu?un détail, mais j?ai horreur de ce qui peut paraitre irrationnel. La pesanteur sur Krop est très inférieure à celle existant sur terre. D?accord, les mesures du temps sont très différentes. Mais pourquoi, avais-je l?impression d?avoir besoin de dormir beaucoup plus souvent que sur terre ?
François qui semblait suivre mes pensées (Pourquoi dis-je « qui semblait » ? Je savais parfaitement qu?il lisait en moi) me répondit :
- C?est parce que votre organisme est habitué à une certaine pesanteur, et tout changement entraine un effort d?adaptation, effort qui engendre la fatigue. De même, j?en suis certain, après avoir séjourné ici, lorsque vous vous êtes retrouvé sur terre, vous avez du vous sentir très fatigué.
- C?est vrai?.. Ce qui est également vrai, c?est qu?il est pénible de savoir que toutes les pensées que l?on croit intimes sont parfaitement saisies par d?autres. Ce doit être difficile de demeurer ici.
- Absolument pas. Vous raisonnez avec un esprit humain, ce qui est bien normal. Mais lorsque nous sommes débarrassés de notre enveloppe charnelle et de toutes les petitesses qu?elle nous apporte, nous nous connaissons tous parfaitement, sans que cela engendre des sentiments typiquement humains, comme la jalousie, l?orgueil, la méchanceté, et surtout, le besoin d?argent. Nous savons que chacun est comme il est, et que c?est très bien comme cela, puisque chaque esprit, dans son genre, servira à l?Esprit Suprême.
- En quoi ces esprits humains peuvent-ils servir à l?Esprit Suprême ?
- Je crois que vous avez déjà posé cette question plusieurs fois, et qu?il vous a été répondu que vous n?étiez pas là pour satisfaire votre curiosité. Excusez-moi d?être un peu sec, mais il est important que vous concentriez toutes vos facultés intellectuelles sur la mission.
- Cette mission, je l?ai bien remplie, non ?
- Cela aussi, je vous l?ai dit. Globalement, oui. Mais il y a des détails, dont on vous parlera lorsque vous aurez pu réparer et restaurer votre corps. Vous allez rejoindre votre appartement.
Les contours de François s?évanouirent peu à peu, et, lorsqu?il eut entièrement disparu, une autre silhouette se forma, et je savais, bien avant que je puisse la reconnaitre, qu?il s?agissait d?Anna.
Bien sûr elle était vêtue de sa toge blanche.
C?était elle, sans discussion possible, elle était belle, ses yeux étaient vifs, et pourtant, il lui manquait une dimension qu?elle avait sur terre.
- Je suis heureuse de vous revoir. Vous allez occuper le même appartement que la première fois. Vous allez vous reposer, et lorsque vous vous éveillerez, comme d?habitude, je viendrai vous apporter un repas.
- Que vous partagerez avec moi ?
- Je ne pense pas. J?ai subi quelques remontrances, d?ailleurs parfaitement fondées, et il est indispensable que vous fassiez abstraction de vos propres sentiments, car vous ne vous appartenez plus, vous êtes investi d?une mission tellement plus importante que vos petites préoccupations.
- Vous appelez « petites préoccupations » le sentiment que je vous porte ? Vous lisez dans les pensées dites-vous, mais vous lisez bien mal, permettez-moi de vous le dire.
- Votre parole est libre, mais pensez que vous ne connaissez qu?un côté des choses, et il se trouve que c?est le petit, tout petit côté.
J?avoue, que je commençais à en avoir assez de me voir réprimandé sans arrêt, et je ne pus me retenir de lui dire :
- Je n?ai rien demandé à personne. Je n?étais pas candidat à la mission que vous m?imposez. Certes, je ne suis qu?un humain, c'est-à-dire un être inférieur à vous, mais il y a, en ce moment, 6 ou 7 milliards d?hommes sur terre. Choisissez- en un autre, et laissez-moi vivre ma vie de terrien.
- L?ennui, c?est que vous n?êtes pas sur terre, et que vous ne sauriez pas y retourner sans nous. Allons, calmez-vous !
Sans avoir fait un pas, la porte de mon appartement se présenta devant moi. J?entrai, refermai la porte sans dire un mot à Anna, et je me rendis dans ma chambre, où, comme d?habitude, un pyjama m?attendait sur le lit.
Je me déshabillai rapidement et m?endormis presqu?aussitôt.


































CHAPITRE 4








En me réveillant, je ne me sentais pas à l?aise. Je cherchais la raison de mon mal-être, lorsqu?Anna frappa à la porte, pour me dire qu?après ma toilette, un repas me serait servi.
Je ne lui répondis pas. En fait j?étais en colère. En colère ? Pourquoi ? Parce que j?en avais marre d?avoir été embrigadé dans cette histoire, sans avoir été consulté ? C?est vrai, ça ! Ils me kidnappent, me confient une mission sans me demander si je veux bien la remplir, et surtout si je me sens capable de la remplir. Il se trouve que cette mission, pratiquement impossible, puisqu?il s?agissait pour un homme seul, banal, bien comme les autres, de persuader l?humanité entière, qu?il fallait dans un domaine précis, renoncer à tous progrès, cette mission impossible, dis-je, je suis parvenu à la remplir dans un délai qui, sans me vanter, me semble fabuleux. Et que me dit-on ? Que ma foi, globalement je l?avais remplie ! Globalement !! Je vous en ficherai, du globalement !! Je suis parvenu à faire accepter la signature d?une charte par tous les chefs d?Etat de la terre ! Globalement ! Qu?est-ce qu?ils veulent de plus ? J?en ai marre !!
Pour faire une sorte de grève, j?étais resté dans mon lit. Oui, j?étais en colère. Et puis, peu à peu, je me suis rendu compte que je me racontais des histoires. En fait, si je ne me sentais pas bien dans ma peau, cela n?avait rien à voir avec ma fameuse mission. Non.
J?avais connu sur terre, une femme merveilleuse, qui outre ses qualités physiques, était aimante, amoureuse, et nous avions vécu en communion parfaite, des moments de bonheur indicibles. Nous étions proches, au point que nous n?étions pas deux êtres distincts, nos rapports étaient fusionnels, nous ne formions qu?Un, vivant dans un Nirvana. Et qui retrouvais-je sur Krop ? Une femme, certes morphologiquement aussi jolie que sur terre, mais dépourvue de toute chaleur, distante, froide même, à peine heureuse de me revoir. J?étais vexé, ou plus exactement frustré, et profondément malheureux.
Que m?avait-elle dit déjà ? Ah, oui ! Qu?elle avait reçu des remontrances. Finalement, ce n?est peut être pas elle qui est fautive, mais ses pseudo chefs qui, tout de même, pourraient reconnaitre, qu?Anna et moi, avons, ensemble rempli une mission, plus que globalement réussie.
Mais non !! Je ne pouvais lui trouver une excuse. Nul ne pourrait m?imposer, à moi, de ne plus l?aimer. Il devrait en être de même pour elle !! Ou alors, c?est que son amour est moins puissant, moins authentique que le mien.
J?en avais marre ! Marre de cogiter, et je me suis levé pour faire ma toilette.
Après le repas, banal mais correct, je suis allé m?asseoir dans un fauteuil, bien décidé à ne prendre aucune initiative et à les laisser venir.
J?étais installé depuis peu, remâchant mes aigreurs d?un amour mal partagé, lorsqu?à côté de moi, une silhouette se dessina. J?espérais Anna. Ce fut François.
- Alors, mon cher, on fait une petite crise ? Croyez-moi, ce n?est pas très grave.
Tout d?abord, vous avez fait du bon travail sur terre, et globalement (oui, globalement, même si vous n?aimez pas ce mot) votre réussite ne fait pas de doute.
La seule petite réserve, la seule erreur que vous ayez commise, mais vous allez bien vite la réparer, c?est lorsque vous avez précisé dans la charte, que la poursuite des recherches humaines dans l?espace avec des engins non habités, restaient possibles..
Il n?en est pas question.
Toutes choses, dans l?univers, doivent leur existence à l?Esprit Suprême. Mais il faut bien comprendre, que l?humanité a une place à part. L?Esprit Suprême a créé les hommes pour avoir en permanence une provision d?Esprits qu?il utilise pour la poursuite de son Oeuvre, qui n?en est qu?à ses débuts. Celui que nous appelons Le Caliure, qui lui aussi doit son existence à l?Esprit Suprême, qui voulait en faire son bras droit, à la suite de ce que vous appelleriez en langage humain, « un vice de fabrication » a décidé d?entrer en rébellion contre l?Esprit Suprême, et de récupérer a son profit, la totalité de ses pouvoirs.
Et c?est là, qu?il faut que vous compreniez bien toute l?étendue de votre mission.. Vous avez obtenu qu?aucun humain ne coure le risque d?être capturé par le Caliure, en s?éloignant de la sphère terrestre. C?est bien. Mais il ne faut pas non plus qu?il puisse s?emparer des engins sophistiqués produits par l?homme, car, ces objets, il pourrait les reproduire en grands nombres, et les utiliser contre vous, pour vous détruire. En résumé, il ne faut pas donner au Caliure des armes qu?il utiliserait à coup sûr en premier lieu contre les terriens. Quand vous serez bombardés par des milliers et des milliers d?engins portant des possibilités de destruction, l?humanité sera condamnée à disparaitre. Suis-je parvenu à me faire bien comprendre ?
Ma hargne n?était pas tombée, et c?est d?un ton rogue que je lui répondis :
- Regardez vous-même, puisque vous lisez en moi !!
- Je vois, je vois me dit-il. Même pour un humain, vous êtes vraiment têtu !
Et sa silhouette s?estompa.
Je pensais, que, comme les autres fois, elle serait remplacée par celle d?Anna. Mais il ne se produit rien.
J?étais de plus en plus à cran. D?accord, j?avais compris ce que m?avait dit François sur la nécessité de ne pas livrer à leur Caliure, notre Diable à nous, nos secrets de fabrication. Mais pour moi, c?était secondaire. Il y avait deux raisons à ma rogne. D?abord, Anna qui semblait me battre froid, maintenant qu?elle était revenue dans son élément, alors que mon amour avait toujours la même intensité. Et puis, il y avait cette sensation désagréable, plus que désagréable, intolérable, de ne plus avoir de pensées intimes pour mes interlocuteurs, alors que moi, j?étais dans l?incapacité de savoir ce qu?ils pensaient.
Cette situation d?infériorité, qu?ils ne manquaient pas une occasion de me faire ressentir, tous, aussi bien François, qu?Anna (En tous cas, c?est comme cela que je le prenais), m?énervait au plus haut point.
Après tout, s?ils sont venus me chercher, c?est qu?ils avaient besoin de moi, et s?il y a des efforts à faire, c?était à eux de les accomplir, pas à moi. Je pris la décision de rester dans mon appartement, sans en sortir, aussi longtemps qu?ils n?auront pas pris l?initiative, eux mêmes de venir me voir. Alors, je leur expliquerai???..Mais non ! Je ne leur expliquerai rien du tout : Ils n?auront qu?à lire en moi.
Je n?avais jamais eu la curiosité, de bien visiter mon appartement. Je décidai de le faire. J?avais déjà eu l?occasion de constater que dans la salle de bain, il y avait un petit meuble de pharmacie avec des comprimés de toutes sortes qui venaient bien sûr de nos pharmacies terrestres. Je pensais qu?il y avait peut être de la lecture quelque part.
Dans le salon, il y avait en effet, une petite bibliothèque, mais, les portes pleines, m?avaient caché les livres, bien alignés sur les étagères.
J?ai eu la certitude que cette bibliothèque avait été faite pour moi, car s?y trouvaient tous mes auteurs préférés, et en premier lieu, les ?uvres complètes de Marcel Pagnol.
Je pris le premier volume de la trilogie, et entrait avec un plaisir, toujours renouvelé, dans le café du Vieux Port de Marseille, pour y retrouver Marius, César, Panisse, Escartefigue, Fanny, Honorine, et monsieur Brun, le lyonnais, bien sûr.
Je connais pratiquement par c?ur la trilogie de Pagnol, et je la lis toujours avec un immense plaisir. Mais, pour la première fois, je lisais des pages entières en me demandant de temps en temps où j?en étais. Je lisais mécaniquement sans comprendre, et pour ce genre de livre, cela ne m?était jamais arrivé. Grave !
J?avais décidé de ne pas sortir de mon appartement, si je ne pouvais pas lire non plus, alors, qu?allais-je faire ?
Je me renversai dans mon fauteuil, les yeux fermés, et je pensai fortement à Anna.
Sa voix se fit entendre, j?ouvris les yeux : Elle était devant moi, toujours dans sa toge blanche évidemment.
- Alors, me dit-elle, on rêvasse ?
- Pourquoi me poser des questions ? Vous savez tout de moi, ce que je suis, ce que je pense, quelle idée me traverse la tête?.
- Je vous comprends, Pierre. (Je crois que sur Krop, c?était la première fois qu?elle m?appelait par mon prénom) Vous vous sentez en état d?infériorité, mais laissez-moi vous dire que ce n?est pas fondé. Je sais que vous êtes malheureux d?avoir vos pensées lisibles. Mais ce que je sais, moi, c?est que je vais me faire rappeler à l?ordre en vous parlant comme je le fais. Non ! Ne m?enviez pas trop. J?aimerais bien être une terrienne du XXIème siècle??et vivre une vie terrienne?...en même temps que vous.
- Grace à cet aveu, Anne, je me sens déjà mieux. Merci.
Après un court silence, Anna me révéla :
François veut que j?aille à lui. Vous le voyez, Pierre, ne vous plaignez pas trop, je ne suis pas libre non plus.
Et elle disparut.
C?est vrai qu?elle ne devait pas être heureuse non plus, en sachant, que tous ici pouvaient savoir ses pensées, ses sentiments pour moi, ils pouvaient la juger, et ?.la désapprouver. C?est bien joli de vivre à l?infini, mais, si j?ose dire, vivre à l?infini, et être sans cesse sous observation, ne pouvoir posséder une petite idée à soi, ou avoir un sentiment personnel, ce n?est pas vraiment une vie !!!!!!!


J?étais de nouveau épuisé. Décidément, le Krop n?était pas propice à la vie des humains dans sa boule ! Ce truc a été spécialement bâti pour des esprits non tributaires des nécessités physiologiques des hommes. Je me demande combien de temps ils vont me laisser ici. Si je ne peux être avec Anne, j?aime autant repartir sur terre. Encore faut-il qu?ils le veuillent aussi.
Je venais de pousser un long soupir, lorsque je vis une silhouette se former. Une visite. Cela devait être François, cette fois.
C?était lui.
Je ne lui ai pas laissé le temps de prononcer un mot, et je l?attaquais.
- Vous m?avez littéralement kidnappé pour m?amener ici.
Vous m?avez dit qu?il existait un Esprit Suprême, mais je n?en ai pas la preuve.
Vous m?avez dit qu?il faisait un élevage d?humains parce qu?il avait besoin de leur esprit. Qui me le prouve ?
Vous m?avez dit que l?un de ses adjoints, créé par lui, était entré en dissidence, et que ce Caliure, voudrait bien s?emparer d?humains. Cette idée farfelue, pourquoi la croirais-je ?
Vous m?avez dit que les humains ne devaient en aucun cas sortir de la zone terrestre sous peine d?être capturés par le Caliure. Où est la preuve ?
Vous m?avez demandé d?aller jouer au Messie pour informer la terre entière de tout cela. J?y suis allé, j?ai remué la terre entière et suis parvenu à faire accepter la signature d?une charte par tous les hauts dirigeants de la terre. Vous me kidnappez une seconde fois pour me dire que je n?ai pas entièrement rempli ma mission.
Alors, zut, zut, et zut !! Je veux retourner sur terre, et ne plus entendre parler de toutes vos histoires !
Les yeux sans expression de François étaient fixés sur moi, et il resta un long moment silencieux, puis il me dit :
- En somme, vous êtes le seul humain qui ne croit pas à tout ce que vous avez vu et appris. Vous avez persuadé des milliards d?humains, alors que, seul, vous restez sceptique. Curieux. Mais je ne répondrai pas à toutes vos doléances. Je n?y répondrai pas, parce qu?elles ne constituent pas votre véritable préoccupation. Je vais répondre à la seule question qui vous intéresse. Et même si vous n?en avez pas parlé, vous le savez parfaitement
A titre tellement exceptionnel, que ce sera le premier et certainement le dernier cas, je vais autoriser Anne, à reprendre une seconde vie de terrienne. Lorsque vous reviendrez parmi nous, la seule sanction que nous appliquerons à Anne, c?est qu?elle redémarrera en première classe, au lieu de reprendre sa place en cinquième classe. Mais j?ai tout lieu de penser qu?elle sera d?accord avec mon offre.
Ce problème, primordial pour vous, étant réglé, nous allons parler du parachèvement de votre mission.
Il faut bien comprendre l?importance de ce que nous vous demandons.
Imaginons que vous lanciez des fusées sur Mars, Vénus, ou une autre planète du système solaire, pour commencer. La puissance de l?Esprit Suprême est encore insuffisante, faute d?esprits humains qui lui donnent son énergie, pour contrôler tout l?univers en expansion. Il est malheureusement certain que le Caliure, capturera ces fusées issues de cerveaux humains, et que, le modèle sous les yeux, il pourra en créer d?autres, en grand nombre qu?il enverrait sur terre, avec des produits destructeurs pour la race humaine.
Il faut que vous sachiez que la terre seule, dans tout l?univers, abrite des êtres pourvus d?esprit : les humains. C?est là, une chose que vous ne saviez pas. Nombre de vos savants, se basant sur la loi des grands nombres, croient qu?il existe d?autres êtres vivants dans l?Univers. C?est faux. Or, les humains sont indispensables pour la poursuite de l?Oeuvre de l?Esprit Suprême, Oeuvre qui n?en est qu?à son tout début. Si c?est le Caliure qui prend le dessus, nous savons qu?après avoir détruit l?Esprit Suprême et les esprits humains, son projet est de réduire tout l?Univers en une seule boule sur laquelle il s?installera et empêchera toute évolution, et toutes vies, même primaires.
Vous allez retourner sur terre. Vous serez accompagné par Anna, qui restera là bas avec vous jusqu?aux termes de vos vies, et vous allez expliquer tout ce que je viens de dire aux terriens pour qu?ils signent une nouvelle mouture de la charte.
Devant l?offre totalement inattendue d?autoriser Anna à revenir sur terre, je ne pouvais que m?excuser, auprès de François pour les termes véhéments que j?avais utilisés en m?adressant à lui. Puis, je lui assurai qu?évidemment je ferais tous mes efforts pour qu?un nouveau pacte, plus rigoureux soit signé par les principaux chefs d?Etat de la terre.
Je n?étais pas certain du tout de réussir, et j?aurais bien aimé pouvoir amener aux hommes, un petit élément nouveau, pour convaincre plus facilement mes contemporains de la nécessité de stopper absolument toutes les recherches concernant l?envoi de fusées même non habitées, en dehors de la zone terrestre.

- Nous allons y songer me dit François auquel je n?avais rien dit, mais qui, je l?oublie de temps en temps, lit parfaitement dans mes pensées.
- J?ai peut-être une idée à vous soumettre. Puisque, Anna, a la possibilité de s?incarner et de se désincarner, elle pourrait en faire la démonstration devant un public nombreux et choisi. Je suis persuadé que les plus sceptiques seraient convaincus de la puissance de l?esprit.
- Malheureusement, il y a un élément dont vous ne tenez pas compte, et c?est bien normal, car vous ne le connaissez pas.
Si Anna prend la décision de redevenir une humaine, elle redeviendra ce que sont les femmes sur terre : Ni plus ni moins. Elle n?aura plus la possibilité de se désincarner à volonté.
Non. Votre proposition n?est pas valable.
En revanche, je pense à un autre moyen qui amènerait les humains à ne pas douter?.s?il reste encore des sceptiques, car je crois que la révélation de certains secrets familiaux a déjà eu des effets positifs. En fait, Je crois qu?il ne reste qu?un sceptique, et c?est vous !
Il faudrait, qu?une fois de retour sur terre, vous demandiez à tous les astronomes, professionnels et amateurs, de braquer leurs télescopes sur la lune.
Ils pourront observer, 8 jours après votre retour sur terre, qu?une inscription immense, apparaitra sur la lune. Il s?agira de votre prénom : Pierre.
- Votre idée est excellente mais ne pourriez- vous pas ajouter celui d?Anna ? Pierre et Anna. Cela me ferait plaisir.
- Je vais vous donner un conseil. Vous êtes déjà un homme connu. Cela n?est pas sans présenter quelques inconvénients dans votre vie. Mais si l?on apprend que votre femme (Qui entre parenthèse n?a plus d?état civil) est une femme morte au XVIIème siècle et ressuscitée, vous n?aurez plus aucune vie privée, elle et vous.
Je vous conseille, si vous devez vivre avec elle, tout d?abord de lui donner un autre prénom (Puisque, celui d?Anna est connu par vos écrits) ensuite de ne pas essayer de vous marier, puisque vous ne pourriez fournir aucun papier, ensuite de faire en sorte, qu?elle reste toujours dans l?ombre.
Enfin, il s?agit là d?un simple avis. A vous ne vous organiser comme vous l?entendez.
Je vous laisse. Nous ne nous reverrons que lorsque votre séjour sur terre sera terminé.
La forme de François s?estompa peu à peu, et presqu?immédiatement, ce fut Anna qui se présenta devant moi. Elle était souriante et me dit :
- J?ai lu toutes les pensées de François. Bien sûr j?accepte ses conditions et ses conseils. Lorsque je reviendrai ici, je ne serai qu?un esprit de première classe. Sur terre, nous ne nous marierons pas, et je m?efforcerai de rester dans l?ombre, pour que nous ayons une vie privée paisible. En revanche, pour le prénom, pourquoi en changer ? A moins que vous ne le vouliez ? Mais, comme vous le dîtes sur terre : «Il n?y a pas qu?un âne qui s?appelle Martin »
Pour le prénom, je ne voyais pas non plus l?intérêt d?en changer. Je sentais bien qu?elle était heureuse, mais il lui manquait quelque chose, et bien évidemment, elle s?en aperçut.
- N?oubliez pas Pierre, que pour l?instant je ne suis qu?un esprit réincarné, je ne suis pas une vraie humaine. Un peu de patience, et vous retrouverez celle que vous avez connue, et qui bravant les interdits a été, durant quelques heures terrestres, une véritable femme.
Elle me prit par la main, nous sommes sortis de mon appartement, et après quelques pas dans un couloir, nous avons gravi les marches de l?escalier qui nous menaient à la surface de Krop, où nous avons retrouvé mon appareil. Une fois harnachés, nous sommes partis à une vitesse stupéfiante vers la terre.
















































CHAPITRE 5







Comme la première fois, j?ai repris les commandes de mon appareil, à environ 100 kilomètres d?Agen.
En descendant de mon appareil, je constatais qu?Anna était redevenue une véritable humaine, et nous nous sommes longuement embrassés, devant quelques employés de l?aéroport médusés de nous voir si pressés d?être l?un près de l?autre, alors que nous venions de voyager ensemble.
Lorsque nous étions montés dans mon avion, Anna était vêtue de sa toge blanche. Quand elle en était descendue, elle avait ce tailleur crème que j?aimais tant, et qui lui allait si bien.
J?ai failli lui demander comment cette nouvelle transformation avait pu s?accomplir, puis j?ai pensé en un éclair, que j?avais besoin de savoir si elle lisait encore dans mes pensées. La vie sur terre serait impossible, si elle connaissait toutes mes pensées, alors que moi, j?ignorerais beaucoup des siennes.
- Ne crois pas que je peux encore lire dans tes pensées, je te le jure, ce n?est plus le cas. Mais ma toute petite intelligence humaine me permet de deviner ta surprise. Une femme en toge, s?est embarquée dans ton avion, et à l?arrivée, tu la vois en tailleur. Je puis te dire, que c?est la dernière gentillesse de François, qui a tenu à me fournir un vêtement purement terrestre. Mais tu peux être assuré que désormais, nous serons un homme et une femme, comme les autres. Je suis redevenue une terrienne.
Nous sommes entrés dans mon appartement, et nous avons été l?un à l?autre, dans un tourbillon ascendant, qui, tout à la fois, était d?une violence et d?une douceur infinie.
Lorsque nous sommes revenus sur terre ( au sens figuré), ma mission me revint à l?esprit. Je pris mon téléphone et appelait Dubois, à l?Agence France Presse.
- Ou étiez vous passé ? J?ai du vous téléphoner 5 ou 6 fois, et je suis toujours tombé sur votre répondeur.
- D?où je me trouvais, je ne pouvais pas vous téléphoner.
- Etes-vous en train de me dire que?..vous êtes retourné là bas ?
Au lieu de lui répondre, je lui demandai quand je pourrais le voir. Il me répondit qu?il était à mon entière disposition. Ce n?était décidemment plus le même bonhomme, hautain et un peu méprisant, du début de notre première entrevue. Je n?en tirais nulle fierté, ce qui prouvait que mon séjour parmi les Esprits avait laissé une trace en moi, et que je parvenais à prendre quelque distance avec les petits côtés, des sentiments humains.
J?ai donc dit à Dubois, que je serai dans son bureau le lendemain à 14 heures, et que je serai accompagné de ma fiancée, qui craignant que je ne reparte une nouvelle fois, ne voulait plus me laisser voyager seul.
C?est au cours d?une nuit merveilleuse que nous avons décidé d?un commun accord, que nous ne nous quitterions jamais, et que lorsque l?un cessera sa vie terrestre, l?autre le suivra immédiatement.
Le lendemain, en fin de matinée, nous sommes montés dans mon avion, et au début de l?après midi, nous entrions ensemble dans le bureau de Dubois.
Les présentations faites, ce dernier, sans aucune malice, me dit :
- Vous m?avez habitué à des évènements extra terrestres, et je me demande si une femme aussi belle (Et il s?inclina devant Anna) ne serait pas aussi, d?un autre monde ?
Sans faire d?entorse à la vérité, je lui répondis que j?étais allé dans un monde d?esprits, mais que les corps humains ne pouvaient être que d?origine terrestre.
Puis, nous avons abordé le problème qui m?amenait. Il poussa de hauts cris quand je lui dis que la charte qui devait être signée par les chefs d?Etat, était insuffisante et qu?il fallait en signer une autre. Nous avions eu tellement de mal à convaincre certains, qui, travaillés par les lobbies, tenaient à la poursuite des recherches spatiales, que Dubois estimait impossible de remettre en question l?accord intervenu.
Je lui répondis que pour l?instant, il suffisait que l?Agence France Presse publie un communiqué, par lequel, il était demandé, à tous les astronomes professionnels ou amateurs, de diriger leurs télescopes vers la lune, afin qu?ils constatent que pour le moment, son aspect n?était pas modifié, mais que dans quelques jours, ils verraient quelque chose de tout


Je lui répondis que pour l?instant, il suffisait que l?Agence France Presse publie un communiqué, par lequel, il était demandé, à tous les astronomes professionnels ou amateurs, de diriger leurs télescopes vers la lune, afin qu?ils constatent que pour le moment, son aspect n?était pas modifié, mais que dans quelques jours, ils verraient quelque chose de tout à fait nouveau, qui leur permettrait de constater, que des forces qui
nous sont supérieures, ont un nouveau message à nous transmettre.
Dubois me dit en riant que ma phrase avait été un peu longue, mais qu?elle n?avait pas suffi à lui faire changer d?opinion. Une charte allait été signée, par laquelle, les Etats s?engageaient à ne pas envoyer d?êtres humains en dehors de la zone terrestre. Cela avait été admis par tous les Etats. Bien.
Mais, on ne pouvait pas tout remettre en question, car il était évident, que quelques esprits scientifiques, voudraient à tout le moins pouvoir continuer à faire joujou avec les fusées qu?ils avaient créées. C?était un minimum.
Heureusement, je me trouvais tout près d?Anna, et je lui donnais un léger coup de pied, juste avant qu?elle n?intervienne dans la conversation. Elle avait encore du mal à se mettre dans la peau d?une simple mortelle, et j?avais vu qu?elle s?apprêtait à intervenir pour plaider la cause pour laquelle nous étions là. Normalement, elle devait rester étrangère à ces problèmes.
Par la suite, elle me dit que j?avais vu juste, et que j?étais intervenu à temps, car elle s?apprêtait à faire la démonstration que ma demande ne pouvait être repoussée.
C?est donc moi qui, avec application, me mis à expliquer que justement, les fusées sophistiquées de messieurs nos savants, ne devaient pas tomber sous n?importe quelle tutelle, car elles pourraient nous être retournées en grand nombre, munies de produits nocifs pour l?humanité.
Nous avons discuté assez longuement, car Dubois ne voyait qu?une chose : Nous avions accepté que les chercheurs poursuivent leurs études par l?envoi d?engins dans le cosmos, et revenir sur cet accord, pourrait prouver que toute cette histoire n?était sans doute, pas sérieuse.
Je lui indiquais que c?était moi, un simple mortel, qui avait cru pouvoir faire une concession aux savants de l?astronautique, et que j?étais le seul responsable de l?autorisation qu?à tort, j?avais donnée.
Je lui rappelais que dans quelques jours, des milliers d?astronomes allaient pouvoir constater que des forces infiniment supérieures aux nôtres existent, et qu?elles sont en droit de nous donner des directives fermes..
Dubois finit par me donner son accord, pour passer un communiqué destiné à tous les astronomes, et leur conseillant de braquer leurs télescopes sur la lune. En revanche pour demander la renégociation d?une nouvelle charte, il ne pouvait rien décider et me proposa de revenir dans 48 heures pour organiser une réunion avec tous les dirigeants de l?Agence.
Puis, il me fit raconter en détails (Je n?ai pas parlé d?Anna bien sûr) mon deuxième fabuleux voyage, et il apporta la conclusion.
- Vous avez vécu des aventures extraordinaires. Cependant, je n?aurais pas aimé personnellement me retrouver dans les espaces intersidéraux dans un petit avion conçu pour effectuer des sauts de puce sur notre bonne terre !
- N?oubliez pas que mon avis n?avait pas été sollicité. On m?a kidnappé, et je n?ai pas le mérite d?avoir voulu ces aventures. J?étais en quelque sorte un volontaire désigné.
Afin qu?aucun doute ne naisse dans l?esprit de Dubois, j?ajoutai en regardant Anna dans les yeux :
- Le plus dur pour moi, a été de penser à Anna qui, restée sur terre, devait certainement être très inquiète de ne pas avoir de mes nouvelles.
Entrant dans le jeu, elle confirma :
- C?est vrai que je n?aime pas le voir partir dans son avion, mais quand, de plus, il me laisse plusieurs jours sans me donner de nouvelles, je suis morte d?inquiétude.

Deux jours plus tard, je revenais à l?Agence, en me demandant comment ces messieurs de la direction allaient accueillir ma nouvelle exigence. En fait, je pense que Dubois avait du plaider ma cause avec succés, car ils avaient pratiquement pris la décision de lancer, dès après l?apparition du signe sur la lune, un communiqué demandant une nouvelle négociation de la charte.
Je ne sais le nombre de télescopes, qui étaient braqués sur la lune, au moment où le mot « Pierre » apparut à sa surface, mais ce qui est certain, c?est qu?il y en avait même dans les coins les plus reculés de la terre, et que l?effet fut encore plus extraordinaire que je ne l?avais imaginé dans mes moments les plus optimistes.
Il était incontestablement confirmé d?une part, que des forces qui nous sont supérieures existaient réellement, et d?autre part, que j?étais, moi, Pierre, leur représentant sur terre.
Il me fut demandé une nouvelle fois, de prendre la parole devant l?assemblée générale de l?ONU, et j?eus la satisfaction de constater, que tous les ambassadeurs qui me succédèrent à la tribune, donnèrent leur accord pour qu?une nouvelle charte, interdisant l?envoi de tout engin spatial au-delà de la distance de la lune, soit rapidement signée.
J?ai aussitôt pensé que François lui-même ne pourrait plus parler de mission « globalement réussie ». J?avais obtenu, cette fois, tout ce qu?il désirait.

























































CHAPITRE 6









Il était évident, que je ne pouvais redevenir un homme anonyme, et j?eus des obligations mondaines très désagréables, car mon seul désir, était de me consacrer à Anna, et à notre amour.
Je parvins cependant à réduire ces obligations au strict minimum, et à consacrer le plus de temps possible à Anna et notre amour. Le premier mois fut idyllique. Dans mes rêves les plus fous, je n?avais jamais imaginé qu?un bonheur aussi complet aurait pu être vécu sur cette terre.
Notre entente était parfaite, et je ne pouvais déceler la moindre fêlure dans nos rapports fusionnels.
Je fus tiré brusquement, de mon nirvana, par Anna elle-même qui me dit un jour :
- Je ne peux rien te cacher, mon Pierre, et je dois te dire combien il m?est difficile de trainer ma carcasse.
- Ta carcasse ? Dis-je en riant. Elle est merveilleuse, et avec ta grâce incomparable, tu ne donnes pas l?impression de te trainer !
- Je parle sérieusement, Pierre. Toutes ces nécessités corporelles, sont pénibles. Il était tellement plus simple, plus beau, de n?être qu?esprit??
- Anna ! Tu n?aimes pas vivre avec moi ? N?es-tu pas merveilleusement heureuse, quand nous nous regardons dans les yeux, quand nos c?urs battent à l?unisson, quand la main dans la main, nous regardons un coucher de soleil, quand nous faisons l?amour, quand nous sentons que nous ne faisons qu?un, que rien ni personne ne pourra nous séparer, et que même, notre vie terrestre terminée, nous seront encore ensemble dans le monde des esprits ?
- Si, bien sûr, me dit-elle sans grande conviction, ces moments là sont bien agréables..
- Bien agréables seulement ? Tu me dis « bien sûr » mais, tu ne sembles pas sûre?.d?en être sûre?
- J?ai du mal à te l?avouer, mais tout ce qui est charnel, me lasse ?et même, pardonne-moi, me dégoûte un peu.
J?étais abasourdi, et atrocement malheureux. J?avais, depuis le début de notre vie commune, la conviction que tout comme moi, elle était parfaitement heureuse, et je suis resté sans voix un bon moment.
- Ce que tu viens de me dire est horrible. C?est horrible parce que j?étais persuadé que tu étais parfaitement heureuse, comme je l?étais, c?est horrible, parce que, sans issue. Nous sommes des êtres de chair et de sang, et nous vivons ici, nous ne pouvons être autrement, puisque nous sommes sur terre.
- Sur terre, c?est vrai. Tu as parfaitement raison. Nous ne pouvons vivre autrement sur terre.
- Qu?essayes-tu de me dire ?
- Je te dis, très simplement,( pardonne-moi, mon amour) que la condition humaine n?est acceptable que lorsque l?on n?a pas connu autre chose. Or, seule sur cette terre, j?ai connu, une nature purement spirituelle, dégagée de tous ces petits tourments corporels qui s?ajoutent les uns aux autres, pour constituer finalement, la trame dense et principale, de l?existence sur terre. Il faut bien l?avouer : Sur le plan physique, nous subissons plus de petits tourments, que de vrais
plaisirs.
- Mais?.Et l?amour essayais-je de lui dire ?
- L?amour est une chose merveilleuse mais dont la dimension spirituelle est infiniment plus importante que la partie purement physique, qui d?ailleurs est fugace, très temporaire.
L?amour physique, n?est qu?un spasme éphémère, alors que pour les esprits, l?amour, se déroule sans à-coups, dans la continuité.
Je ne savais que dire. Il me semblait que lorsque nous étions sur Krop, mon amour de terrien était beaucoup plus puissant que le sien. Mais elle avait un avantage sur moi, c?est qu?elle avait expérimenté les deux situations.
J?étais effondré, et j?ai parfaitement conscience de ne pas avoir été un compagnon très agréable, à partir de cette explication.
Trois jours après cette conversation, j?étais parti faire un tour en avion, pour essayer de me détendre. Alors que je rentrais chez moi, je vis que sur la porte d?entrée, une enveloppe était punaisée.
Immédiatement, saisi par un effroyable pressentiment, je regardais hébété cette enveloppe, sans faire un geste pour m?en saisir. Un voisin, descendant l?escalier me ramena à la réalité, en me saluant, il m?obligea à lui répondre, et reprendre mes esprits..
Je saisis l?enveloppe, entrai chez moi, m?installai dans un fauteuil, et les mains tremblante, je décachetai et lus :

Mon amour
C?était trop insupportable. Je suis repartie sur Krop. Je t?aime, et je t?attendrai là bas, où nous nous aimerons dans la pureté absolue.
Mon corps ne sera pas retrouvé, et comme je n?ai pas d?identité, tu n?auras pas d?ennuis.
A ceux, qui ont pu me connaitre, dis leur simplement que j?étais de passage et que je suis repartie dans mon pays d?origine, les Etats Unis par exemple.
N?écourte pas ton passage sur terre. Tu dois vivre cette expérience jusqu?à son terme naturel, et quand le moment sera venu, tu sais qui t?attendra.
Celle qui t?aime, signe pour la dernière fois :
Anna



FIN
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